Les vertus du « Bottom Up »

L'adoption aux forceps, la semaine dernière, d'une directive européenne a minima sur les offres publiques d'achat, après plus de dix ans de débats et d'atermoiements, illustre, une fois de plus, la difficulté d'harmoniser «par le haut » des réglementations et des pratiques aussi hétérogènes que profondément ancrées dans des cultures nationales. In fine, la volonté politique se heurte bien trop souvent aux intérêts nationaux pour finalement s'étioler dans le compromis. Cette approche « top down » des dossiers, pour reprendre une expression bien connue des gérants, a cependant le mérite de fixer le cap sans que s'imposent des contraintes de temps. A la décharge des instances communautaires, l'Europe reste une idée suffisamment neuve dans l'opinion publique pour relever ce défi avec prudence et habilité. Toutefois, la vie des affaires à ses raisons que la raison ignore. Et pour cause, les grandes manœuvres européennes des entreprises ne peuvent souffrir encore longtemps des distorsions nationales. En matière de réglementations, le risque est de faire prospérer en Europe des eldorados financiers. En cela, la mise en œuvre de la fusion des Bourses de Paris, Bruxelles et Amsterdam - qui répond à une logique industrielle - aura quelque peu forcé la main des Etats sur le terrain de la régulation européenne des marchés financiers. La naissance d'une Bourse pan-européenne impose en effet un corps de règles commun aux trois pays, qu'il a bien fallu bâtir en quelques mois via une coopération étroite entre les trois autorités de régulation nationales. Le lancement du chantier Euronext en 1999 a ainsi ouvert tant de questions sans réponse que la Commission européenne a dû accélérer le mouvement. La création du comité des sages, dit « comité Lamfalussy » l'an dernier et la publication de son rapport en octobre 2000 préconisant la création de deux comités européens sur les valeurs mobilières n'auraient sans doute pas eu lieu aussi rapidement sans Euronext. Et les promoteurs d'Euronext ont compris que la force de leur projet résidait en grande partie dans sa dimension réglementaire. Un volet qu'ont, en revanche, complètement occulté les défenseurs de l'axe Londres-Francfort, à leurs dépens. Les vertus de l'approche « Bottom up » s'appliquent également aux grands desseins.
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