La Cour européenne de Justice inflige un nouveau revers à la Commission

Et de trois: après le rejet en juin de l'interdiction de la fusion entre Airtours et First Choice et celui, mardi dernier, de celle entre Schneider et Legrand, le Tribunal de première instance de la Cour européenne de justice (CEJ) a infligé ce matin un nouveau camouflet à la Commission européenne. Cette fois, c'est le veto qu'elle avait imposé à la fusion entre Tetra Laval et Sidel qui est annulé. Comme dans le cas de Schneider-Legrand, les attendus de la décision du Tribunal sont sévères pour les services de la Commission. "L'analyse économique des conséquences anti-concurrentielles immédiates et des effets de conglomérat ainsi que les comportements prévisibles des sociétés en cause sont fondés sur des preuves insuffisamment rapportées et procèdent d'un certain nombre d'erreurs de raisonnement", affirme ainsi le Tribunal, qui rejette en revanche l'argument de Tetra Laval sur "une violation du droit d'accès au dossier". Immédiatement, le groupe suédois Tetra Laval a affirmé vouloir relancer une offre sur la société française Sidel. "Nous nous réjouissons vivement de cette décision" (du Tribunal), a déclaré le groupe dans un communiqué, "Nous espérons obtenir une réponse rapide de la Commission afin de pouvoir accueillir Sidel au sein du groupe Tetra Laval". C'est en octobre 2001 que la Commission avait interdit le rachat de Sidel par Tetra Laval, estimant notamment que la nouvelle entité aurait pu s'appuyer sur sa position dominante dans le carton pour en acquérir une autre dans le plastique. Ces trois annulations successives de vetos prononcés par la Commission contre des projets de fusion achèvent de remettre en cause l'édifice actuel régissant les procédures d'examen de ces opérations par les services de Mario Monti, le commissaire chargé de la concurrence. Car les juges sont implacables avec le travail de la Commission. Dans le dossier Schneider-Legrand, ils avaient ainsi dénonçé pêle-mêle des "erreurs", des "omissions" et une "violation sérieuse des droits de la défense"...Intervenant lors d'une conférence de presse en début d'après-midi, Mario Monti s'est dit "déçu" par cette décision de justice, tout en affirmant qu'elle n' "affaiblit pas" l'autorité de la Commission. Pas question, cela dit, de "rester les bras croisés": le commissaire veut désormais lancer une réforme pour "restaurer la confiance" de la communauté économique. Projet de réforme en décembreIl est donc clair que les règles du jeu vont être amenées à évoluer. D'ores et déjà, la Commission européenne doit présenter d'ici à la fin de l'année des propositions pour modifier le droit des concentrations, élaborées suite à de larges consultations, lancées en décembre 2001 sur la base d'un livre vert visant à réviser le règlement européen de 1989.Les réflexions en cours, basées sur les remarques des professionnels, que les décisions du Tribunal sont venues conforter, portent sur l'amélioration des procédures, jugées opaques. Un accent particulier devrait être mis sur le renforcement des droits de la défense.Une multiplication des contacts entre les services de la Commission et les sociétés concernées par l'opération de concentration est ainsi envisagée, tout au long de la procédure. Le renforcement du rôle du fonctionnaire européen indépendant qui intervient en tant que conseil auditeur est également à l'étude. Une réflexion est également en cours sur un assouplissement des délais très stricts imposés aux entreprises pour respecter la procédure.Dans les milieux d'affaires, où l'on vit généralement mal les relations avec les services de Mario Monti, on espère donc vivement que les revers successifs subis par ces derniers vont permettre de déboucher rapidement sur une évolution profonde des règles et des pratiques en matière de fusion. De façon à ce que les entreprises qui montent un tel projet n'aient plus le sentiment d'être soumises à des décisions arbitraires, mais bien d'évoluer dans un cadre clairement défini, respectant leurs droits à défendre leur dossier.Schneider étudie la possibilité de reprendre LegrandLe conseil d'administration de Schneider Electric a demandé vendredi à la direction du groupe de lui fournir "très rapidement" le détail des différentes options ouvertes par l'annulation du veto de la Commission sur le projet de fusion avec Legrand. Une fois obtenues ces précisions, "le conseil d'administration se prononcera alors sur l'opportunité de conserver Legrand". Après le rejet de l'opération, qui devait donner naissance au numéro un mondial de l'appareillage électrique de basse tension et des automatismes industriels, Schneider a été contraint de revendre Legrand à un consortium dirigé par le groupe Wendel. Mais une clause suspensive lui permet de décider, avant le 10 décembre prochain, de récupérer Legrand, moyennant versement d'une indemnité à Wendel.
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