La Banque d'Angleterre baisse ses taux, la BCE temporise

Deux banques centrales et deux réactions différentes à la conjoncture économique. D'un côté, la Banque d'Angleterre (BoE) qui vient de prendre à contre-pied les marchés. A l'issue de la réunion de son Comité de politique monétaire, la BoE a décidé de réduire son taux de base d'un quart de point, le faisant passer de 4 à 3,75%. Une telle mesure n'était absolument pas anticipée. Selon une enquête effectuée par Reuters, la totalité des 28 économistes interrogés prévoyaient un statu quo.De l'autre côté, la Banque centrale européenne (BCE). Cette dernière, conformément aux attentes, a maintenu inchangé à 2,75% son principal taux directeur. Le loyer de l'argent est à ce niveau dans la zone euro depuis le 5 décembre, date à laquelle il avait été réduit d'un demi-point.Dans ces conditions, il serait facile d'accuser l'institut francfortois de manquer de réactivité, au contraire de sa consoeur britannique. Mais ce serait faire un mauvais procès à la BCE car on peut rappeler que la BoE n'avait plus assoupli sa politique monétaire depuis novembre 2001. La banque centrale britannique a expliqué sa décision par les inquiétudes sur l'économie mondiale et la mauvaise tenue actuelle des marchés boursiers. Elle souligne que les perspectives de la demande sont plutôt plus faibles que précédemment. Dès lors, estime la BoE, une baisse des taux était nécessaire pour maintenir l'inflation sur les rails à un horizon de deux ans. Selon Caroline Gaye, économiste chez CDC-Ixis, cette décision peut être comprise comme la volonté de la BoE de "doper la confiance, dans le but d'éviter une chute brutale de la croissance au Royaume-Uni".A l'inverse, à Francfort, Wim Duisenberg, le président de la BCE, indique, pour justifier le statu quo décidé cet après-midi, que "le niveau des taux d'intérêt de la Banque centrale européenne est "approprié" pour maintenir la stabilité des prix à moyen terme en zone euro, ajoutant qu'une baisse aujourd'hui aurait pu se révéler inefficace. Mais les gardiens de l'euro ouvrent très largement la porte à une baisse des taux dans un avenir proche, soit en mars, soit en avril... Wim Duisenberg ne peut pas être plus clair quand il déclare que l'"incertitude" concernant le caractère approprié du niveau des taux d'intérêt a "augmenté". Ces interrogations sont nourries par la morosité de la conjoncture économique, notamment en Allemagne, et bien sûr par les risques de guerre en Irak. Et même si la BCE table toujours sur une accélération de la croissance au cours de 2003, elle admet que les risques de détérioration de la croissance ont augmenté depuis le mois de décembre. La Commission europénne ne démentira pas ce diagnostic puisque Bruxelles n'exclut pas que la croissance de la zone euro s'inscrive en baisse au premier trimestre de cette année. Concernant la maîtrise de l'inflation, la BCE réitère son pronostic selon lequel la hausse des prix repasserait en-dessous de son objectif plafond de 2% durant 2003. Les derniers chiffres publiés par Eurostat ont montré un certain assagissement des prix en janvier à 2,1% (contre 2,3% en décembre) mais les incertitudes liées aux développements de la crise irakienne pèsent sur ces prévisions. Dans ce contexte de faible visibilité, la BCE semble donc préfèrer se ménager encore une marge de manoeuvre et ne pas brûler toutes ses cartouches trop rapidement.Wim Duisenberg préoccupé par sa succession.Le président de la BCE doit en principe quitter son poste le 9 juillet prochain et regrette que le processus qui doit mener à la désignation officielle de son remplaçant s'éternise. Et pour cause. Successeur annoncé, le Français Jean-Claude Trichet comparaît actuellement dans le procès organisé sur les comptes du Crédit Lyonnais. Hier, le ministère public a requis une peine de 10 mois de prison avec sursis à son encontre. Si le procureur était suivi par le tribunal, les chances de voir le gouverneur de la Banque de France s'asseoir dans le fauteuil de Wim Duisenberg s'amenuiseraient fortement.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.