Alcatel vs. Siemens

On aurait pu croire le débat tranché. En quelques années, au nom de la sacro-sainte et indispensable lisibilité des stratégies industrielles, les investisseurs avaient fini par obtenir des grands groupes diversifiés qu'ils se recentrent sur des activités homogènes constituant leur "coeur de métier". Alcatel en fut un bel exemple.L'ex-Compagnie générale d'électricité est en effet devenue sous l'impulsion de Serge Tchuruk à partir de 1995 l'un des grands équipementiers télécoms mondiaux. Oubliés les médias, vendue l'industrie lourde, sacrifiée la défense, l'idée était alors de se positionner sur le marché offrant le plus de potentiel de croissance grâce au formidable développement des télécommunications puis d'Internet.Le succès, remarquable, fut d'ailleurs au rendez-vous. En réalisant rapidement 85 % de son chiffre d'affaires dans les télécoms, Alcatel bénéficia du décollage de tout le secteur et prit une autre dimension à la grande satisfaction de ses actionnaires.L'ennui c'est qu'à trop se recentrer sur un seul secteur, même en occupant des segments aux cycles différents, on devient certes plus lisible pour les analystes, on va bien quand tout va bien, mais on se trouve beaucoup plus exposé aux caprices de la conjoncture. Depuis que les télécoms dans leur ensemble sont entrés en de sévères turbulences, Alcatel souffre particulièrement, ne trouvant pas de sources de revenus pour compenser la chute d'activité de son "core business". Et ses dirigeants en sont réduits à scruter l'horizon dans l'attente de l'accalmie.Dans le cas d'Alcatel, se recentrer sur un coeur de métier s'est révélé une sorte d'engrenage pernicieux quand la crise est venue. Mais le plus inquiétant est que le groupe de Serge Tchuruk a dû se résoudre à abandonner certaines de ses divisions télécoms pour faire baisser ses coûts. Comme s'il devait désormais se recentrer sur le coeur du coeur de métier.Cette stratégie qui a des allures de fuite en avant, Siemens, que l'on peut rapprocher de l'Alcatel d'avant 1995, ne l'a pas suivie. Et les résultats trimestriels du groupe allemand montrent précisément que ses difficultés dans les télécoms sont aujourd'hui compensées par ses activités d'industrie lourde (énergie ou transport).Les à-coups de la conjoncture étant une réalité économique plus que jamais inévitable, les vertus de la diversification semblent en voie d'être réhabilitées. Dernier exemple : Vivendi Universal, si pressé de se recentrer sur les médias, découvre que ses actionnaires aiment bien l'eau et qu'ils se voient bien continuer à vivre avec Vivendi Environnement.
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