France Télécom semble condamné à se dépouiller pour survivre

Ça phosphore autour de France Télécom (FT). Le nouveau patron, Thierry Breton, s'est donné deux mois pour livrer une stratégie vigoureuse de désendettement ne donnant pas de FT l'image d'un groupe affaibli et sur la défensive. Il a commencé à recevoir les syndicats tandis que l'audit interne, lancé début octobre, se poursuit. Selon des sources proches du dossier, son objet n'est pas tant de mettre en lumière les économies qu'il faudra réaliser que de passer en revue les activités et les actifs de l'opérateur afin d'établir la liste de ce qui peut être cédé ou réorienté à court et moyen terme.Comme nous l'indiquions vendredi, la restauration des fonds propres de FT devrait s'accompagner d'une restructuration que Bruxelles pourrait exiger pour que soit validé le plan de sauvetage financier. Son ampleur pourrait dépendre des conclusions de la partie financière de l'audit. Certaines sources bancaires craignent de nouvelles surprises en matière d'engagements hors bilan et de remboursements de créances conduisant à gonfler encore l'endettement, qui atteignait déjà 69,2 milliards d'euros à la fin juin.Pour l'heure, résume un banquier proche du dossier, "c'est le concours Lépine". Des ministères concernés aux banquiers-conseils de l'Etat et de l'entreprise, en passant par les autres banques invitées à participer à la probable augmentation de capital de l'opérateur, chacun a sa petite idée.Lors de son adresse à ses cadres, Thierry Breton avait estimé que l'une des réussites du groupe était "l'évolution de ses métiers du téléphone fixe vers le mobile, Internet et les services aux entreprises", sans toutefois s'engager sur les options futures. Or, selon nos informations, les idées émises par les banques consultées prévoient toutes de toucher plus ou moins au périmètre de FT. "L'Etat et les banques vont faire leur devoir, l'entreprise devra faire le sien", prévient une grande banque européenne, où l'on attend des choix clairs et où l'on n'hésite pas à rapprocher les missions assignées à Thierry Breton et à Jean-René Fourtou à la tête de Vivendi Universal. Dans les deux cas, il y a bien des solutions, mais chacune recèle des difficultés.Téléphonie mobile. Parmi les activités de FT, la téléphonie fixe en France est assez peu visée. Certaines banques ont néanmoins envisagé la possibilité que FT vende son réseau à l'Etat pour ne plus s'occuper que de l'exploitation. Déjà mentionnée, l'idée fait bondir au sein de l'opérateur. Pour le reste, visiblement, rien n'est tabou, pas même de toucher à Orange, la principale source de profits futurs de l'opérateur, mais aussi, de ce fait, son actif le plus facile à céder. Si Bercy a plusieurs fois manifesté sa volonté d'éviter une cession de la filiale téléphonie mobile, certains financiers veulent comprendre qu'une modification de son périmètre n'est pas exclue. "Même si cela rapportera peu d'argent, il sera nécessaire de se séparer de certaines filiales étrangères où la position concurrentielle est difficile aux Pays-Bas, en Italie ou en Europe du nord", affirme une source bancaire, qui croit en un recentrage à terme d'Orange sur ses deux principaux marchés : la France et le Royaume-Uni.Plus audacieux, d'autres affirment que Thierry Breton pourrait chercher à nouer rapidement des contacts afin d'accueillir un partenaire au capital d'Orange. Telefónica ou Telecom Italia paraissent les seuls en Europe à avoir les moyens financiers et un intérêt industriel à s'embarquer dans une telle aventure. A la condition que FT conserve une majorité de contrôle lui permettant de bénéficier des flux de trésorerie de sa filiale.Autres pistes. Les autres pistes explorées recèlent également de vrais écueils. Une cession d'Equant services télécoms aux entreprises internationales se heurterait à la difficulté de trouver un acheteur en cash. Céder les très rentables Pages Jaunes, aujourd'hui dans Wanadoo, dépouillerait la filiale dirigée par Nicolas Dufourq de sa principale pépite. En outre, la cession de cette activité créée de zéro par FT et valorisée aujourd'hui 2 milliards d'euros se solderait par une forte imposition sur cette colossale plus-value. Redresseur d'entreprises hors pair, Thierry Breton va donc devoir manoeuvrer délicatement dans un calendrier étroit. Ses "100 jours" seront déterminants.
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