Sale temps sur Wall Street

Emblème de la puissance du capitalisme américain, impressionnant building fièrement drapé de la bannière étoilée dans la petite rue de Wall Street dont elle s'est accaparée le nom, le New York Stock Exchange (ou NYSE), institution vieille de quelque 210 ans, ne saurait vaciller à la première critique. Toutefois, sa légitimité et surtout son image ont été sérieusement écornées la semaine passée, à la suite de deux décisions "malencontreuses" prises par le Big Board - littéralement "le grand tableau" comme l'appellent familièrement les financiers yankees - qui l'ont fait apparaître sous un jour somme toute assez peu flatteur. La Bourse de New York a interdit mardi dernier à deux journalistes de la chaîne de télévision en arabe Al-Jazira d'accéder à son "parquet", au motif que la chaîne qatariote avait diffusé des images de soldats américains faits prisonniers, en violation de la Convention de Genève. Une couverture du conflit en Irak qualifiée d'"irresponsable". Un geste imité par le Nasdaq mais violemment dénoncé comme une scandaleuse atteinte à la liberté de la presse. Le prestigieux New York Times s'est notamment fendu d'un titre outragé en "une": "la censure, du patriotisme aux yeux du Big Board." Pour la première place financière du monde, censée montrer l'exemple, ce "patriotisme" fait un peu désordre. Mercredi, c'est le nouveau big boss de la Securities and Exchange Commission - l'équivalent américain de la COB - William Donaldson, accessoirement ancien patron du NYSE, qui s'est lui-même lancé dans une attaque à peine voilée des pratiques de Wall Street, admonestant dans un courrier toutes les places du pays - mais c'est bien la première d'entre elles qui était la cible. "En quoi vos pratiques de gouvernement d'entreprise reflètent-elles celles que vous attendez des sociétés qui sont cotées sur votre marché ?", a-t-il demandé, les appelant en substance à balayer devant leurs portes... Une pique fort à propos après le tollé provoqué par la nomination du patron de Citigroup au conseil d'administration du NYSE. Le président du premier groupe financier mondial, Sandy Weill, a dû céder aux pressions et retirer sa candidature après que le ministre de la justice de l'Etat de New York, Eliot Spitzer, eut crié au scandale : en effet, la firme de Weill a dû accepter de payer 400 millions de dollars en réponse aux accusations de publication de notes d'analyse biaisées. Ce qui faisait incontestablement du patron de Citigroup un représentant pour le moins douteux des intérêts du "public", des investisseurs, au conseil de la Bourse de New York....
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