"Les "systémiers" gagnants de la loi de programmation militaire"

La Tribune : Que retenez-vous de la loi de programmation militaire 2003/2008 présentée mercredi en Conseil des ministres ?Agnès Blazy : Un an après le 11 septembre, le climat politique milite en faveur d'un accroissement des dépenses militaires partout dans le monde. Il semble que le gouvernement français a retenu le plus haut niveau de dépense qui a pu être abordé lors des discussions. Ce niveau est supérieur aux dernières estimations : antérieurement, une enveloppe annuelle de base de 13,34 milliards d'euros était prévue. Finalement, ce sera 14,64 milliards par an sur la période 2003/2008. De 1996 à 2002, les dépenses de défense dans le budget français ont diminué de 12,3% à 10,9%. Parallèlement, la part de l'effort militaire dans le PIB a régressé de 2,41% à 1,89% estimé en 2002. La remontée annoncée vient combler ce décrochage temporaire et la tendance commence à se renverser très nettement. Il semble aussi que les intentions de dépenses seront suivies de leur réalisation, ce qui est un net changement.Comment les industries de Défense vont-elles profiter de cette tendance ?Le niveau de dépenses contenu dans la loi, qui doit encore être approuvée par le parlement, est par ailleurs déterminant pour les éventuelles restructurations capitalistiques ultérieures. Empiriquement, l'urgence d'une concentration est moins claire. Des restructurations auraient été inéluctables si aucun inversement de tendance n'avait été amorcé. La hausse du budget français va profiter à l'ensemble de l'industrie, plus particulièrement aux "systémiers" (fabricants d'électronique) comme Thales ou Sagem. Par exemple sur le Charles de Gaulle, Thales avait réalisé un chiffre d'affaires de l'ordre de 100 millions d'euros, et compte en réaliser beaucoup plus avec la construction du second porte-avions. Au contraire, les "plate-formistes" (constructeurs d'appareils) comme EADS ou Dassault ne profiteront pas autant de la nouvelle donne. Les deux valeurs étant également très civiles, l'impact est dilué. Si les budgets européens de défense étaient sortis des contraintes du pacte de stabilité, comme ce fut très brièvement envisagé avant l'été, la valorisation de notre échantillon européen (14 valeurs capitalisant au total 55 milliards d'euros) se rapprocherait de celle de l'échantillon américain (12 valeurs, capitalisant ensemble 160 milliards de dollars) dont le PE 2003 est supérieur de 40%.Propos recueillis par Pierre de Beauvillé
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