Les investisseurs finalement satisfaits du triomphe électoral du Kremlin

Finalement, et comme prévu, les marchés accueillent plutôt bien la victoire indiscutable de Vladimir Poutine lors des élections législatives de dimanche. Après avoir ouvert en baisse de près de 3%, les deux indices vedette de la Bourse moscovite se sont repris. En clôture, l'indice RTS calculé en dollars a gagné 0,98% et l'indice Micex calculé en roubles était quasiment à l'équilibre (-0,08%). Et pour enfoncer le clou, le rendement du bon d'Etat russe à trente ans perdait 18 points de base, tandis que le rouble atteignait 29,54 roubles pour un dollar, son plus haut depuis deux ans.En début de séance, les opérateurs s'étaient pourtant inquiétés du résultat des élections. Il faut dire que plusieurs éléments n'étaient pas favorables pour les investisseurs. D'abord, le triomphe du parti du Kremlin, Russie Unie, qui a récolté 37,1% des voix selon les derniers résultats disponibles, pouvait sembler inquiétant en donnant carte blanche au président Poutine et en fragilisant ainsi l'Etat de droit. Surtout, la Bourse semblait inquiète de l'effondrement des partis libéraux, qui ne sont pas parvenus à dépasser la barre qualificative de 5%, et du succès des partis nationalistes. Ces derniers représentent en effet près de 21% de l'électorat si on additionne le score du parti libéral-démocratique (PLDR) du fantasque Vladimir Jirinovski et celui du parti nationaliste de gauche Rodina, qui a obtenu un score inattendu. Russie Unie pourrait alors s'allier à ces formations pour disposer d'une majorité confortable et d'un blanc-seing pour modifier la constitution. Pour négocier cette alliance, le président pourrait faire des concessions à ces partis, notamment sur le plan économique. Or, Rodina, notamment, a fait campagne contre les "oligarques" et les privatisations. Selon un trader de chez Nikoil, beaucoup sur les marchés espéraient que les libéraux restent à la Douma pour faire pendant aux communistes. Ce ne sera pas le cas. Et c'est pourquoi la Bourse ne tombe pas dans un excès d'optimisme."L'absence des partis libéraux à la Douma et la concentration du pouvoir dans les mains d'un seul parti peuvent être vues comme dangereuses à long terme", confirme la société de Bourse russe MDM. Mais dans l'immédiat, ajoute-t-elle aussitôt, "nous voyons ces résultats comme positifs pour le marché, car ils assurent stabilité et prévisibilité" du pays. Finalement, les opérateurs ont rapidement rengainé leurs craintes. Car, comme le rappelle MDM, Rodina a été créé en septembre dernier non sans l'aide du Kremlin, pour aller chasser sur les terres du Parti communiste. Le succès de Rodina serait donc également un succès pour la stratégie du Kremlin et ce parti semble peu susceptible de mettre des bâtons dans les roues de Vladimir Poutine. Quant à Vladimir Jirinovski, chacun sait qu'au-delà des discours, il a toujours été le fidèle allié du pouvoir en place, notamment sous Boris Elstine. A bien y regarder, l'alliance entre Russsie Unie, Rodina et le PLDR ne devrait pas remettre en cause la puissance du Kremlin. Et nombreux sont ceux qui estiment que le président Poutine a désormais les mains libres pour mener à bien sa politique de réformes et d'ouverture économique. Per Brilioth, directeur général d'une banque d'investissement suédoise présente en Russie, se réjouit ainsi que l'issue de l'élection "soit positive pour la conduite des réformes". Et tant pis pour les deux partis libéraux, qui disparaissent de la scène parlementaire russe. Incapables de s'unir, les deux formations paient leur attachement aux "oligarques". Leur défaite pourrait faire au moins deux victimes : Mikhail Khodorkovski et Anatoli Tchoubais. Le premier, grand pourvoyeur de fonds des partis libéraux et du parti communiste, les deux grands perdants du jour, a subi une nouvelle défaite éclatante. Et personne ne parie désormais sur l'avenir de son groupe pétrolier, qui pourrait bien finir soit démantelé, soit entre les mains de Sibneft et de son intrigant président Roman Abramovitch. Quant au président du monopole électrique russe UES, Anatoli Tchoubais (lire ci-contre), il est désormais sur un siège éjectable. L'homme était en effet le chef de file du SPS qui n'a recueilli que 3,7% des voix dimanche. Sa position est d'autant plus difficile qu'UES est détenu encore majoritairement par l'Etat. Le titre de la société de services aux collectivités russe perdait d'ailleurs 2,7% en clôture à Moscou.Le résultat définitif des élections (la totalité des voix étant dépouillées)Russie Unie 37,1% des voix, 222 siègesParti Communiste de Russie 12,7% des voix, 53 siègesPLDR 11,6% des voix, 38 siègesRodina 9,1% des voix, 29 siègesIndépendants 65 siègesNB : les 450 sièges de la Douma sont attribués pour moitié à la proportionnelle au scrutin de liste et pour moitié au scrutin majoritaire dans des circonscriptions individuelles.
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