Les équipementiers asiatiques à l'attaque

Après l'Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique et avant l'Espagne, l'i-mode débarque en France et ce n'est qu'une demi-bonne nouvelle. L'arrivée prochaine, sous la bannière Bouygues Telecom, de la déclinaison française du service d'Internet mobile du japonais DoCoMo permettra certes aux Français d'accéder à l'une des expériences les plus réussies de mobile multimédia. Mais il y a là aussi le symbole d'une défaite concédée par les grands européens du téléphone mobile aux contrées du soleil levant. Plombée au sommet de sa croissance par les sommes délirantes dépensées pour les licences de troisième génération UMTS, l'Europe du mobile a fini par perdre sa belle avance sur les Etats-Unis et l'Asie. Ces derniers, faute d'avoir pu standardiser dans les années 90 une norme sur un marché de taille, n'avaient pu imiter le succès du GSM. Mais, dans les hautes technologies, les sauts de génération sont généralement l'occasion de rebattre les cartes. Or, c'est précisément ce qui peut inquiéter les Nokia, Ericsson, Alcatel ou Siemens. Lorsqu'il s'est agit de proposer à leurs clients de nouveaux terminaux dotés d'écrans couleurs, à l'ergonomie étudiée pour des applications multimédia, les opérateurs le disent plus ou moins ouvertement : ils n'ont pas trouvé leur bonheur de ce côté-ci du Pacifique. Cela explique qu'un fabriquant comme le Coréen Samsung se soit hissé en quelques mois des profondeurs du classement à la troisième place des fournisseurs mondiaux de terminaux. Cela explique aussi qu'une récente étude montre que Nokia, leader mondial du mobile, se soit fait tout de même distancer par les Sharp, NEC, Toshiba, Casio et encore Samsung sur le segment - il est vrai émergent - des terminaux avec appareil photo intégré. Cela explique enfin qu'un industriel de l'électronique grand public comme le coréen LG se prépare à inonder les marchés américains et bientôt européens en terminaux dernier cri.L'i-mode en Europe, c'est tout autant DoCoMo faisant de KPN, Bouygues Telecom et Telefonica ses chevaux de Troie que NEC, Toshiba, Mitsubishi, Sony ou Sharp s'apprêtant à rafler des parts de marché sur le Vieux Continent. Et il n'y a là rien que de très normal. Les opérateurs veulent des produits de plus en plus standardisés et les équipementiers japonais ont résolument accepté de rapprocher les terminaux mobiles des produits d'électronique grand public comme les télévisions ou les calculatrices. Et puis trouve-t-on ailleurs qu'au Japon ou en Corée l'expérience de milliers d'accros aux yeux rivés sur l'écran plutôt que le portable à l'oreille ?Dans les propositions transmises cette semaine par le gouvernement français à l'Union européenne pour sauver l'UMTS, la préoccupation d'un retard européen en matière de recherche paraît avoir été bien diagnostiquée. Comme si, enfin, les pouvoirs publics mesuraient le risque qui pèse aujourd'hui sur les industriels européens. Nokia, riche de multiples succès, ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt des équipementiers européens qui sont aujourd'hui menacés par le savoir-faire asiatique. Sans compter que les ambitions de Microsoft dans les téléphones multimédia ne sont pas de nature à les rassurer.
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