Fillon devance l'intervention de Sarkozy à la télé ce soir en dévoilant ses priorités

Nicolas Sarkozy détaillera précisément ses intentions ce soir à la télévision. Lui grillant la politesse, François Fillon a annoncé lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale que sa priorité serait la lutte contre les déficits, la réduction de l'endettement et la réduction de la dépense publique. Mais il compte aussi s'atteler à la dépendance et resté mobilisé sur la sécurité.
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Avant même l'intervention télévisée du chef de l'Etat ce mardi soir, le Premier ministre François Fillon a commenté sa reconduction à Matignon devant les députés. "Le choix du président de la République de me renouveler sa confiance, c'est le choix de la continuité et il ne vous a pas échappé qu'à plusieurs reprises et il y a bien longtemps j'avais plaidé pour cette continuité" a-t-il insisté avant d'ajouter : "La priorité absolue de mon gouvernement restera la lutte contre les déficits, la réduction de l'endettement, la réduction de la dépense publique."

Mais tout en respectant ce postulat de principe, le gouvernement devrait être amené à se concentrer sur des sujets susceptibles d'influencer le choix des électeurs dans la dernière ligne droite avant les prochaines élections présidentielles, à commencer par l'emploi, celui des jeunes mais aussi des seniors. Le développement de l'alternance et du tutorat sont déjà étudiés par Xavier Bertrand, le nouveau ministre du Travail. Les solidarités avec la question de la prise en charge de la dépendance ainsi que la sécurité sont aussi élevées au rang des priorités.

François Fillon a d'ailleurs annoncé ce mardi l'ouverture prochaine du chantier de la dépendance des personnes âgées sans toutefois confirmer le calendrier de cette réforme que Nicolas Sarkozy souhaitait voir aboutir en 2011. Le Premier ministre, reconduit dimanche dernier, a dévoilé les priorités de son "gouvernement de combat" lors de la séance de questions au gouvernement de l'Assemblée nationale.

"Nous allons, et ce sera la responsabilité de Mme Roselyne Bachelot, ouvrir ce grand chantier de la dépendance, c'est-à-dire du financement et des moyens d'assurer une fin de vie décente à l'ensemble de nos concitoyens", a-t-il dit. "J'ajoute que, même si ce n'est pas l'objectif principal de cette réflexion sur la dépendance, ce sera l'occasion d'apporter une réponse concrète aux problèmes de financement de nos départements qui rencontrent des difficultés sérieuses."

Selon Le Figaro, Nicolas Sarkozy devait annoncer lors de son intervention télévisée de mardi soir le lancement d'un "vaste débat national" sur la dépendance, information corroborée par le terme "réflexion" employé par François Fillon, en remettant toute décision sur le financement à l'après-présidentielle. L'Elysée s'est refusé à tout commentaire, indiquant que le chef de l'Etat aborderait la question dans son intervention.

PROMESSE DE CAMPAGNE

La création d'un "cinquième risque" pris en charge par la Sécurité sociale est un engagement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, qui déclarait encore l'été dernier qu'il s'attaquerait au problème après la réforme des retraites et qu'il serait "résolu dans l'année 2011". François Fillon indiquait en juin que la réforme serait votée avant la fin de l'année pour être opérationnelle en 2011.

Dans un rapport publié en juin, la député UMP Valérie Rosso-Debord a chiffré à plus de 22 milliards d'euros les dépenses publiques pour la dépendance en 2009, l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) versée à 1,1 million de personnes de plus de 60 ans représentant un quart du total.

Le coût de la dépendance a été chiffré à 1.800 euros par mois en moyenne pour une personne à domicile et 2.300 euros en établissement, à comparer avec des retraites inférieures à 1.000 euros pour plus de la moitié des personnes âgées. Ces dépenses sont appelées à augmenter avec le vieillissement de la population.

L'Etat étant dans l'incapacité de faire face à de telles dépenses qui augmenteront mécaniquement année après année, la député préconisait dans son rapport la baisse du nombre de bénéficiaires de l'APA ou des solutions équivalant à une hausse des prélèvements difficile à envisager en période électorale : la souscription obligatoire d'une assurance dépendance à partir de 50 ans et le relèvement de la CSG des retraités.

