Pourquoi diable l'euro reste-t-il toujours aussi fort ?

La BCE mène la politique monétaire la plus accommodante de son histoire, la croissance est faible en zone euro. Mais l'euro reste fort face au dollar. Tentative d'explications.
L'euro s'est apprécié de près de 5 % depuis mai.

Ce jeudi, Mario Draghi a de nouveau repoussé d'un revers de main la question de la politique de change de la BCE.

« Le taux de change est un élément important pour la stabilité des prix, c'est donc une information que nous regardons avec attention, mais ce n'est pas un objectif », a répété le président de l'institution de Francfort.

C'est la doxa habituelle de la BCE.

Inefficacité des actions de la BCE sur le cours de l'euro

La réalité est cependant un peu plus cruelle pour Mario Draghi. Depuis le mois de mai dernier, il a lancé un nouveau cycle d'assouplissement de sa politique monétaire. Sortant de son « artillerie » de nombreuses armes qui, jadis, auraient été considérées comme « de dernier recours » : deux baisses des taux jusqu'à 0,25 %, un ancrage de sa politique monétaire à moyen terme, une évocation plus ou moins ouverte d'un taux de dépôt négatif.

L'euro continue de grimper

L'ambition est de stopper la désinflation. Or, pour faire accélérer à nouveau les prix, le plus sûr moyen demeure de peser sur le taux de change. Nul doute que la BCE comptait sur ce phénomène lorsqu'elle a pris ces décisions. Or, l'euro s'est encore renforcé depuis le mois de mai dernier où il s'échangeait contre 1,30 dollar environ. Aujourd'hui, il s'échange contre 1,36 dollar environ, soit une hausse de 4,7 %. Pourquoi donc la BCE, qui mène la politique la plus accommodante de son histoire, ne parvient-elle pas à peser sur le cours de l'euro ?

L'euro sauvé devient attractif

Une des explications avancées, par exemple par l'hebdomadaire britannique The Economist, est la confiance retrouvée dans l'euro. Après le fameux « whatever it takes » de Mario Draghi en juillet 2012 où ce dernier assurait qu'il ferait tout pour sauver l'euro, les investisseurs auraient rapatrié leurs avoirs mis à l'abri en dollars dans la monnaie unique.

L'explication est juste, puisque l'on voit un vrai redressement de l'euro entre juillet et septembre de plus de 10 cents, soit près de 10 %. Cette explication peut certes être encore juste, mais elle n'est sans doute que marginale, car l'essentiel des retours a sans doute déjà eu lieu.

Une politique monétaire pas assez accommodante

Il existe une autre explication : celui de la politique monétaire de la BCE qui demeure plus restrictive que celle de la Fed. La « production » de dollars est beaucoup plus intense outre-Atlantique qu'en zone euro. Chaque mois, la Fed rachète 85 milliards de dollars d'actifs. Rien de tel encore en Europe où, au contraire, le bilan de la BCE se réduit chaque semaine. Autrement dit, l'euro est plus « rare » que le dollar, son prix est donc plus élevé.

De plus, les taux réels de la zone euro demeurent plus attractifs que ceux des Etats-Unis. La Fed offre des taux nuls avec une inflation de 1 % en novembre. Soit un taux réel de -1 %. En zone euro, le taux de refinancement est de 0,25 % pour une inflation de 0,9 %, soit des taux réels de -0,65 %. Les investisseurs adeptes du « carry trade » peuvent ainsi emprunter en dollar pour revendre en euros et faire un léger bénéfice. Mais cet « avantage » de l'euro ne cesse de se réduire. Pourquoi alors l'euro continue-t-il à monter ?

L'austérité favorise l'euro fort

La réponse est simple : c'est l'austérité. La stratégie de dévaluation interne menée par la zone euro vise précisément à maintenir le cours de la monnaie tout en améliorant la compétitivité externe de la zone. Autrement, dit, il met en place un modèle économique fondé sur le développement des exportations et sur la réduction des importations. Donc sur l'amélioration du solde extérieur. Depuis l'an dernier, la balance commerciale de la zone euro est passée en excédent. Logiquement, cela alimente la demande d'euro et réduit la demande de dollars.

