Cegetel sur le fil du rasoir

Arrivé à la barre du navire Vivendi Universal (VU) en pleine tempête, Jean-René Fourtou est confronté à des choix fondamentaux pour le groupe franco-américain. Tout le monde s'attend à des cessions d'actifs importantes et, outre Canal Plus, Cegetel est généralement évoqué. Avant d'en arriver là, le nouveau patron de VU devra s'interroger sur le sens pour un groupe de médias de demeurer un acteur du marché français de la téléphonie. La convergence entre les réseaux et les contenus, tant vantée par son prédécesseur Jean-Marie Messier, n'a pas porté ses fruits. Du temps même de J2M, les interrogations étaient déjà nombreuses sur la pertinence de conserver Cegetel. Cette question se pose toujours. Cegetel est un opérateur français, présent dans la téléphonie fixe et mobile. C'est le numéro deux sur son marché. Mais ce n'est que cela, si l'on rapporte sa dimension aux ambitions internationales de VU. De plus, VU ne détient que 44 % de Cegetel, ce qui lui interdit d'utiliser les flux de trésorerie de sa filiale pour son désendettement. Or, au fil des mois, essentiellement grâce à SFR, l'opérateur mobile, Cegetel est devenu la branche de VU qui génère le plus de cash. D'où le dilemme qu'aura Jean-René Fourtou. Monter au capital de Cegetel pour en retirer tous les profits nécessitera de débourser plusieurs centaines de millions d'euros pour s'offrir les parts des autres actionnaires, BT Group et l'américain SBC. Parallèlement, il lui faudra résister à la volonté de plus en plus clairement affichée de Vodafone, déjà actionnaire de SFR, de prendre le contrôle de l'opérateur mobile pour s'affirmer sur le seul marché d'importance où il n'est que faiblement présent. Jean-René Fourtou a donc le choix entre plusieurs inconvénients. S'il conserve Cegetel pour ses flux de trésorerie à défaut de poursuivre une stratégie cohérente, il faudra que ce soit dans son intégralité. Et pour que son pôle télécoms soit mieux armé et mieux valorisé, l'idéal serait qu'il finisse aussi par mettre la main sur Télécom Développement, la société commune détenue avec la SNCF, qui rassemble les actifs du réseau national de Cegetel. En revanche, s'il décidait de céder SFR à Vodafone, les activités fixes de Cegetel resteraient à vendre. Avec l'inconvénient que les opérateurs alternatifs de télécommunications sont fort mal valorisés et n'intéressent plus grand monde. Mais, déjà, il se murmure qu'au moins un candidat sérieux ne se ferait pas prier longtemps pour se rapprocher de Cegetel. LD Com, la filiale du groupe Louis Dreyfus, le troisième larron du marché français des télécoms, compléterait là utilement sa palette pour constituer un groupe d'envergure face à France Télécom. Le marché français s'en trouverait transformé et l'hypothèse n'est pas si farfelue. A son évocation, certains membres du collège de l'Autorité de régulation des télécoms (ART) préviennent déjà que deux acteurs dominants sur un marché, "ce n'est pas la concurrence". Ce à quoi d'autres répondent qu'aujourd'hui, il n'y en a qu'un.
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