Peregrine Systems dépose son bilan

La folie techno a fait une victime supplémentaire aux Etats-Unis : l'éditeur de logiciels Peregrine Systems, numéro un mondial des logiciels de gestion des infrastructures d'entreprise, a annoncé hier soir sa décision de se placer sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites. Un dépôt de bilan qui sanctionne à la fois l'effondrement des ventes et les soupçons d'irrégularités comptables, la société faisant l'objet d'une enquête de la SEC, la Securities & Exchange Commission. La chute de cette ex-star de la high-tech américaine, créée en 1981 à San Diego, a suivi un itinéraire désormais bien connu, notamment dans le secteur des télécommunications : en avril, Peregrine avait annoncé le report de la publication de ses résultats financiers après s'être séparé de son auditeur de l'époque, Andersen, contre lequel il porte plainte aujourd'hui. Le groupe a ensuite reconnu avoir artificiellement gonflé son chiffre d'affaires de 100 millions de dollars sur les trois derniers exercices comptables, un chiffre qui pourrait atteindre 250 millions au final. A titre de comparaison, le groupe avait annoncé un chiffre d'affaires global de 565 millions pour l'exercice 2000-2001. Les dirigeants de Peregrine ont ensuite été remerciés. Puis, mi-juin, prétextant déjà les effets néfastes de l'enquête comptable sur son activité, le groupe avait annoncé la suppression de 1.500 emplois, soit près de la moitié de ses effectifs, déjà réduits d'un tiers depuis la fin 2001. Aujourd'hui, l'heure est au dépeçage pour Peregrine, qui avait multiplié ces dernières années les acquisitions, parfois coûteuses : le groupe avait conclu quatre rachats en 1999 et cinq en 2000, dont celui de Harbinger, spécialiste des portails de commerce électronique inter-entreprises. La dernière grosse acquisition, Remedy, rachetée l'an dernier pour 1,08 milliard de dollars, va être vendue à BMC Software pour 350 millions en cash. Soit moins du tiers de son prix d'acquisition. Le mois dernier, deux filiales de plus petite taille avaient déjà été cédées, pour un total de 12,5 millions de dollars. En juin, déjà, le groupe s'était séparé de son activité de gestion de la chaîne d'approvisionnement pour 35 millions. Les filiales étrangères et Peregrine Solutions, la filiale de support à la clientèle, ne sont en revanche pas concernées par le placement sous la protection du chapitre 11. En Bourse, l'action Peregrine a suivi le mouvement de chute de l'entreprise. Exclu du Nasdaq fin août, Peregrine avait vu son cours tomber de 99,4% depuis son pic de mars 2000, ramenant sa capitalisation sous les 50 millions de dollars, contre 9 milliards au plus haut. Le titre, désormais échangé sur les "pink sheets" (littéralement les feuilles roses), un compartiment réservé notamment aux exclus du Nasdaq, chutait de 51% en milieu de séance, à 10 cents.De cette triste histoire, on retiendra aussi que la chute de Peregrine aura illustré à merveille les conflits d'intérêts auxquels s'exposaient sans vergogne les cabinets d'audit jusqu'à la multiplication des scandales financiers. Car après avoir remplacé Andersen en avril par KPMG à la suite de la découverte des irrégularités dans ses comptes, Peregrine Systems a dû... remercier KPMG fin mai, pour faire appel à PricewaterhouseCoopers. Un dixième des ventes fictives comptabilisées ces dernières années, soit 35 millions de dollars, impliquaient en effet KPMG et KPMG Consulting...
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