FISCALITE ET JUSTICE

Deux autres réformes sont déjà programmées : la fiscalité et la justice. Sur le premier point, ce seront l'avenir de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et du bouclier fiscal qui seront en jeu, dans un contexte d'harmonisation des fiscalités franco-allemandes. Après la réforme de la garde à vue, le second point fera la part belle à la question de l'introduction de jurés populaires dans les tribunaux correctionnels. En septembre dernier, l'UMP a créé un groupe de travail chargé de réfléchir et de faire des propositions sur ce sujet délicat que devra piloter le centriste Michel Mercier.

Ces précisions élyséennes étant apportées, la déclaration de politique générale que fera François Fillon une semaine plus tard, le 24 novembre, réservera-t-elle quelques surprises ? A voir. C'est en comparant ces deux textes que l'on pourra mesurer à quel point l'autonomie de pensée et d'action du nouveau Premier ministre a ou non récemment évolué.

L'intervention de François Fillon, qui se défend d'être un "hyper-Premier ministre", a semblé constituer, sinon une façon de griller la politesse au président, du moins un signe du rééquilibrage du duo exécutif après un début de quinquennat marqué par "l'hyper-présidence". François Fillon a conclu la troisième de ses réponses en rappelant que "le président de la République fixe les orientations et les présente lui-même aux Français".

"C'est un gouvernement de combat contre l'endettement, c'est un gouvernement de combat contre le chômage, c'est un gouvernement de combat contre l'injustice, c'est un gouvernement de combat contre l'insécurité", a-t-il dit aux députés, qui l'ont, à droite, ovationné avant sa prise de parole."Nous devons relancer l'économie. Nous devons réduire les déficits. Nous devons protéger notre modèle social."

DÉFICITS ET CROISSANCE

François Fillon, qui avait fait acte de candidature pour rester à la tête du gouvernement et ne pas être remplacé par Jean-Louis Borloo, a répété qu'il n'était pas question que sa politique prenne un virage, dans quelque sens que ce soit. "Nous avons besoin de stabilité et de continuité pour que ne soient pas ruinés les efforts qui ont été demandés aux Français pendant trois ans, en particulier en raison de la crise économique et sociale, et qui pourraient l'être par un changement soudain de politique", a-t-il dit.

En matière économique, "la priorité absolue" restera la lutte contre les déficits, a-t-il dit. Elle est indispensable pour le renforcement de la croissance "au service de l'emploi", a-t-il ajouté. La France prévoit une croissance de son PIB de 1,5% à 1,6% en 2010, dans la moyenne de la zone euro mais nettement inférieure à la croissance allemande.

Le chômage, total ou partiel, touchait en septembre quatre millions de personnes en France - dont 2,7 millions de chômeurs en catégorie A - et demeure la priorité des Français selon les enquêtes d'opinion.

SÉCURITÉ ET G20

François Fillon a confirmé qu'une réforme fiscale serait soumise au Parlement avant l'été 2011. Cette "réforme d'ensemble de notre fiscalité" ira vers plus de justice et d'efficacité économique, a-t-il dit. La deuxième priorité sera la cohésion sociale, a poursuivi le Premier ministre, évoquant "une réflexion sur la sécurité sociale et son financement", le chantier de la dépendance, piloté par la ministre de la Solidarité Roselyne Bachelot, et un "effort particulier" pour la politique de la ville. La troisième priorité sera la sécurité, qui passera selon lui par davantage d'efficacité judiciaire. "Il est indispensable que les peines prononcées par les tribunaux puissent être effectivement assumées, assurées, et pour cela nous avons besoin de renforcer notre effort en faveur d'une modernisation de la justice", a dit le Premier ministre.

Le chef du gouvernement a enfin rappelé que la France proposerait, durant sa présidence du G20, une réforme du système monétaire et une "réflexion" sur la gouvernance mondiale.

Quant aux centristes, en partie évincés du gouvernement avec les départs de Jean-Louis Borloo et d'Hervé Morin, ils se sont réunis lundi soir pour préparer leur riposte.

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