A trop attendre...

A trop attendre... on finit par lasser. L'aphorisme ne vise pas quelque godelureau ou quelque mijaurée qu'il faudrait pousser dans les bras l'un de l'autre, tant le risque est plutôt qu'ils s'embrassent trop... Non, l'adage vaut pour la Banque centrale européenne (BCE) dont les atermoiements ont valu à l'euro l'une de ses pires semaines depuis l'automne dernier et le début de son rebond. Pourtant la monnaie unique n'a pas manqué de renfort la semaine dernière. Sur le plan de la conjoncture, les ménages français n'ont jamais été aussi confiants, tandis que la production industrielle allemande reste soutenue. Sur un plan plus structurel, le premier ministre britannique Tony Blair a indiqué qu'il se donnerait deux ans en cas de réélection pour organiser un référendum sur l'entrée de la Grande Bretagne dans l'euro, mettant de facto la monnaie unique au cœur du débat électoral Outre-Manche. Les doutes sur l'Euroland n'en sont pas moins revenus en force. La perspective d'un ralentissement de l'activité en Europe moins marqué qu'aux Etats-Unis avait puissamment contribué à un retournement de sentiment sur l'euro que la BCE et son président Wim Duisenberg - alors abondamment décrié - avaient remarquablement anticipé puis accompagné. Mais la rapidité et la détermination dont a fait preuve la Réserve fédérale américaine sous l'égide de son président Alan Greenspan pour tenter d'éviter une récession et préparer le redémarrage de l'économie américaine ont porté un rude coup à l'attractivité de l'euro. Les investisseurs internationaux préfèrent désormais tabler sur un rebond de l'économie américaine dès le deuxième semestre et doutent de la capacité de l'Euroland, empêtré dans ses lourdeurs structurelles et entravé par une BCE obnubilée par l'inflation, à échapper à la morosité... Du coup, l'euro repart à la baisse, et avec lui les marchés européens, notamment les Bourses qui depuis le début de l'année ne sont toujours pas parvenues à trouver le chemin de la hausse.Alors que nombre de banques centrales ont opté pour la détente de leur politique monétaire, conscientes du risque de ralentissement de l'économie mondiale, la BCE devrait elle aussi desserrer l'étreinte. Elle contribuerait ainsi non seulement à soulager une économie européenne qui sera affectée par le net ralentissement américain, mais aussi à conforter le statut de l'euro aussi bien aux yeux de la communauté financière internationale qu'à ceux de l'opinion publique européenne. Or, à peine un an avant sa substitution définitive aux monnaies nationales - qui interviendra le 17 février 2002 - il en a bien besoin. D'un côté, la polémique engagée la semaine dernière par la Bundesbank sur le budget irlandais considéré comme exagérément expansionniste a renforcé les inquiétudes des investisseurs sur la stabilité de la zone euro et la capacité de ses participants à coexister harmonieusement. De l'autre, la cote de l'euro - tout en restant très basse dans les opinions publiques qui lui étaient le plus hostiles - commence à s'éroder auprès de celles qui lui étaient favorables, notamment en France. Comme si les avantages de la monnaie unique n'était plus si directement perceptibles - pour autant qu'ils l'aient jamais été !Et s'il faut sans doute avoir des principes, le premier d'entre eux doit être de ne pas s'y tenir avec trop de rigueur. En matière monétaire comme en beaucoup d'autres, l'orthodoxie ne saurait en effet être une fin en soi. Peut-être vaut-il mieux un euro et un peu plus d'inflation que moins de 2% d'inflation en rythme annuel... mais pas d'euro.
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