La Grèce va mieux...mais toujours très mal

Un an après les dernières élections parlementaires, la Grèce redresse ses comptes publics, mais les difficultés restent lourdes et nombreuses : l'économie demeure fragile, la situation politique incertaine et une nouvelle restructuration de la dette apparait inévitable.
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C'était il y a un an jour pour jour. Le 17 juin 2012, les Grecs renouvelaient une deuxième fois en un peu plus d'un mois leur parlement, la Vouli, sous le regard inquiet de leurs partenaires européens. Le 6 mai, une première élection avait sanctionné la très forte chute des deux grands partis traditionnels, la Nouvelle démocratie (ND) de centre-droit et le Pasok de centre-gauche. En 2009, ces deux partis avaient totalisé plus de deux tiers des voix. Cette fois, seuls 32 % des électeurs les avaient choisis.

Le soulagement européen

Une nouvelle force s'imposait : Syriza, coalition de divers courants marxistes et écologistes, qui rejetait le protocole d'accord (le fameux mémorandum) signé avec la troïka (FMI, BCE et UE). Le leader de cette alliance, Alexis Tsipras, allait devenir le cauchemar des élites européennes qui agitait, en cas de victoire de Syriza, la menace de sortie de la Grèce de la zone euro.

Finalement, avec 29,66 % des voix, la ND devançait de 170.000 voix Syriza et empochait la prime majoritaire de 50 élus. En s'alliant avec son vieux rival, le Pasok, tombé à 13 % des voix, et à un petit parti de centre-gauche, le Dimar, le chef de la Nouvelle Démocratie, Antonis Samaras, pouvait former un gouvernement dont la principale tâche allait être de remplir les « obligations internationales » du pays, autrement dit appliqué le programme de la Troïka.

Succès budgétaire

Un an après quels sont les résultats de ce gouvernement ? En termes budgétaires, ils sont plutôt encourageants. Le déficit budgétaire grec était fin mai de 3,9 milliards d'euros contre un objectif de 7,1 milliards d'euros. La plupart des économistes estiment possible d'atteindre l'équilibre primaire, hors service de la dette, à la fin de cette année. Autrement dit, le gouvernement grec est parvenu à réaliser ce que beaucoup croyaient impossible.

En 2009, le déficit primaire atteignait encore 10,5 % du PIB. Aucun autre pays périphérique de la zone euro n'a pu réaliser la même performance. Autre signe encourageant : la confiance des milieux d'affaires a retrouvé son niveau de 2008. La réduction du coût du travail de près de 10 % en deux ans a mécaniquement réduit le déséquilibre externe de l'économie grecque. La contraction de la demande intérieure et l'amélioration de la compétitivité des secteurs exportateurs a permis de réduire le déficit courant de 15 % à 2 % du PIB entre 2009 et 2013.

Une croissance qui se fait toujours attendre

Reste bien des incertitudes et des menaces. D'abord, sur la croissance. Dans une Grèce épuisée par l'austérité et dont le PIB s'est contracté d'un quart en quatre ans, la récession se ralentit, mais n'est pas terminée. Au premier trimestre 2013, le PIB était inférieur de 5,3 % à celui du premier trimestre 2012. Certes, fin 2012, la chute du PIB trimestriel sur un an était de 5,7 %, mais la situation reste difficile. Le chômage continue de progresser à 27,4 % de la population active, ce qui pèse sur la demande intérieure et sur les prix.

Les économistes de BNP Paribas, pourtant peu avares de louanges pour le gouvernement Samaras, reconnaissent qu'atteindre l'objectif de contraction du PIB de 4,2 % prévu par la Troïka pour 2013, « nécessitera une amélioration considérable sur le reste de l'année. » De même, le retour à la croissance l'an prochain (la Troïka table sur + 0,5 %) est loin d'être garantie.

L'économie grecque doit même négocier un virage important. Depuis trois mois, les prix baissent en rythme annuel. Comment réagira l'économie à ce recul des prix ? A priori, la baisse des coûts rend cet ajustement tenable pour les entreprises, mais sans doute leurs investissements risquent-ils d'en pâtir. Et puis, il y a le risque que le phénomène s'emballe et que la Grèce entre dans une phase déflationniste.

