Le retour de la fracture numérique

L'étude annuelle de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) sur les conditions de vie des ménages français s'est penchée sur les rapports entre les Français et Internet. Ce travail - fruit d'une enquête auprès de 8.000 ménages réalisée à l'automne 2001 - révèle que 31,9 % des Français âgés de 15 ans et plus ont déjà utilisé Internet. Mais, au-delà de ce chiffre moyen, ce sont bien sûr les sous-groupes de cette population qui apparaissent les plus instructifs. Ainsi note-t-on que largement au-dessus de la moyenne, 87,4 % des diplômés de l'enseignement supérieur, 76,3 % des cadres ou encore près des deux tiers des 15-19 ans ont déjà fait l'expérience de la navigation sur la Toile. A l'inverse, seuls 12,9 % des ouvriers, 7,1 % des non diplômés ou encore 2,4 % des plus de 70 ans ont déjà surfé.Régulièrement mise en évidence dans ses implications géographiques, la fracture sociale en matière d'Internet paraît donc demeurer, en dépit des initiatives prises par les pouvoirs publics. Pourtant, l'étude montre des raisons d'espérer la voir se réduire. L'école semble en effet avoir bien négocié le virage de l'ère Internet puisque 73 % des étudiants, lycéens ou collégiens déclarent disposer d'un accès dans leur établissement. Mais cette indication est aussitôt nuancée par l'apparente sous-utilisation de ce moyen d'accès puisqu'en milieu scolaire, 41 % des connexions à Internet sont hebdomadaires et 22 % affirment ne pas utiliser le Web. Devant un tel panorama, on peut imaginer que les moins friands d'Internet en milieu scolaire sont les fils et les filles de non diplômés. Le raccourci peut sembler rapide, mais l'étude montre aussi que ceux qui ont accès à Internet depuis leur domicile, donc majoritairement des jeunes diplômés de milieu aisé, sont aussi ceux qui sont tentés d'y accéder en d'autres lieux de connexion comme les cafés Internet ou les écoles. En effet, si moins de 4 % des personnes ne disposant pas d'un accès à domicile se sont connectées depuis un lieu public ou chez un proche, ils sont 20 % à le faire quand ils disposent d'un accès depuis leur domicile.La fracture numérique serait donc vouée à se perpétuer. Ses implications sont pourtant inquiétantes, car le ralentissement constaté depuis plusieurs mois dans la croissance du nombre d'internautes pourrait bien s'expliquer par la difficulté de trouver des relais de croissance dans les populations les moins favorisées. Faute d'avoir réussi à développer un modèle économique révolutionnaire, Internet a en revanche déjà montré son rôle d'outil de désenclavement. Ceux qui disent se préoccuper de la désormais célèbre "France d'en bas" devraient avoir à coeur de ne pas la voir prendre un nouveau train de retard quand les accès à haut débit seront disponibles... pour la seule "France d'en haut".
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