La sous-traitance devient un passage obligé dans les télécoms

Jusqu'où peut aller la dématérialisation dans l'industrie des télécommunications ? Alcatel, en annonçant mercredi un vaste programme de cessions et de fermetures d'usines (voir article ci-contre), est allé plus loin encore que ses concurrents dans la voie de l'externalisation. D'ici dix-huit mois, l'entreprise ne devrait plus disposer que d'une douzaine d'usines dans le monde alors qu'elle en comptait cent vingt au milieu des années 1990. Pour Serge Tchuruk, le président de l'entreprise, Alcatel a vocation à devenir un "groupe sans usines".Pour spectaculaire qu'il soit, le programme de restructuration d'Alcatel n'en constitue pas moins le dernier épisode en date d'une longue série dans l'industrie des télécommunications. Face à la contraction des débouchés dans la téléphonie mobile ou dans les équipements de réseaux, Ericsson, Marconi ou Philips ont récemment annoncé le transfert d'une partie de leur production à des sous-traitants, imitant ainsi leurs concurrents nord-américains (Motorola, Nortel, Cisco...). Flextronics, Celestica, Solectron, China Electronics Corporations, SCI Systems sont devenus des partenaires indispensables pour les équipementiers télécoms.Pour François Travaillé, analyste chez BNP Paribas, "l'industrie des télécommunications est en train de suivre le chemin emprunté précédemment par l'informatique". Au cours des années 1990, les grands noms du PC ont massivement externalisé leur production afin de rester compétitifs face à des concurrents, notamment asiatiques, dont les coûts de fabrication étaient sensiblement plus réduits. Cette démarche n'est toutefois pas sans risques pour les équipementiers télécoms. "La grande question, c'est de savoir si le développement des produits ne va pas être handicapé par l'absence d'outil productif", s'interroge François Travaillé. Il craint que la fin de l'interaction entre les équipes de recherche fondamentale et les équipes de production se traduise par une moindre créativité. En faisant appel à la sous-traitance, les équipementiers prennent également le risque de faire émerger de nouveaux concurrents sur leurs marchés.Dans ces conditions, l'externalisation pourrait ne pas être la panacée annoncée. Un expert met d'ailleurs en doute l'objectif recherché par Alcatel dans la mise en oeuvre de son plan. "Ce programme de restructurations est lié au problème des contraintes sociales. Le gouvernement devrait se rendre compte que, à force de rigidités, on est en train de tuer l'industrie", estime cet analyste.Serge Tchuruk a promis mercredi matin que la restructuration se ferait sans "drames sociaux". Rien n'empêchera toutefois les sous-traitants, une fois en possession des usines du groupe, d'ajuster leurs capacités de production, voire de les délocaliser. Depuis le début de l'année, Solectron, Flextronics et Celestica ont tous annoncé de vastes programmes de réductions de leurs effectifs, notamment aux Etats-Unis (voir article ci-contre). Un tel scénario ne peut être exclu en France.Jean-Noël Roffiae
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