Et François Hollande et David Cameron ont souri. A la suite de leur tête à tête de quinze minutes puis de leur déjeuner de travail d'une heure et demi mardi, les deux meilleurs ennemis du monde ont semblé sereins, rassurés, peut-être même surpris de la teneur et du ton de leurs discussions. « Cette rencontre n'a pas été une épreuve, ce fut un plaisir », a assuré d'emblée le président français. Même signaux chez son hôte le Premier ministre britannique, pour qui, même « s'il y aura toujours des domaines sur lesquels nous ne serons pas d'accord, nous nous sommes trouvés aujourd'hui beaucoup de points communs. »
La réalité économique
Tout avait pourtant très mal débuté entre eux. David Cameron avait tout d'abord refusé de recevoir le candidat Hollande lors de sa visite à Londres le 29 février. Mi-juin, le chef du gouvernement britannique avait ensuite offert de dérouler « le tapis rouge » pour accueillir les entreprises françaises au Royaume-Uni.
Qu'est-ce qui a bien pu rapprocher deux hommes que tout semble opposer, d'un côté le "posh" ultra-libéral sans vergogne, de l'autre le flegmatique besogneux socialiste ? La réalité économique tout d'abord, en ces temps compliqués pour les deux pays. « Nous économies sont entrelacées », a rappelé David Cameron. « Les entreprises françaises emploient 180.000 personnes au Royaume-Uni et nous exportons plus en France qu'en Chine, en Inde, au Japon et en Turquie cumulés. » Les deux pays poursuivent également une intense coopération dans les domaines militaire et énergétique et envisagent de l'élargir au domaine spatial. Et la France réalise avec le Royaume-Uni « son plus gros excédent commercial bilatéral, 6 milliards d'euros », selon le président français.
"Concevoir une Europe à plusieurs vitesses"
Plus encore, le langage consensuel de François Hollande semble faire effet de l'autre côté de la Manche, surtout lorsqu'il traite d'un sujet aussi sensible que l'Europe. « Nous ne sommes pas dans la même situation : la Grande-Bretagne n'a pas l'intention de rejoindre la zone euro, la France veut plus d'intégration et de solidarité dans la zone euro mais nous pouvons comprendre nos positions respectives. La Grande-Bretagne n'entend pas freiner la zone euro et nous, on ne pas obliger qui que ce soit à nous rejoindre. Donc nous devons concevoir une Europe à plusieurs vitesses, dans le respect de tous les pays. C'est le moyen de construire une relation de confiance et une relation solide. » Une tonalité à mille lieux des propos agressifs et tranchés de son prédécesseur Nicolas Sarkozy, qui considérait le Royaume-Uni comme un pays situé à la frontière de l'Europe.