Non suédois, échec mexicain

Pourquoi les Suédois auraient-ils dû vouloir adopter la monnaie unique européenne ? Pour faire aussi bien que la France et l'Allemagne sur le plan économique ? La Suède affiche un taux de chômage de l'ordre de 5%, un taux de croissance de l'ordre de 2% et un budget en excédent, merci pour elle.Mais ce ne sont pas les arguments économiques qui l'ont emporté. A leur très large majorité, les milieux économiques, les patrons suédois étaient en faveur de l'euro. Carl-Henric Svanberg, le patron de LM Ericsson, ne cache pas que les conséquences à long terme du non l'inquiètent. Ce que les Suédois ont exprimé, c'est le refus de ne plus être complètement maîtres de leur destin. Ou à tout le moins le refus de confier leurs intérêts à des pays et des institutions envers lesquelles ils n'avaient pas une confiance suffisante.C'est exactement la même raison qui a poussé les pays en développement à exulter à l'annonce de l'échec des négociations de Cancun. Les méthodes de travail de l'OMC leur ont donné l'impression d'être des laissés pour compte. Ils ne pouvaient laisser passer l'occasion de dénoncer ce qu'il perçoivent comme le double discours des Etats-Unis et de l'Europe - d'un côté, on prétend vouloir les aider ; de l'autre, on subventionne massivement l'agriculture ou on refuse (jusqu'à un accord très récent) l'accès aux médicaments génériques.Alors les "pays pauvres" sont venus "la tête haute", comme le dit le président brésilien Lula. Ils sont repartis sans rien, sinon l'impression que, pour une fois, leur message avait été entendu.Cela demeure la différence fondamentale entre le non suèdois et l'échec mexicain. Le premier éclaire certes d'un jour peu flatteur la zone euro, ses travers et ses piètres performances économiques mais il ne remet fondamentalement en cause ni son existence ni la solidité de sa monnaie.Il en va tout autrement sur le front du commerce international. L'OMC n'a d'autre choix que de revoir profondément sa copie, que d'apprendre à rapprocher l'intérêt des plus grandes puissances économiques, des pays en développement et de ceux qui se trouvent quelque part entre les deux. Le statu quo ante n'est pas une option.Après avoir dit non, les Suèdois peuvent en retourner à leur splendide isolement sans faire de vague. Après leur coup d'éclat à Cancun, les pays en développement sont dans l'obligation vitale de pousser leur avantage. La crise est ouverte. Les négociations commerciales multilatérales ne peuvent réussir qu'avec eux, ils l'ont prouvé. Le temps de la protestation s'achève, celui des négociations commence. C'est assurément le plus difficile.
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