Vodafone pourrait battre le record des dépréciations d'actifs

Dix milliards, quinze milliards, vingt milliards de livres, ou plus encore ? Si les analystes financiers spéculent sur leur montant, une chose est sûre : les dépréciations d'actifs péseront lourd, très lourd, dans les résultats annuels que présentera mardi matin Vodafone, le premier opérateur mondial de téléphonie mobile. Le groupe présidé par Chris Gent pourrait en effet battre les "performances" accomplies en la matière ces derniers mois par plusieurs opérateurs de télécoms historiques : les dépréciations d'actifs ont atteint 10,2 milliards d'euros chez France Télécom, 12,4 milliards chez KPN et 15,2 milliards chez Deutsche Telekom. Dans l'hypothèse la plus sombre - vingt milliards de livres de dépréciations - la perte nette affichée par Vodafone pourrait ainsi approcher 35 milliards de livres, selon certains analystes. Pour mémoire, le groupe a publié pour le premier semestre de l'exercice une perte nette de 8,45 milliards de livres, pour un chiffre d'affaires de 8,9 milliards. Comme les autres grands opérateurs, Vodafone paie aujourd'hui le prix des nombreuses et coûteuses opérations de croissance externe réalisées ces dernières années, une stratégie qui a culminé en 2000 avec le rachat de Mannesmann pour 177 milliards d'euros en actions. Certes, même coûteuse, cette stratégie a porté ses fruits : avec plus de 101 millions de clients fin mars (+22% en un an), Vodafone est le premier opérateur réellement mondial, avec des marques présentes littéralement sur les cinq continents, de l'Australie à la Suède en passant - entre autres - par l'Afrique du Sud, le Japon, le Mexique, la Chine ou les Etats-Unis. Reste à transformer cette masse d'abonnés en vache à lait, ce qui n'est pas gagné. Le mois dernier, le groupe avait fortement déçu en annonçant une révision à la baisse de ses prévisions de résultat opérationnel en Italie et en Allemagne, deux pays qui génèrent le quart de l'Ebitda du groupe. Les observateurs scruteront donc avec attention les chiffres publiés demain en termes d'évolution de l'ARPU, le chiffre d'affaires moyen par abonné. Un indicateur devenu primordial, faute de croissance nette du portefeuille d'abonnés. Au contraire : en Allemagne, Vodafone D2 a perdu 390.000 clients au premier trimestre. En Bourse, l'action Vodafone n'a évidemment pas échappé au mouvement général de défiance visant le secteur : elle a touché le 7 mai son plus bas niveau en clôture depuis quatre ans, à 95,25 pence, après être tombée à 92,25 en séance. Le titre s'est repris depuis mais reste fragile : il cédait 5,53% en clôture lundi, à 106,75 pence, et accuse encore un recul de 40% depuis le début de l'année. Pour restaurer un tant soit peu son image auprès des investisseurs, Vodafone pourrait donc faire un geste de bonne volonté, soit en étant particulièrement généreux en terme de dividende, soit en annonçant un rachat d'actions important, susceptible de donner un coup de fouet à son cours de Bourse.La question des dépréciations d'actifs ne sera sans doute pas réglée après la publication des comptes 2001-2002. La stagnation du secteur, la lenteur de la consolidation du marché américain et, toujours, le peu d'attrait des marchés financiers pour tout ce qui ressemble de près ou de loin à un téléphone mobile risquent de peser encore longtemps sur les valorisations. De plus, malgré les déconvenues subies, Vodafone ne semble pas déterminé à mettre un terme à sa croissance externe. Il y a dix jours, il a ainsi investi 750 millions de dollars dans China Mobile, portant sa participation dans l'opérateur chinois de 2,18 à 3,27%. Et une éventuelle réorganisation de Vivendi pourrait l'amener à augmenter sa participation dans Cegetel, dont il détient actuellement 15%. Des ambitions qu'il pourrait financer par des cessions d'actifs, notamment Arcor, sa filiale de téléphonie fixe en Allemagne, ou encore les activités non-stratégiques de Japan Telecom.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.