Des objectifs encore fantaisistes

Sans même aller jusqu'à à ce scénario catastrophe, le gouvernement a toutes les chances d'avoir du mal à remplir les conditions du plan de la troïka. En 2014, en effet, on entre dans la phase la plus « fantaisiste » des projections du programme d'aide à la Grèce qui doit mener le pays à dégager, en 2016, 4,5 % du PIB d'excédent primaire. Dès lors, le pays devrait pouvoir se financer lui-même. Ce scénario semble en réalité improbable.

D'abord, parce que, comme le souligne une étude de HSBC, les revenus fiscaux demeurent « décevants », particulièrement ceux issus de la TVA, en baisse de plus de 10 % sur un an. Sans retour franc à la croissance, il n'y aura pas d'amélioration sur ce front, alors que l'effet lié à la baisse des dépenses pourrait finir par se tasser. Or, on l'a vu, la croissance restera au mieux que très faible en 2014 et elle devrait être inférieure aux prévisions de la troïka en 2013.

Dans sa dernière revue de la situation, le FMI a ainsi estimé que d'ici à 2016, la Grèce devrait avoir besoin de 11,1 milliards d'euros supplémentaire, avec une croissance moyenne de 3 % en 2015 et 2016. « Il est encore plus difficile d'être confiants dans de telles projections », souligne les économistes de HSBC. Sans compter que les revenus des privatisations devraient être moins importants que prévus. Le manque de perspective de la demande intérieure, les difficultés interne à la coalition et celle à réformer les entreprises publiques ont découragé plus d'un candidat. L'échec de la vente de la société gazière et la fermeture brutale de l'audiovisuel public ERT en sont le parfait reflet. Le gouvernement Samaras a d'ores et déjà demandé à réviser ses objectifs de recettes issus des privatisations prévus par le programme de la troïka.

Une nouvelle restructuration de la dette sans doute inévitable

Ceci signifie - et chacun s'y attend désormais - que la Grèce devra encore tailler dans son stock de dettes pour réduire ses besoins de financement et pouvoir, à partir de la fin du programme d'aide au deuxième trimestre 2014, vivre par ses propres moyens. Comme les créanciers publics ou parapublics de la Grèce (BCE, FMI, FESF, MES et pays de la zone euro) ne souhaiteront sans doute pas prendre des pertes, les créanciers privés devront sans doute passer sous les fourches caudines d'une troisième restructuration de leurs créances.

Le stock de dette détenu par ces créanciers s'élève à 63,7 milliards d'euros. Dans le cas où aucun besoin supplémentaire de financement n'apparaîtrait d'ici là, ils pourraient devoir encore renoncer à 17 % de leur capital. Les créanciers publics pourraient cependant alléger la facture en acceptant des pertes sur les intérêts de leurs prêts, comme en 2012.

Une situation politique difficile

La situation du gouvernement Samaras demeure donc délicate. Une nouvelle restructuration sera un tournant encore difficile à gérer. La voie est encore étroite entre le retour à la croissance et le besoin de maintenir le rythme de la consolidation budgétaire. Sans compter que la situation politique demeure très incertaine. L'affaire ERT a montré que la coalition n'était guère solide. Son principal ciment est la peur de Syriza et du mouvement néo-nazi Aube Dorée, donnée dans les derniers sondages à 11,5 %.

Un an après, la Nouvelle Démocratie est à son niveau de juin 2012 à 29,5 % dans les sondages, mais le Pasok et la Dimar ont perdu respectivement six et deux points. Les deux partenaires d'Antonis Samaras vont devoir montrer qu'ils sont capables d'infléchir la politique du premier ministre. Ce sera une difficulté de plus pour le chef du gouvernement grec.
 

Commentaires 21
à écrit le 24/06/2013 à 19:37
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COMME baucoup de pays la crece doit faire le menage anticoruption pour s en sortir et elle s en sortira laissons lui du temp???

à écrit le 18/06/2013 à 17:03
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La Gréce étant en faillite on continue à lui refiler des ronds quelle ne rembourseras jamais,on continue comme avant,trop fort la troika.un degré d'incompétence à ce niveau là,c'est du jamais vu dans les annales économiques.Le pays était mort économi...

