Quel avenir pour le Nouveau marché ?

Deux ans et demi en arrière, le Nouveau marché (NM) faisait encore figure d'Eldorado pour les investisseurs. L'indice flirtait avec les 7.500 points et affichait une capitalisation de plus de 50 milliards d'euros. Surtout, il était synonyme de plus-value rapide. Aujourd'hui, avec l'éclatement de la bulle et la récente crise de confiance des investisseurs, bien des choses ont changé. Seules deux introductions ont eu lieu en 2002. L'indice est à ses plus bas sous les 600 points et ne pèse plus que 6 milliards d'euros. Inutile d'ajouter que les volumes d'échanges ne sont plus que l'ombre de ce qu'ils étaient il y a deux ans. Bien sûr, les grands indices ont eux-aussi chuté, tout comme les équivalents étrangers du NM. Mais en France, il est désormais devenu le symbole d'un passé à ne pas rééditer. On peut donc se demander s'il parviendra à retrouver grâce aux yeux des investisseurs. Apparemment, cela nécessitera quelques évolutions...Une taille trop réduite pour les gérantsAux dires des professionnels, certains groupes, offrant bien peu de perspectives, n'ont en effet plus leur place en Bourse. Pour Didier Le Menestrel, de la Financière de l'Echiquier, "il faut laisser faire le marché, le ménage va se faire naturellement avec des dépôts de bilan", comme cela a commencé à se produire. Avoir facilité l'accès à la Bourse à des sociétés qui ont par la suite fait faillite a d'ailleurs été reproché à Euronext. "Il est normal qu'il y ait des échecs industriels, car il ne faut pas oublier que le NM est un marché de sociétés au profil de risque élevé", répond Xavier Leroy, responsable des relations avec les émetteurs chez Euronext.Quelques professionnels préconisent même une solution beaucoup plus radicale que l'attente de faillites. "Il ne faut pas lutter contre l'évidence. Mieux vaut nettoyer volontairement la cote", précise Joëlle Morlet-Selmer, d'Axa Investment Managers, en faisant référence à l'élimination autoritaire des valeurs qui cotent moins d'un euro (celles que les anglo-saxons nomment penny-stocks). Questionné sur le sujet, Euronext est catégorique. "Nous n'avons pas à l'esprit ce type de mécanique. Ce ne serait pas rendre service aux actionnaires", rétorque Xavier Leroy.D'ailleurs, même si elle était adoptée, cette solution ne serait pas suffisante. Car un autre reproche adressé par les gérants est le manque de sociétés de taille. "Certaines sociétés sont intéressantes, mais leur capitalisation est devenue ridicule, déplore Xavier Afresne chez Michaux Gestion. Nous ne pouvons pas opérer de mouvement sur ces valeurs sans influencer les cours. Notre univers d'investissement s'est donc peu à peu réduit et ne comprend plus qu'une vingtaine de valeurs, alors qu'il nous en faudrait au minimum une cinquantaine. Cela a un autre impact négatif. Les pondérations sont fortes et nous devons procéder à des allégements fréquents pour respecter les ratios de gestion". Ce gérant souhaiterait donc des principes d'admissions assouplis afin d'accroître l'offre de titres en intégrant certains groupes en provenance du Marché libre. Mais d'autres s'interrogent purement et simplement sur l'intérêt du NM, considérant que seul 10% de ce marché est actif. D'ailleurs, certains établissements ne proposent pas de fonds spécifiques au NM, mais plutôt des fonds de valeurs moyennes mêlant Nouveau et Second marchés. "Il faudrait quelque chose qui corresponde mieux à la réalité de la gestion. L'idéal serait un rapprochement entre Second et Nouveau marchés, avec un indice de valeurs moyennes élargi. Cela éviterait peut-être que des valeurs pèsent 10% de l'indice", poursuit Joëlle Morlet-Selmer. Pas d'excès de réglementation chez EuronextSur ce point non plus Euronext ne souhaite pas de réforme. Car pour l'opérateur de Bourse, le NM a toujours une vocation qui lui est propre. "En tant que marché au profil de risque élevé, note Xavier Leroy, le vivier principal du NM reste le secteur des nouvelles technologies. Le NM est un relais naturel au capital risque. Mais il faudra dorénavant que les capitaux-risqueurs accompagnent plus longtemps leurs sociétés avant l'introduction en Bourse, pour proposer des sociétés plus matures aux investisseurs".Bref, chez Euronext, il n'est pas question d'intervenir de manière autoritaire. " La problématique est globale, et la réponse à la crise actuelle n'est pas simplement d'ordre réglementaire, et ce d'autant que les réglementations de la COB sont déjà significatives", estime Xavier Leroy. La solution préférée par Euronext reste celle d'une communication accrue, via ses labels Next Economy et Next Prime*. "Avec Next Economy et Next Prime, nous voulons donner de nouveaux outils aux intervenants, poursuit Xavier Leroy. Ces labels, pour les sociétés, sont un moyen d'aller au-delà des investisseurs de proximité, grâce notamment à une communication financière en anglais et aux publications trimestrielles souhaitées par les anglo-saxons."Sur ce point, les gérants restent dubitatifs. "Auparavant les marchés se contentaient de résultats annuels. Le fait d'accroître la fréquence de publication n'a pas amené plus de transparence. Les résultats trimestriels induisent encore plus de volatilité en Bourse et peuvent inciter les sociétés à gérer avec une optique de court terme", craint Joëlle Morlet-Selmer qui reste sceptique sur l'évolution du NM dans les mois à venir. Un rebond controverséCertes, "les quelque 160 valeurs du NM ne se retourneront pas globalement, concède Xavier Leroy. Néanmoins, je pense qu'on peut revenir peu à peu à l'optimisme. Il faut pour cela attendre de voir si la reprise boursière s'installe". Pour lui, le rebond devrait se faire valeur par valeur. C'est pour cela qu'il est important de "capitaliser aujourd'hui sur la communication".Son optimisme est loin d'être partagé par les gérants de fonds. Même s'il apprécie les titres Saveurs de France et Gaudriot, Xavier Afresne constate que dans l'ensemble les valorisations restent élevées. "Le NM est relativement bouché", résume-t-il. Même discours chez Joëlle Morlet-Selmer qui rappelle que "les poids lourds du NM ont déjà bien progressé ces derniers temps, ce qui laisse peu de place pour la suite". La prudence semble donc être devenue le maître mot à l'évocation du NM. D'ailleurs, contrairement à une époque où recueillir les pronostics des observateurs s'apparentait à la profession de commissaire-priseur - avec son fameux 'qui dit mieux?' -, il est aujourd'hui bien difficile d'obtenir une prévision chiffrée pour le NM...Olivier Decarre*Opérationnels depuis le début de l'année, Next Prime et Next Economy sont deux segments qui ont été lancés par Euronext pour accroître la notoriété des valeurs moyennes. En fait, on peut les assimiler à des labels puisque leurs membres doivent répondre à des critères de liquidité et de communication, comme les publications trimestrielles et en anglais. Next Economy est dédié aux valeurs de la nouvelle économie et Next Prime aux secteurs plus traditionnels. En début de mois, Euronext a indiqué que 262 entreprises avaient déjà adhéré à l'un ou l'autre de ces deux segments.Fiche identité du Nouveau marchéCapitalisation: 5,85 milliards d'euros au 04/09/02Nombre de sociétés: 157Performance sur 2002 (au 04/09/02): -45,6%Volumes d'échanges moyens (en juillet 2002): 12,9 millions d'euros par jou
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