Une inflation toujours faible

Sans compter que les dévaluations internes conduisent à une pression sur les coûts et à un ralentissement de la croissance de la masse monétaire (en raison notamment du « credit crunch » causé par la récession) qui entraîne une désinflation. Or, le ralentissement de l'inflation favorise la valeur intrinsèque d'une monnaie.

C'est la fameuse remarque de Mario Draghi : « with low inflation, you can buy more stuff » (« avec une inflation basse, vous pouvez acheter plus de choses »). Autrement dit, le pouvoir d'achat d'un euro augmente avec la baisse de l'inflation. Les investisseurs étrangers ont donc toutes les raisons d'investir en euros. Et comme, depuis le mois de juin, l'inflation est plus faible en zone euro qu'aux Etats-Unis et que dans certains pays de la zone euro, les plus touchés par l'austérité, la déflation commence à frapper, l'attractivité de la monnaie unique est de plus en plus forte par rapport au dollar.

Tant que la stratégie de dévaluation interne sera en œuvre en zone euro, la tâche de la BCE sera très complexe. Pour faire baisser la valeur de la monnaie unique, elle devra utiliser des armes massives, comme celles de la Banque d'Angleterre ou de la Fed. De simples baisses des taux ne suffiront pas.

Commentaires 43
à écrit le 12/12/2013 à 23:29
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Tout d'abord bravo à M. Romaric Godin pour tous ses articles, qui sont d'excellente facture. Je me permettrais néanmoins de souligner que le credit crunch, qui est le thème central du présent article, fut, dans le cas qui nous occupe, le résultat ...

à écrit le 07/12/2013 à 12:09
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La réponse est dans la question du titre : diable.

à écrit le 07/12/2013 à 9:31
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cet article est rempli de non sens et d'erreurs : 1/ il n'y a pas d'austérité, celle ci consisterait à arreter de s'endetter et à diminuer les dépenses, or il n'en est rien! 2/ l'euro fort diminue le prix de nos importations, et le prix des matiere...

à écrit le 06/12/2013 à 17:33
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L'euro est fort car il est trafiqué comme le dollar, c'est pas compliqué pourquoi chercher midi quatorze heure ?

à écrit le 06/12/2013 à 17:04
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Faute de pouvoir s'accorder sur une fiscalité européenne de type fédéral, l'UE devra se résigner à la concurrence fiscale avec toutes les conséquences désagréables que cela a sur les recettes fiscales des pays les plus goulus et mal gérés comme la Fr...

à écrit le 06/12/2013 à 17:02
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Faute de pouvoir s'accorder sur une fiscalité européenne de type fédéral, l'UE devra se résigner à la concurrence fiscale avec toutes les conséquences désagréables que cela a sur les recettes fiscales des pays les plus goulus et mal gérés comme la Fr...

à écrit le 06/12/2013 à 16:17
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"Autrement, dit, il met en place un modèle économique fondé sur le développement des exportations et sur la réduction des importations" Je doute fort que les importations soit ralenties par un euro fort.

à écrit le 06/12/2013 à 15:47
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Diable! Alors l'austérité favoriserait l'euro fort ? Ne sachant pas de quoi il s’agit lorsque cette allusion "d’austérité" est formulée, essayons de voir quelques corrélations claires et indéniables. Je suppose qu’il y a de l’austérité en France ...

à écrit le 06/12/2013 à 14:29
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Moi je pense que c'est l'Euro qui est entrain de tuer l'Europe des Nations et c'est peut-être un bien enfin de compte . Notre pays ne s'est jamais senti aussi fébrile quand la monnaie lui échappe et n'est plus un outil pour ses exportations .

à écrit le 06/12/2013 à 13:36
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Pourquoi l'euro est aussi fort..Quelle question. Derriere l'euro se cache le DM allemand et l'economie ronflante de ce pays n'y est pas pour rien.La rigueur est benefique pour les pays disciplines et efficients.

à écrit le 06/12/2013 à 11:17
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parce que cela arrange les ricains et aussi les financiers ! quant à l'allemagne elle voit dans l'euro fort son vieux deutchmark conforté - les intérets des ricains et allemands sont ainsi préservés....l' Europe c'est avant tout l'allemagne et merkel...

à écrit le 06/12/2013 à 10:57
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l'article oublie 2 choses importantes: 1)l'UE n'est qu'une zone de libre échange, pas une Nation 2)l'Euro est un Euro-Deutschemark, reflet de la seule puissance responsable de l'excédent commercial de l'UE. Une zone de libre échange avec monnaie u...

à écrit le 06/12/2013 à 10:28
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Balance commerciale positive et différentiels des taux d'intérêts pas susceptibles de baisser . Où est la surprise ???

le 06/12/2013 à 14:09
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Merci, bien sur vous avez raison. Si la balance commerciale est positive cela correspond sur le marché des changes par un achat net d'euro de la part des entreprises européennes exportatrices (qui vendent du $ contre l'euro). C'est pas le seul facte...

à écrit le 06/12/2013 à 10:26
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Un article fort bien vu. Pour étendre sa vision, ajoutons quelques réflexisons : 1) Les USA, par injection de monnaie créée chaque jour, effectue une dévaluation du dollar "de fait"; ce n'est pas le cas de l'euro, malheureusement. Concurrence déloya...

à écrit le 06/12/2013 à 10:02
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L interrogation initiale de cet article ne peut avoir qu une seule réponse . les anglais et les allemands sont entrain de gagner la guerre économique qu ils nous font depuis 20 ans. Nos politiciens alliés au patronat ultra libéral ont cru pouvoir se ...

à écrit le 06/12/2013 à 9:57
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L'euro est fort, parce que malgré ses défauts, il est le reflet de la 1ère economie mondiale (l'europe) dont l'economie est moins instable à long terme que le reste du monde (c'est relatif) et dont les structures publiques comme privées ainsi que l''...

le 06/12/2013 à 16:22
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logique " il est le reflet de la 1ère economie mondiale (l’Europe) " le rêve est encore permit en Frankreich.

à écrit le 06/12/2013 à 9:55
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Formidable comme dirait l'autre c'est la crise, destruction massive d'emplois des millions de personnes dans l'Union européenne en dessous du seuil de pauvreté. En Grèce et ailleurs le chauffage est une option que beaucoup ne peuvent plus s'offrir et...

le 06/12/2013 à 12:37
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Sur le QI, vous avez raison.

le 06/12/2013 à 13:56
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@jerome .compte tenu de vôtre propos ,on se pose des questions sur le vôtre .

à écrit le 06/12/2013 à 9:45
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Si la zone euro est globalement exportatrice, il est naturel que l'euro s’apprécie. Il est impossible d'aller contre ça, et surtout inutile de se lamenter ! Il faut juste prendre cette information comme une donnée de travail...

à écrit le 06/12/2013 à 3:28
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et vous pensez que M Weidmann de la Deutsche Bundesbank va laisser faire le nécessaire? Parce-que, soyons francs, c'est bien l'Allemagne qui domine!

à écrit le 05/12/2013 à 23:25
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c'est parce que ça arrange les financiers et les ricains !! pas du tout les exportateurs français et notre économie réelle ! quelques voyageurs peuvent être tentés par les pays à dollars , c'est tout .....

à écrit le 05/12/2013 à 22:28
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Reprenons le francs , c'est un retour à la maison année 2000 où la croissance se faisait seule comme une grande . 13 ans de descente aux enfers, et plus jamais nous abandonnerons les valeurs de nos ancêtres .

le 06/12/2013 à 12:18
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Passons au solidus, monnaie d'avant Charlemagne ou au coquillage, encore plus ancienne monnaie, vrai valeur de nos ancêtre !!!

le 07/12/2013 à 15:17
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@monnaie/ancienne monnaie Pourquoi pas réinstaller le troc?

