La fenêtre de Raffarin

Les grandes lignes de la loi de finances sont désormais connues. Plus de dépenses, moins de recettes, avec pour résultat un déficit qui devrait demeurer inchangé, à environ 44 milliards d'euros, si la croissance attendue - probablement projetée à 2,5% - est au rendez-vous.On sait que l'impôt sur le revenu va de nouveau baisser (1% en sus de la baisse de 5% accordée cette année et reconduite), que le plan d'aide de retour à l'emploi de Lionel Jospin est maintenu, que l'aide fiscale aux familles recevra un coup de pouce, que les cotisations patronales et la taxe professionnelle vont diminuer, ou encore que le prix du tabac va grimper en flèche, de près de 15%.Mais que nous disent ces mesures du cap choisi par le gouvernement et son Premier ministre ? De la philosophie et de l'ambition de sa politique économique ? Pour l'instant, pas grand chose. Pour Jean-Pierre Raffarin, c'est tout l'enjeu des prochaines 48 heures. Et il n'est pas mince.Non que l'on puisse reprocher au héraut de la "France d'en bas" d'être demeuré inactif depuis son arrivée à Matignon, le 6 mai. Sous sa conduite, la baisse de l'impôt sur le revenu a été amorcée, la sécurité et la justice ont eu leur loi de programmation, et l'assouplissement des 35 heures, l'harmonisation du SMIC ont reçu un cadre qui sera bientôt soumis au verdict des parlementaires.Mais ces quatre mois et demi n'ont pas été exempts de ratés. Les cacophonies publiques entre ministres, à Bercy ou à l'Education Nationale, n'ont pas contribué à créer l'image d'un gouvernement compétent et uni. Avec France Télécom, le moins que l'on puisse dire est que l'Etat actionnaire n'a pas brillé par son inspiration et sa capacité à trancher.Or, trancher, c'est bien cela dont il est question, à France Télécom comme ailleurs, et c'est aussi sur sa capacité à le faire vite et bien que sera jugée l'action de Jean-Pierre Raffarin.Il faudra y venir d'abord dans le domaine social, où la dégradation des comptes de la Sécu et la réforme des retraites attendue au début de l'an prochain annoncent des difficultés autrement plus sérieuses que l'assouplissement des 35 heures. Il faudra y venir ensuite pour réussir la réforme des statuts et/ou de la composition du capital d'EDF, GDF, de la SNCF ou encore d'Air France. Il faudra y venir enfin quand une croissance très probablement bien inférieure à 2,5%, une économie mondiale inévitablement perturbée par un nouveau conflit en Irak auront achevé de rendre impossible la réduction simultanée des déficits et des impôts.Jean-Pierre Raffarin bénéficie toujours de 53% de bonnes opinions, si l'on en croit le dernier baromètre du Journal du Dimanche. Le désarroi perceptible et la désorganisation de l'ex "gauche plurielle" lui laissent le champ libre, pour le moment au moins. Ce qui revient à dire que la "fenêtre" la plus opportune de son mandat pour opérer des choix clairs et courageux ne sera jamais plus ouverte qu'elle ne l'est aujourd'hui.
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