La bataille des journaux gratuits est engagée

Alors que les études divergent quant aux conséquences pour les quotidiens locaux payants de la sortie de concurrents gratuits, Paris et Marseille servent aujourd'hui de tests grandeur nature. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que les premières heures de ces journaux sont mouvementées. En effet ce matin 200.000 exemplaires du quotidien Metro Paris, édité par le suédois Metro International, ont été distribués à Paris après avoir été imprimés au Luxembourg. Le journal n'a pas pu être imprimé dimanche soir sur les rotatives de France Soir à Aubervilliers, comme le prévoyait un accord avec Poligrafici Editoriale, propriétaire de France Soir. Un "plan de secours a donc été déclenché" pour l'imprimer à l'étranger, indique un porte-parole de Metro, cité par l'AFP. Le journal, un tabloïd de 24 pages, a été distribué dans des points stratégiques comme les sorties de métro, de gares ou de RER, par 150 à 180 colporteurs. Mais des échauffourées ont eu lieu notamment place de la Nation où le chargement de deux camions a été dispersé sur la chaussée. Dans plusieurs endroits de la capitale, notamment à la République et place Pigalle, des journaux Metro jonchaient le trottoir. Ces actions sont le fait des ouvriers du Livre parisien, a déclaré Gérard Letreguilly, à la tête de la fédération des rotativistes, correcteurs et ouvriers de Paris Diffusion Presse (PDP). Selon lui, "si Metro a pu distribuer seulement 10% de ses exemplaires, c'est un grand maximum". Pour sa part, le groupe suédois s'est dit "surpris et scandalisé" mais déterminé "à poursuivre sa diffusion" tout en discutant. Des négociations dont il sera sans doute difficile de renouer le fil, si l'on en juge par les propos de Marc Norguez, secrétaire général du Comité intersyndical parisien CGT qui qualifie les responsables de Metro de "voyous". Il reproche à Metro International d'avoir en quelque sorte mené un double jeu, puisque le groupe et les syndicats étaient "en contact toute la semaine dernière et tout le week-end pour régler les problèmes de distribution". A Marseille, Metro n'a même pas franchi les portes de l'imprimerie où il a été fabriqué. Une quarantaine d'hommes ont en effet détruit dans la nuit les 50.000 premiers exemplaires du quotidien gratuit qui venaient d'être imprimés. Selon Olivier Mollé, responsable de l'imprimerie, le commando s'est réclamé de la CGT-Filpac de Vitrolles. Le syndicat du Livre CGT pour le sud-est s'est dans la foulée déclaré déterminé à poursuivre ses actions tant que ces journaux gratuits ne seront pas fabriqués, ni distribués par une entreprise de presse.Et c'est d'ailleurs parce que c'est La Provence, du groupe Hachette Filipacchi Media, qui imprime Marseilleplus que ce dernier a échappé à la vindicte des ouvriers du Livre. 100.000 exemplaires du premier numéro de ce journal gratuit ont été distribués dans la capitale phocéenne ce matin. Mais la tranquillité de Marseilleplus pourrait n'être que transitoire. En effet, le quotidien est distribué par des partenaires extérieurs et le Livre CGT a convenu avec la Provence d'un délai d'une semaine pour "remédier" à cette situation. Toujours est-il qu'en attendant, Marseilleplus bénéficie d'un temps d'avance sur son concurrent Metro. Un avantage non négligeable quand on sait que l'objectif de Marseilleplus est bien entendu d'assécher le marché publicitaire. Hachette Filipacchi Media espère conquérir un public qui ne lit pas la presse régionale, mais qui pourrait être séduit par l'information condensée des gratuits. Une stratégie qui porte néanmoins le risque de voir les gratuits cannibaliser l'audience des quotidiens locaux payants. Selon un expert de l'agence d'achat d'espaces publicitaires Carat, un gratuit provoque une baisse de 5 % à 7 % de la diffusion des quotidiens payants locaux la première année, la situation se stabilisant la deuxième année. Le quotidien communiste La Marseillaise pourrait bien payer au prix fort cette entrée en force des gratuits à Marseille. Quant à La Provence, dont la diffusion s'est érodée l'an dernier, elle pourrait souffrir un peu plus. latribune.f
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