Le commissaire et les corporations

Michel Barnier présentait mercredi un second train de mesure pour améliorer « l'écosystème » des entreprises européennes... mais les intérêts en place résistent.
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La protection des forteresses corporatistes et administratives a un coût. Bruxelles l?évalue à 2 à 3% de PIB par an, ces mêmes petits points de croissance que le prédécesseur de François Hollande disait vouloir aller chercher avec les dents. Michel Barnier, s?il juge « qu?on n?a pas le droit » de ne pas tout faire pour les libérer, utilise pour cela un autre outil, potentiellement aussi contendant que des incisives : la réglementation européenne. Le commissaire européen au marché intérieur a présenté mercredi un nouveau train de mesures destinées à faciliter la circulation mais aussi la qualité des biens et des services dans le grand marché européen. Le chantier lancé à la fin des années 1980 par Jacques Delors est loin d?être terminé. 

Quelques aberrations au sein de l'UE

Exemple stupéfiant : décharger, dans le port de Marseille, les conteneurs d?un tanker exige autant de formalités s?il arrive de Rotterdam que s?il vient de Shangaï. Une situation qui alimente la rente tirée par les autorités portuaires et les administrations nationales des activités de dédouanement.

Autre aberration : la mosaïque des espaces aériens qui donnent aux routes des avions de ligne des allures de lignes brisées, faute de coordination entre contrôleurs aériens nationaux. L?abaissement des frontières aériennes, un chantier lancé en?. 1999, avance mais s?avère beaucoup plus difficile que celui des frontières terrestres. En attendant, la fragmentation qui fait consommer aux compagnies des tonnes de carburant supplémentaires et leur fait cracher autant de CO2 et allonge les trajets des passagers persiste. Le statut des contrôleurs aériens reste, lui, intouché, et les habitudes des armées de l?air nationales aussi. Tant pis pour les autres.

Un troisième exemple : l?accès aux comptes bancaires. La Commission estime entre 38 et 65 millions le nombre d?Européens dépourvus de compte bancaire de base, autant dire incapable de s?insérer dans les circuits économiques. L?industrie bancaire a réussi à repousser d?année en année toute initiative visant à créer un droit au service bancaire de base, au motif qu?elle allait s?auto-organiser ou que c?était là une question purement nationale. Elle a gagné pas mal d?années de tranquillité.

Enlisement des projets

La Commission européenne compte ouvrir ces trois chantiers législatifs, et pas mal d?autres, dans les mois à venir. Mais la route s?annonce longue. Un premier paquet de mesures visant à « consolider le plancher » du marché européen, comme le dit Michel Barnier, a été adopté au cours du deuxième trimestre 2011. Sur douze mesures, une seule a été adoptée et la plus emblématique, le fameux « brevet communautaire », un projet lancé en? 2000, reste enlisé alors qu?il permettrait de diviser par dix les coûts de protection des droits notamment des PME. Mais évidemment, la rente des conseils en propriété industrielle risque de s?en ressentir... Bon courage, Monsieur Barnier !


 

Commentaires 3
à écrit le 04/10/2012 à 0:44
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Il ne faudrait pas renverser les rôles ! L'UE est une source de réglementations sans équivalent. C'est le temple du corporatisme. Le lobbying est la pierre angulaire de tout le processus législatif et réglementaire européen avec une conséquence : pro...

le 04/10/2012 à 7:27
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La réalité n'a plus d'importance. Ces gens se sont accaparés le pouvoir et les médias (directement ou indirectement). La raison n'a plus cour, la vérité non plus. Reste la manipulation et la désinformation permanente. On connait la suite, en tout cas...

à écrit le 03/10/2012 à 21:13
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De qui se moquent ces gens à nous raconter des salades pareilles? Bruxelles aura été de manière constante le promoteur assidu de réglementation (jamais évaluées pour leur efficacité) qui ont créé (et continuent de le faire) de véritables barrières d'...

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