"La high-tech se prépare à la consolidation et à la mort de certains acteurs"

La Tribune.fr - Quel bilan faites-vous des résultats du troisième trimestre dans les nouvelles technologies?Benoit Flamant - Il faut d'abord mettre de côté deux tendances extrêmes. Tout d'abord, la téléphonie fixe. Ce secteur ne voit pas le bout du tunnel. Aux Etats-Unis, Verizon, un des acteurs traditionnel du secteur, va par exemple réduire ses dépenses d'investissements de 30%. En Allemagne et en France on n'a encore rien vu, France Télécom et Deutsche Telekom vont également tailler dans les coûts. D'un autre côté, il ne faut pas trop tenir compte des bons résultats de Microsoft, dus à leur changement de politique commerciale.Mis à part cela, d'une manière générale, je perçois un mouvement de reprise mou. Bien sûr, les chiffres d'affaires ne sont pas terribles. Mais beaucoup d'entreprises ont démontré leur capacité d'adaptation et ont su améliorer leurs marges. C'est le cas de SAP, de Dassault Systèmes et de Business Objects par exemple. Concernant BO, même si la croissance des ventes n'est pas aussi élevée qu'attendu, le groupe affiche une santé financière irréprochable et il dégage du cash. La tendance est également vraie dans les semi-conducteurs, au vu des résultats de ST Micro. D'autres ont déçu, comme Philips. C'est le propre des périodes assez molles : certains gagnent des parts de marché, d'autres en perdent.Mais les prévisions pour les prochains mois et pour 2003 ne sont pas très optimistes...Pour la fin de l'année, la consommation ne sera pas aussi bonne que l'an dernier mais certains segments de marché offrent de belles perspectives. C'est le cas du "wireless" [sans fil, ndlr], ou de l'électronique grand public. Le DVD, les caméras ou les appareils photos numériques, et les écrans LCD (qui pèsent maintenant 25% du marché des écrans) sont en forte croissance. Le GPS commence à émerger, les nouveaux modèles de voitures en sont de plus en plus équipés. Les technologies sans fil sur réseau local, comme Bluetooth ou Wi-Fi font aussi leur chemin. Le Wi-Fi, qui n'existait pas il y a à peine deux ans, aura généré un chiffre d'affaires de 3 milliards de dollars en 2002 ! Le téléphone portable, une industrie qui n'avait pas connu de véritable avancée technologique depuis deux ans, n'est pas en reste, avec les nouveaux modèles à écran couleur ou dotés d'un appareil photo numérique.Les investissements des entreprises sont-ils en train de repartir ?Il y a eu une phase de surinvestissement. Mais avant de réinvestir, les entreprises doivent d'abord restaurer leurs marges. Et elles commencent tout juste à le faire après les restructurations en masse de ces derniers mois. Comment voyez-vous le paysage évoluer dans les prochains mois?La high-tech se prépare à des phases de consolidation ainsi qu'à la mort de certains acteurs. Dans les semi-conducteurs, les opérations de rapprochement ont commencé. Nortel et Alcatel ont cédé leurs activités puces à ST Microélectronics, Ericsson a vendu la sienne à Infineon. Et je trouve qu'un accord entre ST Micro et Motorola ferait sens. Enfin, je pense que Philips devrait lui aussi sortir des puces.Concernant le marché des équipements télécoms, il y a beaucoup trop d'acteurs. Même si tous survivent, certains ne seront plus que l'ombre d'eux-mêmes. Imaginez que les effectifs de Lucent ou Nortel ont été divisés par plus de deux en deux ans. Et pour Alcatel, la cure n'est pas terminée : il va encore devoir se défaire de pans entiers d'activités, comme les mobiles par exemple.Certains grands noms de la hig-tech sont-ils vraiment en danger ?Oui, bien sûr. Par exemple, Sun Microsystems et EMC ne sont pas encore au plus bas. Sun a une stratégie beaucoup trop verticalisée qui va du hardware, aux semi-conducteurs, en passant par les systèmes d'exploitation, le stockage... Il y aura des revirements stratégiques, même s'ils ont beaucoup de cash. EMC, à mon sens, est mal positionné, beaucoup trop cher. De plus, il a conclu un accord très dangereux avec Dell, qui est en train de le phagocyter. Le constructeur informatique vend les produits EMC, selon sa propre méthode, c'est-à-dire à prix coûtant. EMC qui fait du haut de gamme ne retire rien de cette alliance. Microsoft avait fait la même chose en s'alliant à Sybase dans les bases de données, ce dernier n'a pu grandir comme il aurait dû.Comment voyez-vous le marché des infrastructures pour réseaux mobiles ?Mal. Pour l'instant, il n'y a pas de services qui justifie la 3G. Les fonctionnalités offertes par les SMS et les MMS (Multimedia Message Service) suffisent largement. Les investissements dans l'UMTS n'interviendront pas avant deux ou trois ans, quand les opérateurs en ressentiront le besoin. Sauf que d'ici là, le prix des infrastructures aura beaucoup baissé. La purge n'est donc pas terminée, que ce soit pour Motorola ou pour Ericsson. Ce dernier existera toujours, mais quel sera son périmètre dans trois ans ?
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