à écrit le 18/06/2013 à 13:25
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Amusant, mais surtout consternant, de lire certains com, dont celui d'un(e) Mimi qui semble être le premier à éxiger tous les sacrifices de certains à condition - bien sûr ! -vque l'on ne touche pas à ses pitoyables petits avantages mesquins. Bah ! M...

le 18/06/2013 à 14:01
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Le nucléaire et l'âge des cavernes... je me suis arrêté là

à écrit le 18/06/2013 à 9:44
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Tout ça est faux, notre président normal a dit la semaine dernière que la crise européenne était derrière nous..! et toc...!

à écrit le 18/06/2013 à 8:31
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La Grèce et sa monnaie nationale le Troc avec elle plus de rentrée fiscale. Bravo la TROÏKA bras armé de nos gouvernants pour avoir détruit un continent.

à écrit le 17/06/2013 à 19:34
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Excellente enquête d'investigation. En 2008 éclate la crise des «subprimes», qualifiée de plus grave depuis la Grande Dépression de 1929. Cinq ans après, la crise demeure et la rigueur s'installe partout en Europe. Au-delà des lois et des mécanisme...

à écrit le 17/06/2013 à 19:29
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Non, la Grèce ne va pas mieux si on considère, outre l'aspect économique qui est très loin des prévisions toujours très optimistes des "experts", l'aspect social. L'humain est toujours totalement absent des bilans économiques dressés les uns derrière...

le 17/06/2013 à 23:03
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Sortir ou pas de l'euro ne change pas grand chose quand on fait le bilan "global" de toutes les conséquences de ces 2 choix. La réalité est bien décrite au moins en partie dans l'article. C'est comme dans beaucoup de pays de mauvaises habitudes prise...

le 18/06/2013 à 4:45
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@ Economiste c vrai il ne reste que des mauvaises solutions, et la moins pire est que l allemagne sorte et laisse l euro vivre sa vie.

le 18/06/2013 à 4:45
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@ Economiste c vrai il ne reste que des mauvaises solutions, et la moins pire est que l allemagne sorte et laisse l euro vivre sa vie.

à écrit le 17/06/2013 à 19:11
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Non, la Grèce ne va pas mieux si on considère, outre l'aspect économique qui est très loin des prévisions toujours très optimistes des "experts", l'aspect social. L'humain est toujours totalement absent des bilans économiques dressés les uns derrière...

le 17/06/2013 à 19:42
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@ TC il n'y a plus de place pour l'Humain de nos jours, la Grèce pays de la Démocratie est vraiment mise à mal , c'est la désespérance, c'est scandaleux !! on devrait tous, sortir de cette pieuvre machiavélique!

le 18/06/2013 à 1:52
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C'est çà...c'est çà... Et pendant ce temps là, les shadocks pompaient pompaient... On fait son lit comme on se couche , très très vieux proverbe, aussi vieux que les grecs menteurs et truqueurs, si si ça aussi ça existe (timéo danaos & dona ferentes)...

le 18/06/2013 à 8:08
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Oui, le prochain tour c est pour la Gaule, comme vous dites! On verra si vous tiendrez le meme discours quand votre salaire sera ampute de 20 a 40%

le 18/06/2013 à 8:52
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encore un rigolo (mimi !) ou une rigolote , qui attend d'avoir le nez dans la M..de lui même pour avoir un peu de compassion pour son prochain...Quand le malheur atteint les autres, on s'en fout! mais quand ça nous arrive, là, ce n'est pas le même ja...

à écrit le 17/06/2013 à 18:51
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la grece finira tot ou tard par sortir de la zone euro. La grece ne peut pas survivre avec un euro beaucoupo trop fort pour elle. Les dirigeant europeistes n'ont pas fini de payer leur erreur de depart. Il aurait fallu faire sortir la grece apres avo...

le 17/06/2013 à 19:13
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C'est tout à fait ça, ils préfèrent sacrifier des peuples entiers plutôt que de renoncer à cette construction destructrice. C'est une idéologie très dangereuse et un crime impardonnable, ces gens-là devront être jugés.

le 18/06/2013 à 8:48
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L'Europe pourrie pourra être satisfaite, les grecs, le peuple bien entendu, va mourir en bonne santé, d'ailleurs comme les français grâce à notre cher président hollande et à toute son équipe de bons à rien.

le 18/06/2013 à 8:53
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+ UN !

le 18/06/2013 à 9:14
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OK avec vous ! + UN !

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