Crise de nerf à l'européenne entre les cantons suisses

La péréquation régionale est très contestée cette année. Les cantons "payeurs" veulent payer moins pour les autres, alors que se profile un choc fiscal lié à la pression de l'UE.
Davos, canton des Grisons. Copyright Reuters

On a peine à imaginer une telle scène dans la zone euro. Dimanche, dans le journal populaire hebdomadaire Sonntagsblick (www.sonntagsblick.ch) le conseiller national (député) du canton de Berne, Rudolf Joder, du parti populiste de l'UDC, a réclamé moins de transferts financiers des cantons « riches » vers son canton. « L'argent de la péréquation ne résout pas les problèmes de Berne », a-t-il affirmé avant d'annoncer le lancement d'une initiative en vue d'une votation (un référendum). Son ambition : fixer un niveau maximal de pression fiscale dans la constitution cantonale afin que le gouvernement bernois ne puisse plus bénéficier autant d'une péréquation qui, selon l'article 135 de la constitution fédérale doit « maintenir la compétitivité fiscale à l'échelle nationale et internationale. »


Une péréquation complexe


Berne est le canton le plus peuplé de Suisse, mais c'est loin d'être le plus riche. Selon les données des Statistiques fédérales, qui datent de 2005 (les données régionales ont cessé d'être publiées après cette date), le canton de Berne a un revenu par habitant inférieur de 16 % à la moyenne fédérale. A l'inverse, des cantons comme Zoug, Zurich ou Bâle-Ville affichent des revenus par habitants supérieurs de 27, 16 et 114 % à la moyenne nationale. Berne est donc logiquement le premier bénéficiaire de la péréquation avec 1,2 milliards de francs suisses transférés des neuf cantons « payeurs » vers ses caisses l'an prochain. On retrouvera ici (en allemand) le détail du calcul de cette péréquation.


La révolte de Zoug


Cette annonce provocatrice de Rudolf Joder réjouit profondément les cantons « payeurs » alors que la péréquation n'a jamais été aussi contestée dans la confédération. Le canton de Zoug, devenu le symbole des cantons qui, grâce à des taux d'imposition très bas, ont pu attirer le siège de nombreuses multinationales, est un des principaux payeurs. En 2013, il devra verser au titre de la péréquation 2499 francs suisses par habitant, soit quatre fois plus que Bâle-Ville ou Genève. Inacceptable pour le parti libéral de Zoug, qui a lancé une pétition pour limiter à 2000 francs par habitant le montant maximal de la contribution des cantons. Une pétition qui, selon le Tages-Anzeiger de Zurich aurait déjà reçu 4.000 signatures, ce qui est remarquable dans un canton de 26.000 habitants. Et le leader libéral zougois, Jürg Strub, de pester avec des accents pas inconnus aux oreilles habitués à la crise de la zone euro : « avec notre argent, les autres cantons ne font pas leurs devoirs, Lucerne fait du dumping fiscal, Berne et le Valais paient les retraites anticipées de leurs fonctionnaires. »


Difficile arbitrage fiscal sous la pression de l'UE


En réalité, si la péréquation de 2013 est si délicate et pose tant de problèmes dans un pays où, à la différence de l'Allemagne, elle est souvent bien acceptée, c'est qu'une autre négociation, parallèle, rend tout le monde nerveux en Suisse. Depuis le 21 septembre a débuté des négociations entre la Confédération et les cantons pour satisfaire l'exigence de Bruxelles de supprimer le régime fiscal préférentiel des multinationales. Ce régime permet aux cantons d'appliquer des taux d'imposition faibles pour les sociétés étrangères. A Genève, il est de 11 % contre 24 % pour les sociétés locales. L'UE n'en veut plus, mais comment faire ?


