Cacophonie sur le Pacte de stabilité

Par latribune.fr  |   |  620  mots
A la veille d'un référendum irlandais crucial pour l'avenir de l'Europe, la cacophonie continue de plus belle sur la question essentielle du Pacte de stabilité de la zone euro. En visite à Paris, le président de la Commission européenne Romano Prodi a réaffirmé "l'importance de la règle de stabilité des 3%" pour les déficits publics, celle-là même qu'il avait qualifiée la veille de "rigide" et "stupide", tandis que Pedro Solbes, son commissaire aux Affaires économiques et monétaires, déclarait pour sa part que le Pacte est "suffisamment flexible". Quant à Jean-Pierre Raffarin, il a réaffirmé que la France "tiendra ses engagements".Le Premier ministre français, qui recevait Romano Prodi à Matignon, a pourtant commencé par demander à l'Europe de faire preuve de "lucidité sur la situation économique" française. Un appel qui sous-entend que la France n'a guère le choix quand elle prévoit de ne pas engager dès 2003 la réduction de son déficit structurel et de ne pas revenir à l'équilibre dès 2006, contrairement aux autres pays de la zone euro. Cela n'a pas empêché Jean-Pierre Raffarin d'affirmer que "nous tiendrons nos engagements", et de préciser que "cette loyauté-là sera la réponse à cette lucidité". Des déclarations qui pourraient sembler contradictoires, donc, mais pas plus que celles de Romano Prodi.Ce dernier a en effet saisi l'occasion de cette rencontre avec le Premier ministre français pour revenir sur la question du Pacte de stabilité, au lendemain de ses déclarations fracassantes dans le journal Le Monde (lire ci-contre). Alors même que vendredi matin, son porte-parole affirmait que le président de la Commission "ne regrette pas un mot" de ses déclarations, Romano Prodi a choisi cette fois de mettre l'accent sur "l'importance de la règle de stabilité des 3 %" (par rapport au PIB) pour les déficits publics. Bien sûr, a-t-il ajouté, cette règle doit être appliquée "avec intelligence et une connaissance pratique" de la situation économique des pays de l'Union européenne... Autant dire que ces déclarations ne vont pas contribuer à clarifier le débat. D'autant que la Commission ne parle pas d'une seule voix. Le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Pedro Solbes, a choisi, lui, de prendre ses distances avec les propos du président de la Commission, affirmant que "le Pacte de Stabilité et de croissance est suffisamment flexible pour permettre de mener des politiques de bon sens économique". A l'inverse, le ministre allemand des Finances Hans Eichel s'est empressé de manifester son accord avec les déclarations de Romano Prodi sur la rigidité et la stupidité du Pacte. "Le Pacte doit être mis en oeuvre dans une réalité très concrète", a affirmé le ministre dans une interview à paraître dans le Financial Times Deutschland, "cela signifie: nous devons parvenir aux objectifs (définis dans ce Pacte) mais sans créer de problèmes conjoncturels supplémentaires". Rien d'étonnant dans cette position : l'Allemagne fait partie, avec la France, des "mauvais élèves" du Pacte de stabilité. Mercredi dernier, elle a reconnu officiellement que son déficit public dépassera cette année le seuil maximal des 3% fixé par le Pacte. Cette cacophonie ne devrait pas aider les électeurs irlandais appelé à voter demain pour la deuxième fois sur la ratification du traité de Nice. Même si les deux sujets sont distincts, la confusion qui règne sur un aspect essentiel du fonctionnement de la zone euro risque de peser en faveur du Non. Une victoire de ce dernier serait une "tragédie", a prévenu vendredi Romano Prodi, que personne, sur ce point, n'a contredit...