à écrit le 05/12/2013 à 22:06
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si l euro est aussi fort c est parcque les américains le veulent bien et le jour ou ils cesseront d imprimer des dollars par milliards l euro ne vaudra plus rien CQFD en fait l avenir de l euro depend des seuls américains pour le moment ils cherchent...

à écrit le 05/12/2013 à 21:15
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ou pourquoi une monnaie si forte pour des pays si pauvres des peuples si pauvres puisque plus de 30% des habitants de la zone euro vivent sous le seuil de pauvreté cette monnaie ne tiendra pas c est sur les peuples en ont assez puisqu elle ne profite...

le 05/12/2013 à 22:06
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C'est pas en pleurnichant et en jalousant les autres que tu vas modifier ton sort :-)

le 06/12/2013 à 0:29
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Ameliorer la ponctuation pourrait t'aider peut-être ...

le 06/12/2013 à 8:21
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@CAD quelqu'un qui fait des fautes est peut-être étranger et parle plusieurs langues. Ca n’empêche que le contenu peut rester intéressant. Dans un article d'accord dans des commentaires ont à beaucoup à gagner à échanger.

le 06/12/2013 à 9:36
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Monsieur JUSTE, vous pouvez dire ce qui vous chante, mais dites-le en respectant la langue française qui s'écrit avec des majuscules, des apostrophes et une ponctuation en tant que de besoin.

à écrit le 05/12/2013 à 20:38
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L'euro est fort parce que l'économie américaine est très mal. les deux monnaies vont s'écrouler en même temps par rapport au yuan qui deviendra la monnaie des échanges internationaux, elle sera indexée sur l'or.

le 05/12/2013 à 22:10
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@pragmatique: et comme l'or est libellée en dollars US, on reviendra à la case départ :-) qu'est-ce qu'on lit pas comme conneries :-)

le 06/12/2013 à 6:55
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A commencer par les tiennes, mon patoche ...

le 06/12/2013 à 15:17
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@mon patoche: peut-être, mais tu peux constater que tes grands discours sur l'or ne portent pas leurs fruits et qu'on attend toujours l'envolée que tu nous prédisais quand tu faisais ta pub pour les marchands d'or :-) au cas où tu l'aurais ouiblié, j...

à écrit le 05/12/2013 à 20:30
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J'ai la même façon de voir les choses que Patrick et Mickaël. Bizarrement nos élites y trouvent leur compte alors que nous sommes les dindons de la farce en jouant le jeu des économies Américaines et Chinoises. Si on était pas surs d'être gouvernés p...

à écrit le 05/12/2013 à 19:46
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A mon humble avis, 1) la force de l'euro réside dans la dévaluation voulue et continue du dollar. Les US mettent en pension des dollars à parité et rembourse 1 dollar qui ne vaut plus que quelques cents. Comme nous sommes vassalisés aux US, nos dirig...

à écrit le 05/12/2013 à 19:46
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Si l'euro est fort les importations reviennent moins cher et donc nous importons plus. Les exportations sont trop chères et nous exportons moins ! Votre article dit le contraire ! comprenne qui pourra ??

le 06/12/2013 à 0:34
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L'article dit le contraire parce que votre raisonnement n'en est aucun. Quand nous important une très grande partie de notre energie on a intérêt qu'elle soit bonne marché (donc avec un euro fort, le petrol est moins cher). Etant donné que beaucoup d...

le 06/12/2013 à 9:13
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Sans oublier la baisse des coûts de main d'oeuvre (notamment en Espagne, Italie et Espagne) qui réduit d'autant plus le coût de production comme expliqué dans l'article!

le 06/12/2013 à 9:31
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CAD, votre commentaire ne prend pas en compte la fiscalité et les prélèvements sur le pétrole, et ignore l'impact des pétroles et gaz de schiste. Nous payons cher notre énergie.

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