"Affaire Hortefeux" : dissensions à gauche, solidarité à droite

Par latribune.fr  |   |  828  mots
Tout le week-end, la gauche a pilonné le ministre de l'Intérieur, mais avec des divergences, certains n'allant pas jusqu'à réclamer sa démission après sa condamnation en première instance pour injure raciale vis-à-vis de personnes d'origine arabe. A droite, la solidarité a prévalu.

Pierre Moscovici et Julien Dray ont estimé ce dimanche qu'il n'était pas nécessaire de réclamer la démission de Brice Hortefeux, condamné pour injure raciale, prenant le contre-pied de Benoît Hamon. Au nom de "l'exemplarité", le porte-parole du PS avait estimé que le ministre français de l'Intérieur devait quitter le gouvernement après la décision du tribunal correctionnel de Paris, annoncée vendredi. Le premier secrétaire du PS, Martine Aubry, n'a pas fait de commentaire public sur la condamnation de Brice Hortefeux.

Le ministre de l'Intérieur a fait appel des 750 euros d'amende et 2.000 euros de dommages et intérêts pour injure raciale lors d'une conversation en 2009 avec un militant UMP d'origine maghrébine.

Interrogé lors du Grand rendez-vous Europe 1/Le Parisien, Julien Dray a estimé que le débat public nécessitait "plus de sérieux que cette fièvre médiatique qui monte d'un seul coup". "Je ne suis pas un Pavlovien de la démission", a-t-il fait valoir, tout en estimant que le ministre de l'Intérieur avait prononcé une "phrase inacceptable". "Je ne considère pas que Brice Hortefeux est un raciste. C'est un ministre de la république, c'est un républicain", a-t-il ajouté, préférant qu'on juge le ministre de l'Intérieur sur l'échec de sa politique en matière de lutte contre la violence.

"Brice Hortefeux n'a pas sa place dans un gouvernement de la république comme ministre de l'Intérieur dès lors qu'il a prononcé ces paroles racistes", a déclaré de son côté Pierre Moscovici sur Radio J. "Je le disais quand il l'a fait, je le redis aujourd'hui. Je ne suis pas pour autant en train de faire de la gesticulation, de demander sa démission", a ajouté le député du Doubs. "Ce que je sais, c'est qu'en république, c'est Nicolas Sarkozy qui va décider et Nicolas Sarkozy va décider de lui faire confiance".

Pour sa part, l'ancien Premier ministre socialiste Laurent Fabius a estimé dimanche qu'une condamnation définitive du ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux , poserait un problème. "Pour la démission, on va voir quand la décision sera définitive parce qu'il y a un appel", a-t-il observé. Pour autant, "un ministre de l'Intérieur condamné de manière définitive pour injure raciale, cela pose un évident problème".

De son côté, Michel Charasse, ancien sénateur socialiste du Puy-de-Dôme et actuel membre du Conseil constitutionnel, a volé dimanche à la rescousse de Brice Hortefeux en jugeant que le ministre de l'Intérieur, élu auvergnat lui aussi, n'est pas raciste. Ces polémiques, "ce sont des risques du métier, surtout avec la manie d'indiscrétions des journalistes qui, lorsque vous êtes en train de discuter en privé dans un coin, trouvent le moyen de vous coller un micro sous le nez alors que vous dites "Dupont est toujours aussi con, Durand m'a fait chier toute la semaine". Et puis, pan ! Tout cela, c'est enregistré." "Donc il faudrait aussi que les journalistes fassent aussi un petit peu attention. Parce que eux, dans leurs conversations privées, ils doivent bien en balancer des vertes et des pas mûres", a estimé l'ancien ministre de François Mitterrand.

Interrogé sur les demandes de démission exprimées par le Parti socialiste, il a répondu: "quand on est dans l'opposition, on demande tous les quatre matins la démission des ministres puisqu'on ne peut pas prendre leur place autrement qu'en les faisant partir par démission". A la question de savoir si Brice Hortefeux est raciste, il a lancé: "ah non ! Depuis la disparition de Pierre Laval, puisqu'on est dans son ancien canton ici, à ma connaissance, il n'y a pas d'homme politique raciste dans le département du Puy-de-Dôme. Il faut arrêter !".

Solidarité à droite

A droite, le ministre de l'Intérieur, qui était cité à comparaître par le Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples), a notamment reçu le soutien du Premier ministre, François Fillon, après sa condamnation.

La secrétaire d'Etat aux Sports, Rama Yade, a pour sa part déclaré dimanche, sur Radio J, que son collègue Brice Hortefeux ne lui a "jamais fait sentir le moindre racisme". "Brice Hortefeux n'est pas raciste (...) Moi qui suis tellement prompte à me braquer sur ces choses-là, je n'ai pas eu ce sentiment, non", selon elle. "La procédure judiciaire continue. J'ai appris à ne pas commenter une décision judiciaire en cours. Sur un plan politique, Brice Hortefeux a exprimé ses regrets au moment de l'affaire. Ce dont il est important de prendre acte. Et, par ce geste, il a voulu réagir à ceux qui s'étaient sentis blessés (...) A partir du moment où le ministre de l'Intérieur a exprimé ses regrets par la suite, que faire si ce n'est d'en prendre acte ?", a-t-elle commenté.