La solution la plus évidente, unifier les taux d'imposition, conduirait à des manques à gagner considérables pour les cantons de Vaud, Genève, Zurich et Bâle-Ville. Selon la Neue Zürcher Zeitung, le mouvement pourrait coûter un milliard de francs à Genève et 400 millions à Zurich. Ce serait un véritable choc fiscal pour les cantons « payeurs » qui pourraient réclamer des compensations sur la péréquation fédérale, ce qui fait trembler les 16 cantons qui reçoivent de l'argent de leurs congénères. Mais qui justifie sans doute l'appel à la rigueur de Rudolf Joder.

Commentaires 29
à écrit le 10/11/2012 à 15:58
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Les commentaires "Suisse = Belgique" montrent à quel point leurs auteurs n'y connaissent rien et plus généralement mettent en évidence le plus grand défaut des Français: "Parler pour ne rien dire, parler pour ne rien faire". La Belgique est un pays ...

à écrit le 10/11/2012 à 10:18
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La France (et indirectement les français) a un problème fondamental: elle n'accepte pas que ses voisins fassent mieux qu'elle. La Suisse a ses avantages et ses inconvénients, mais elle fonctionne beaucoup mieux que la plupart des pays européens. Elle...

à écrit le 16/10/2012 à 14:00
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Normal que berne soit à la traine, elle est en berne !!!

à écrit le 16/10/2012 à 13:52
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Le problème de la Suisse en Europe, c'est l'Europe ! Laquelle (magnanimité ? condescendance ? aveuglement ?...) accorde à la C.H. des avantages exorbitants sans demander aucune contrepartie ! La Suisse ne veut pas être européenne ? Très bien: visa (y...

le 16/10/2012 à 17:03
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La Suisse a déjà, directement et indirectement, donné beaucoup à la zone Euro durant la crise. Bien plus que la Grande Bretagne par exemple. L'Europe s'y retrouve.

le 10/11/2012 à 15:43
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1) La Suisse a offert des milliards à l'UE pour mettre à niveau les pays de l'Est entrant dans l'UE (Pologne, Roumanie, Hongrie, etc.) 2) La Suisse donne du travail à 360'000 citoyens de l'UE qui passent tous les jours la frontière pour travailler en...

à écrit le 16/10/2012 à 10:57
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À ''comme en Belgique'' La ''richesse des suisses romands'', c'est avant tout celle des multinationales qui profitent de taux d'imposition qu'on ne trouve nulle part ailleurs en Europe, et des ultra-riches qui profitent des forfaits fiscaux. D'abord ...

le 16/10/2012 à 15:22
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Oui pour pauvre avec 3500 frs (2900 euro) par mois c'est un pauvre en Suisse.

le 16/10/2012 à 15:36
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la France compte 15 millions de pauvres sur 65 millions quand bien meme les statistiques en dénombrent offciciellement 8 millions. Avec ce type de propos on se demande pourquoi cette Europe là, celle que vous semblez apprécier, n'a pas encore déclar...

à écrit le 16/10/2012 à 10:49
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On peut les critiquer mais ça fait près de 500 ans que la Suisse n'a pas connue de conflit armé majeur sur ses terres. Le reste de l'Europe aurait dû s'en inspirer bien plus tôt. Et puis la neutralité et la stabilité sont bénéfique du point de vue éc...

à écrit le 16/10/2012 à 10:44
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De toute manière les cantons suisses sont voués à l'éclatement et au rattachement administratif de leurs grands voisins un jour ou l'autre à l'instar de la Belgique. Les différences culturelles sont trop importantes entre les cantons et les avantages...

le 16/10/2012 à 10:57
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je pense pas! La Suisse restera la Suisse!

le 16/10/2012 à 17:06
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Avec des romands qui n'aiment pas des masses la France, des alémaniques qui détestent l'Allemagne, non, aucune chance que la Suisse éclate, malgré les conflits culturels. Comme vous dites, la Suisse est une mini-Europe, l'UE ferait bien de s'en inspi...

le 16/10/2012 à 17:50
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@GERARD27, gégé ! un conseil vu votre méconnaissance de l'histoire européenne et précisément de la Suisse, inscrivez vous à un cours de formattion des aldultes, opttion Histoire, vous y apprendrez peut être que un Suisse, sutout Alémanique, n'a rien...

