Schneider vend Legrand à Wendel-KKR

C'est l'épilogue d'un feuilleton qui durait depuis janvier 2001. Confirmant ce que laissait entendre La Tribune mardi matin, Schneider Electric a décidé de renoncer au projet de fusion avec Legrand, leader européen de l'appareillage électrique. Tirant les conséquences de cette décision, la direction de Schneider a annoncé dans la foulée la vente au consortium Wendel-KKR de sa participation de 98,1% détenue dans Legrand. Dans un communiqué, Schneider Electric explique les raisons de son renoncement: "cette décision est la conséquence, d'une part, de la prise de position des services de la Commission Européenne qui, le 29 novembre 2002, ont considéré que les mesures correctives proposées par Schneider Electric ne leur permettaient pas d'approuver le rapprochement et, d'autre part, de l'hostilité au rapprochement des deux groupes exprimée par les dirigeants de Legrand".Décidés à fusionner en janvier 2001, Schneider et Legrand avaient vu leur projet se réaliser durant l'été suivant. Mais en octobre 2001, la Commission européenne avait interdit ce rapprochement au motif qu'il entravait le jeu de la concurrence et Bruxelles avait demandé la séparation des deux groupes. Au cours de l'été 2002, un accord de vente de Legrand était signé entre Schneider Electric et Wendel-KKR, cette cession étant assortie d'une condition suspensive dans l'attente du résultat du recours déposé par Schneider devant la cour de justice de Luxembourg. Le 23 octobre dernier, coup de théâtre: la justice européenne annulait la décision de Bruxelles et l'interdiction de la fusion, estimant que les problèmes de concurrence ne se posaient que sur le marché français. Schneider décidait alors de relancer le processus et déposait au début du mois dernier un nouveau dossier auprès de Bruxelles.Mais les conditions n'étaient plus les mêmes. En particulier, les relations entre la direction de Schneider et celle de Legrand s'étaient nettement détériorées, au point de voir les deux anciens partenaires recourir aux tribunaux. Legrand a notamment contesté le droit de Schneider de déposer ce nouveau projet devant la Commission européenne sans l'accord préalable du groupe limougeaud. Sur ce point, la justice française a d'ailleurs donné raison à Legrand (lire ci-contre). Par ailleurs comme le souligne Schneider Electric, "le Comité de Direction de Legrand a publiquement rejeté, le 13 novembre 2002, le projet de rapprochement des deux groupes". Pour le groupe dirigé par Henri Lachmann, "ce revirement aurait rendu encore plus difficile l'intégration des deux sociétés".De fait, les obstacles se multipliaient sur la route de Schneider. Ainsi, ce week-end il est apparu assez clairement que le nouveau dossier de rapprochement déposé par le groupe à Bruxelles ne recevrait pas un feu vert rapide de la Commission européenne. Celle-ci s'apprêtait à lancer un examen approfondi, ce qui aurait impliqué un délai supplémentaire de 4 mois. Or, Schneider n'avait pas les moyens d'attendre, puisque c'est le 5 décembre au plus tard que le groupe devait confirmer ou non la vente de Legrand à Wendel-KKR. En tournant la page Legrand, Schneider fait en tous cas une économie de 180 millions d'euros, le montant du dédit que le groupe aurait été contraint de régler à Wendel-KKR. Quant au produit de la vente, 3,63 milliards d'euros, Schneider a confirmé qu'il l'utiliserait pour "mener une politique sélective d'acquisitions dans des métiers porteurs". "De nombreuses opportunités (d'acquisitions) ont, d'ores et déjà, été identifiées". Le groupe a déclaré lors d'une conférence de presse que ces acquisitions, dont certaines pourraient avoir lieu au premier trimestre 2003, devraient lui permettre d'augmenter son chiffre d'affaires de 2 milliards d'euros. Il s'est notamment dit intéressé par certains actifs d'ABB.Par ailleurs, des rachats d'actions sont envisagés. Ils "permettront d'optimiser la structure financière du groupe", a souligné Schneider, qui n'a en revanche pas fourni d'échéancier.Enfin, les titres Legrand étant enregistrés dans les comptes de Schneider pour quelques 4 milliards d'euros, la moins-value lui donnera droit à un crédit d'impôts. Le président Henri Lachmann a indiqué que "l'impact fiscal sera de 500 millions d'euros de manque à gagner pour l'Etat français". Ce crédit pourra être utilisé pendant cinq ans.A la Bourse de Paris, le titre Schneider progresse de 0,47% à 48,72 euros à la clôture, tandis que Wendel Investissements perd 0,88% à 23,79 euros.Le nouvel actionnariat de LegrandPour reprendre les 98,1% de Legrand au prix de 3,63 milliards d'euros, les acquéreurs vont apporter 1,8 milliard d'euros de fonds propres, le reste étant financé par endettement. Si le consortium met en avant les noms de Wendel et KKR, les deux groupes ne sont pas pour autant les seuls participants. Ils ne vont en effet amener, à parité, que 1,35 milliard d'euros, soit 75% du capital du consortium, précise un communiqué conjoint. Le solde du capital a été attribué à des partenaires: West LB (200 millions, soit 11,11%), HSBC private Equity Ltd (115 millions, soit 6,4%), Goldman Sachs Capital Partners (100 millions, soit 5,55%) et les familles fondatrices de Legrand (29 millions, 1,61%). A l'issue du rachat, le consortium déposera une garantie de cours suivie d'une offre publique de retrait.
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