Le tremblement de terre va peser sur l'activité économique de l'Italie

Les différents séismes meurtriers qui ont frappé l'Italie ces derniers jours vont avoir des conséquences négatives sur la croissance économique alors que le pays est déjà soumis à une politique d'austérité. Une première estimation fait état de 5 milliards d'euros de dommages.
Une unité détruite de la entreprise Haemotronic, spécialisée dans les technologies médicales à Medolla /Copyright AFP

Depuis le séisme du 20 mai qui, en pleine nuit, a violemment frappé la région de Modène et Ferrare, causant sept morts, puis la réplique encore plus tragique (17 victimes) mardi dernier, la terre n'a cessé de trembler en Emilie-Romagne. Et au delà du bilan humain et artistique (une église sur trois a été plus ou moins sérieusement endommagée), l'Italie doit désormais faire les comptes en termes d'impact économique.

Un poumon industriel sévèrement touché

Représentant près de 1% du PIB italien la zone frappée directement par le séisme constitue en effet l'un des poumons industriels de la péninsule avec son réseau de petites et moyennes entreprises notamment dans le textile ou la céramique. Les premières estimations évoquent des dommages estimés à 5 milliards d'euros pour les 28 communes touchées et situées entre Bologne, Ferrare, Modène et Reggio Emilia.

Déjà, la première secousse, de 6 degrés sur l'échelle de Richter, avait mis à terre une partie de l'économie locale. Dans la zone située à proximité de l'épicentre du séisme, une usine sur quatre a été entièrement ou partiellement détruite. Au total, plus de 5.000 salariés ont été contraints au chômage technique. Le premier séisme a ainsi provoqué pas moins d'un demi-milliard d'euros de dégâts pour l'économie de la zone notamment dans le secteur agro-alimentaire.

400.000 meules de fromages endommagées

Appréciée pour sa tradition gastronomique, l'Emilie-Romagne est notamment la terre du vinaigre balsamique, du jambon de Parme, de la mortadelle ou encore du parmesan. Selon la fédération d'agriculteurs Coldiretti, le second séisme a fait monter la facture à 500 millions d'euros rien que pour le secteur agroalimentaire. Pas moins de 400.000 meules de fromage (Parmigiano Reggiano ou Grana padano) ont été endommagées ou détruites par la catastrophe du 20 mai.

A la suite de la seconde grande secousse, le bilan économique est encore plus catastrophique. Partiellement endommagées ou entièrement détruites pas moins de 3.500 entreprises sont à l'arrêt. Plus de 20.000 salariés sont sans travail. "C'est un désastre économique", déplore l'adjoint régional aux activités productives de l'Emilie-Romagne Gian Carlo Muzzarelli. Le district biomédical de Mirandola, l'un des plus performants au monde, où sont implantées une centaine d'entreprises employant plus de 5.000 personnes a été terriblement touché. Aucun hangar ou centre de production n'a été épargné. "Nous repartons de zéro", a constaté le maire de la ville Maino Benatti.

Il sera pas facile de remplacer les travailleurs saisonniers

Mais l'activité sismique qui se poursuit risque aussi de ralentir la production dans toute la région. Mardi, par mesure de précaution, nombre de chefs d'entreprises ont demandé à leurs employés de rentrer chez eux, y compris les prestigieux constructeurs Ferrari ou Ducati. Des centaines de travailleurs saisonniers immigrés employés pour la récolte des fruits et légumes ont préféré quitter la zone. "Les Polonais, les Moldaves et les Roumains sont partis", a constaté le maire de Finale Emilia Fernando Ferioli, ajoutant : "Il ne sera pas facile de trouver des bras pour les remplacer".

Mario Monti pris à partie

Face à cette situation d'urgence, le président du Conseil Mario Monti a proclamé l'état de catastrophe naturelle dès la semaine dernière de manière à accélérer les procédures administratives pour la reconstruction et l'indemnisation des sinistrés. En visite dans la région pour témoigner sa solidarité aux victimes, celui-ci a néanmoins été pris à partie par une dizaine de personnes lui reprochant d'être à l'origine d'une cure d'austérité et d'une hausse des impôts qui ont déjà ralenti le niveau d'activité.

A la suite du second tremblement de terre, l'ancien commissaire européen a assuré que « l'Etat fera tout son possible dans des délais rapides. les citoyens doivent garder confiance. » Dès mercredi, le gouvernement a décidé l'augmentation de deux centimes pour toute l'année 2012 des taxes sur les carburants afin de venir en aide au territoire concerné. Le paiement des impôts sera différé et les communes touchées pourront déroger au pacte de stabilité pour couvrir les dépenses extraordinaires.

Le contrôle de sécurité des bâtiments va prendre du temps

"Les 2,5 milliards d'euros débloqués par le gouvernement ne suffiront pas", insiste le conseil régional d'Emilie-Romagne. D'autant que si nombre d'entrepreneurs sont décidés à relancer au plus vite leur activité et que la plupart des ouvriers, comme l'a constaté le quotidien La Repubblica, déclarent "préférer risquer leur vie plutôt que de perdre leur emploi ou de voir les entreprises délocaliser", la région risque d'être en partie paralysée pendant plusieurs semaines.

Car il va falloir non seulement, reconstruire les édifices publics et les usines touchés. Mais un contrôle sérieux des bâtiments va devoir être effectué. « Les hangars devraient être fermés au moins pendant quinze jours car ils ont été construits de manière inadéquate », s'est insurgé le sismologue Enzo Boschi.

La nécessité de respecter les normes anti-sismiques

« Il n'est pas naturel que les bâtiments s'écroulent dès qu'il y a une secousse, a également commenté la ministre Elsa Fornero, à l'étranger cela ne se passe ainsi. » Il y a trois ans, en raison notamment de constructions illégales ne respectant pas les normes anti-sismiques, le séisme de L'Aquila avait déjà fait plus de 300 morts. Cette fois, les autorités semblent décidées à contrôler toutes les usines avant de permettre le redémarrage de l'activité. D'autant que d'autres secousses sont probables sur le long terme. A Ferrare, le dernier grand tremblement de terre remonte à 1570. Mais l'activité sismique dura plus de quatre ans avec parfois 40 répliques par jour, certaines de forte intensité.

 

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