le 16/10/2012 à 17:54
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Lémanique = qui dépend de l'arc lémanique, autrement dit ROMAND. Alémanique= de a privatif, qui n'est pas du Léman, autrement dit qui n'est pas Romand

à écrit le 16/10/2012 à 10:00
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En géologie, un graben (terme d'origine allemande signifiant « fossé ») est un fossé tectonique d'effondrement. C´est exactement le terme utilisé par les Suisses romans pour exprimer le fossé qui les séparent de la Suisse Alémanique. La Suisse es...

le 16/10/2012 à 10:53
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Oui les Suisses-Allemands l'appellent le "Röstigraben" (la frontière des röstis = la zône qui sépare les francophones des germanophones). Toutefois, bien que très différents et n'ayant pas la même notion de "Nation" que nous, les Suisses ne sont aucu...

le 16/10/2012 à 15:25
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ventreachoux La Suisse n'est pas une création artificielle, relit l?histoire avant d'écrire des ânerie pareille.

le 16/10/2012 à 19:23
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@Ventreachoux: la Suisse est un mariage de raison qui a bien tourné. Un ménage très prospère, bien organisé, satisfait de son indépendance, qui observe d'un oeil méfiant les grands mouvements chaotiques qui animent périodiquement les peuples européen...

à écrit le 16/10/2012 à 9:05
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ça commence comme ça et bientôt des siècles d'unité helvétique vont voler en éclat face aux querelles économiques et linguistiques... Pas de problème la France accueillera à bras ouverts les réfugiés suisses romans et leur argent

le 16/10/2012 à 10:55
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Il semblerait que ce soit plutôt la Suisse et la Belgique qui accueille les français ces temps-ci... La tension entre romand et allemands n'a rien à voir avec la tension qui existe en Belgique, ni dans ses origines, ni dans son intensité. La pressi...

le 16/10/2012 à 10:57
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Les politiques européens feront tout pour garder un havre de stabilité au sein de l'Europe pour y planquer fortunes héritées et argent non déclaré. Le temps oü la Suisse et son bon-vivre, sa stabilité politique, économique sera mis à mal n'est pas à ...

le 16/10/2012 à 10:58
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Il semblerait que ce soit plutôt la Suisse et la Belgique qui accueille les français ces temps-ci... La tension entre romand et allemands n'a rien à voir avec la tension qui existe en Belgique, ni dans ses origines, ni dans son intensité. La pressi...

le 16/10/2012 à 11:44
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Une commission spéciale, excellente idée! Avec un rapporteur, trois sous-rapporteurs, un gros livre blanc sur le budget (francais, pas suisse, eux ils sont à l'équilibre depuis 10ans...), pour pointer du doigt les dysfonctionnements et gabegies. Et l...

à écrit le 16/10/2012 à 8:34
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L'article est intéressant, mais la péréquation financière n'a rien à voir avec les pressions de Bruxelles, les cantons riches en ont marre de payer pour les pauvres qui vivent à crédit, c'est tout, il faut adapter ses moyens aux rentrées fiscales. E...

le 16/10/2012 à 9:10
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Les cantons alémaniques sont champions de la concurrence fiscale déloyale (Zoug, Lucerne) ou ont fait leurs beurre avec des banques qui ont couté des dizaines de milliards au contribuable (CS et UBS à Zurich), bel exemple... Les alémaniques ont la fâ...

le 16/10/2012 à 9:12
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Mais Genève est entrée dans la Confédération en 1512, je crois. Et les Vaudois étaient "sujets bernois" jusqu'en 1799 et ils n'avaient alors aucun droit...

le 16/10/2012 à 10:13
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Genève est entré dans la confédération en 1815. Cette confédération n'existe plus, il s'agit d'un état fédéral

le 16/10/2012 à 11:15
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Oui si l'on considère que l'alliance étroite avec les cantons au XVIème siècle n'était pas une adhésion de fait à la confédération. mais vous avez raison la confédération a cessé d'être en 1848.

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