La BCE passe son tour... pour l'instant

La porte est largement ouverte désormais pour un prochain assouplissement de la politique monétaire dans la zone euro. Le statu quo qui prévaut depuis un an ne devrait pas tarder à arriver à son terme. En effet, de l'aveu même de son président Wim Duisenberg, le conseil de la BCE de ce matin "a discuté intensivement de l'éventualité d'une baisse des taux". Cette confession est intervenue quelques minutes après que la Banque centrale européenne a annoncé la maintien de son principal taux directeur à 3,25%. Peu de temps auparavant, la Banque d'Angleterre avait également décidé de ne rien faire.Même si la BCE a choisi de ne pas imiter la Réserve fédérale américaine qui a réduit ses taux d'un demi point hier soir - une baisse dont l'ampleur a surpris Wim Duisenberg -, l'institution de Francfort paraît sur le point de sauter le pas. Certes, la BCE répète qu'elle doit rester "vigilante"sur le front de l'inflation qui demeure supérieure à l'objectif de 2% mais les gardiens de l'euro semblent désormais plus préoccupés par le niveau de l'activité que par celui des prix. Reconnaissant l'existence d'un "très haut degré d'incertitude concernant les perspectives" économiques, Wim Duisenberg annonce clairement que la BCE va "surveiller attentivement les risques pesant sur la croissance".En effet, tout comme aux Etats-Unis, la croissance européenne, après avoir montré des signes de reprise au début de l'année, s'essouffle. En Allemagne et en France, les deux premières économies de la zone euro, les chefs d'entreprises ont le blues, n'anticipant pas d'amélioration rapide de la conjoncture, et les consommateurs perdent confiance devant la dégradation du marché du travail. Par ailleurs, comme c'est aussi le cas outre-Atlantique, les incertitudes géopolitiques entretiennent autour des décisions des entreprises, et notamment sur l'investissement, un flou qui empêche toute reprise rapide. La décision de la BCE de rester l'arme au pied aujourd'hui répond sans doute à plusieurs considérations. Tout d'abord, l'inflation dans la zone euro demeure au-dessus de l'objectif de 2% fixé par l'institut de Francfort. Mais une certaine détente devrait être observée sur le front de l'inflation avec la récente appréciation de l'euro face au dollar - qui diminue le coût des produits importés - et la baisse des cours du pétrole.Par ailleurs et ce facteur a peut-être beaucoup joué dans la décision d'aujourd'hui, la BCE répugne à donner un coup de pouce aux économies de la zone euro au moment où le couple franco-allemand donne des coups de canif dans le Pacte de stabilité et de croissance en s'autorisant quelques libertés avec la réduction des déficits publics. La Banque centrale européenne rappelle d'ailleurs le caractère "indispensable" des principes de discipline budgétaire qui fixent la limite des déficits publics à 3%. Pour Wim Duisenberg, des réformes structurelles rapides renforceraient la confiance dans la zone euro et la politique monétaire ne peut fournir des incitations à l'emploi. Outre-Rhin, où les déficits publics devraient être de 3,7% du PIB cette année, la conjoncture économique est particulièrement dégradée comme en attestent les chiffres allemands du chômage publiés ce matin. En données corrigées des variations saisonnières, ces statistiques montrent une nouvelle dégradation avec une hausse de 22.000 du nombre de chômeurs en octobre, à 4,1 millions. Le taux de chômage (CVS) passe à 9,9% contre 9,8% précédemment. Dans ce contexte, la politique monétaire de la BCE est particulièrement restrictive pour l'Allemagne, où l'inflation est en dessous des 2%. Or, avec une consommation atone et des faillites d'entreprises qui se multiplient, les Allemands accueilleraient avec soulagement un ballon d'oxygène venu de la BCE. Mais c'est l'ensemble de la zone qui en profiterait, puisque la croissance ne devrait pas dépasser les 1% cette année selon la Commission européenne.Sur le marché des changes, l'euro profite de l'accroissement du différentiel de rendement de 200 points de base existant entre la monnaie européenne et le billet vert. Vers 18 heures 30, un euro s'échangeait contre 1,0094 dollar.
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