Comme expliquer l'écart des dépenses publiques Allemagne-France

Par Olivier Passet, Xerfi  |   |  594  mots
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi. / DR
La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, l'écart des dépenses publiques Allemagne-France

Près de 13 points d'écart entre la France et l'Allemagne concernant le poids des dépenses publiques dans le PIB, c'est considérable et à la fois étonnant, puisque l'Allemagne demeure une référence d'Etat providence. Comprendre cet écart promet alors d'être éclairant puisque :

 1/ Même si l'état allemand est moins redistributif que par le passé, les inégalités sont de même ordre de part et d'autre du Rhin.

 2/ Il reste doté d'un système de santé ou d'éducation au moins aussi efficace et socialisé que celui  de la France.

 Alors comment fait-on 13 points de dépenses en moins avec des services rendus si proches ?

Pour appréhender la question il faut distinguer les écarts permanents et les évolutions plus récentes. Car rappelons que sur moyenne période il existe un écart structurel et stable de 5,2 points entre les dépenses françaises et allemandes. En revanche, après 2003, cet écart s'est accru de manière abyssale de près de 7,5 points.

Premier point, l'écart structurel

Il est massivement expliqué par les frais de fonctionnement (les rémunérations, les dépenses de sous-traitance et les intrants). Un écart moyen et stable de 5,8 points depuis 20 ans.  Presque entièrement le fait des rémunérations, 5 points en moyenne sur les 5,8 que j'ai mentionnés. Et lorsque l'on creuse encore on voit que l'écart est concentré dans la santé, l'éducation et la protection sociale.

Alors comment l'Allemagne peut-elle fonctionner avec si peu de moyens?  Paradoxe alors que les taux d'encadrement scolaires et médicaux sont supérieurs. Ceux qui y voient le résultat d'une purge massive de l'emploi dans ces fonctions et d'une incroyable efficacité de ces secteurs se leurrent en partie. L'emploi statutaire a certes diminué depuis 15 ans mais pas le poids des rémunérations. Sa faible baisse est compensée par la hausse de frais de sous-traitance. Non si l'écart est aussi massif, avec la France mais aussi avec la plupart des autres pays, c'est que d'autres circuits participent à l'Etat social et notamment les églises. Le réseau hospitalier des Eglises représente environ 30% de la capacité hospitalière du pays, le personnel employé dans ce domaine dépasse le million. Les organisations confessionnelles participent aussi à la formation, assurent la préparation aux diplômes d'Etat dans les professions de santé par exemple. Bref le système est inimitable pour la France à moins de débudgéter l'emploi public pour le faire porter par les églises. Préconisation que je ne retiendrai pas.

Venons-en maintenant au creusement de plus de 7 points depuis 10 ans

5,2 points viennent de la protection sociale ; dont 3,9 points sont imputables à la réforme des retraites (plus de capitalisation et alignement des droits entre public et privé). Il y a là des sources d'inspiration, mais il faut accepter alors un changement institutionnel profond.
Le reste se répartit entre le financement des risques liés au chômage, au logement  et à l'exclusion.

Et hors dépenses sociales, les sources d'économie sont diffuses... moins de subventions, moins d'aide en capital, reflux des coûts liés à la réunification aidant. Moins de charges relatives d'intérêt aussi.

Si la France désire demeurer dans un système de retraites par répartition, on constate alors qu'en dépit de ses 13 points d'écart, l'Allemagne n'offre pas d'autre solutions miracles que celle de l'addition de petites économies dans tous les domaines.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique