Le déficit public français pourrait dépasser 3% du PIB

Après plusieurs jours de rumeurs, le ministre de l'Economie Francis Mer et celui du Budget Alain Lambert ont présenté ce matin l'audit des finances publiques réalisé à la demande du Premier ministre. Le déficit public devrait être compris dans une fourchette de 41,9 à 44,6 milliards d'euros, soit entre 2,3% et 2,6% du PIB. Au sens du traité de Maastricht, le déficit des finances publiques devrait se situer entre 3 et 3,2% du PIB. Recul des recettes, hausse des dépenses. Le précédent gouvernement tablait sur un déficit de 1,85% du PIB (2,4% au sens de Maastricht). La dégradation est donc de 14 milliards d'euros. Mais en fait, plus personne ne croyait à cette perspective. Les chiffres des comptes publics pour avril montraient en effet à la fois une progression des dépenses, notamment sociales, et un recul des recettes dû à la faiblesse de la croissance. Le rapport des deux magistrats confirme cette évolution. Ainsi, les dépenses de l'Etat devraient "déraper" de 7,4 milliards d'euros en 2002 tandis que les recettes fiscales seront, faible croissance oblige, inférieures de 5,4 milliards d'euros aux prévisions.Selon les auditeurs, le problème central est celui des dépenses sociales. Celles-ci devraient en effet progresser de 6% en 2002 contre 3,8% prévus initialement. L'alourdissement devrait donc atteindre 2,9 milliards d'euros. En tout, le déficit de l'ensemble des organismes sociaux (Sécurité sociale, régimes de retraite complémentaire, Unedic) devrait atteindre 0,1% du PIB, alors qu'un excédent de 600 millions d'euros était prévu jusqu'ici. Or, le pire n'est pas forcément derrière nous puisque ce chiffre ne prend pas en compte le relèvement du prix de la consultation des médecins à 20 euros. Dans la mesure où aucun engagement précis n'a été pris concernant les médicaments génériques et où la Sécurité sociale devra prendre à sa charge une partie de la hausse, on peut s'attendre à un nouveau creusement de ce déficit pour le reste de l'année. Risque européen. Quelle sera la réaction du gouvernement ? La France se trouve désormais dans une situation délicate vis-à-vis de ses partenaires européens. Si la limite des 3% imposée par le Pacte de stabilité est franchie, le pays s'expose à d'énormes difficultés. La Commision européenne a d'ores et déjà prévenu qu'elle pourrait engager "une procédure d'avertissement" contre la France. Le compromis de Séville supposait en effet que cette barre des 3% ne soit en aucun cas dépassée. C'est dire que la marge de manoeuvre du gouvernement est dorénavant pratiquement nulle. Le nouveau ministère des Finances ne peut donc manquer de placer le retour du déficit sous les 3% du PIB avant la fin 2002 au nombre de ses objectifs prioritaires. Mais comment alors tenir les promesses électorales en matière de baisses d'impôts et de sécurité ?Promesses. Ainsi, la promesse de baisse de l'impôt sur le revenu de 5% dès cette année devrait coûter, selon Francis Mer, 0,15% du PIB. Une augmentation du budget de la sécurité a également été envisagée. Le gouvernement peut-il se permettre de remettre en cause ces engagements, au risque de décevoir fortement son électorat ? S'il les maintient, il devra alors trouver rapidement un moyen de réduire de façon drastique les dépenses dans d'autres secteurs. Et nul doute que cette politique d'économies ne manquera pas de faire grincer des dents, voire de provoquer une rentrée sociale agitée. Il sera en effet impossible de compter sur la croissance cette année. Francis Mer a estimé "à 1,3%-1,4%" la croissance 2002. Pour 2003, il considère cependant qu'une croissance de 3% est "possible". Les premières réactions du gouvernement laissent croire à un maintien des baisses d'impôts. Francis Mer a ainsi annoncé l'ouverture dans le collectif budgétaire de deux crédits de 2,5 milliards d'euros. Le premier devrait permettre de combler les déficits sociaux et renflouer la dette. Le second devrait financer la baisse de l'impôt sur le revenu. Le ministre du Budget Alain Lambert a, par ailleurs, indiqué, qu'il excluait "toute hausse du taux de prélèvements obligatoires". Le gouvernement se dirigerait plutôt vers un plan pluriannuel de réduction des dépenses. "Dans les années à venir, la politique du gouvernement visera à engager les inflexions qui nous permettront de redonner à nos finances publiques les marges de manoeuvre pour alléger autant que faire se peut les prélèvements obligatoires et ne plus être les derniers de la classe, et financer la sécurité, la protection sociale et les retraites sans en faire porter le poids par un endettement supplémentaire sur les générations futures". Reste désormais à savoir quelles seront ces inflexions, car le président du groupe UMP à l'Assemblée Jacques Barrot a prévenu : "les Français devront se retrousser les manches".
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