Un Chinois dans l'espace

Il serait facile de se gausser de l' "exploit technologique". Il intervient en effet... quarante-deux ans après que Russes (Youri Gagarine, le 12 avril 1961) et Américains (Alan Shepard, le 5 mai de la même année) aient inauguré les séjours de l'homme dans l'espace. En outre, le triomphe de la technologie chinoise repose sur... une aide substantielle de la Russie. On dit le "Shenzou V" (Divin Vaisseau 5) largement inspiré du design du Soyouz. Le vivier de 14 astronautes dont est issu l'heureux élu - toujours anonyme - de demain a fait ses classes dans la célèbre Cité des Etoiles. C'est là également que des médecins venus de Chine se sont familiarisés avec les particularités de la médecine spatiale.La fascination que parait éprouver la Chine pour les légumes issus de graines transportées dans l'espace a été elle aussi, ces derniers jours, source de dérision. Plusieurs quotidiens américains ont relayé les descriptions dans la presse chinoise d'une "aubergine (qui) peut nourrir une famille pendant deux jours" ou encore de concombres de près d'un mètre de long "au meilleur goût et plus résistants à la maladie." Selon le Wall Street Journal, la Chine disposerait de 280 variétés de graines ayant séjourné dans l'espace.Il n'empêche. Ce n'est pas à la légère que la Chine dépense chaque année deux milliards de dollars dans son programme spatial (contre 15 milliards pour la Nasa).Il en va, d'abord, du prestige du parti et de ses dirigeants auprès du peuple... qui va avoir le plaisir de voir sur la télévision d'Etat une série en vingt épisodes sur la conquête de l'espace, et est abreuvé chaque jour par la presse de louanges sur l'exploit imminent.Il est aussi question d'adresser un message au reste du monde. Le Japon l'a reçu cinq sur cinq, évoquant explicitement les avancées chinoises pour justifier la fusion de ses trois agences spatiales. La Nasa y trouvera une raison supplémentaire de relancer au plus vite ses propres vols habités après la tragique disparition de la navette Columbia en février dernier.Les incidences économiques de la conquête de l'espace sont loin d'être nulles, et la Chine en sait quelque chose, après avoir lancé quelque 77 satellites depuis 1970. Ses capacités en termes de communication ou encore de météorologie, entre autres, en sont considérablement améliorées.En outre, les experts sont unanimes à dresser ce constat : ce vol habité n'est qu'une étape. La suite ? La Chine pourrait choisir de se doter de sa propre station spatiale. Elle parait prête à se lancer à la conquête de la Lune pour en exploiter les richesses minérales, en particulier l'hélium-3. Les implications militaires sont naturellement nombreuses et potentiellement gigantesques, à commencer par la possible neutralisation du bouclier antimissiles dont George W. Bush veut doter l'Amérique.Le modeste et bref séjour en orbite que s'apprête à effectuer un astronaute chinois est un message clair que le reste du monde doit se garder d'ignorer : la Chine sera un acteur majeur et déterminé de la conquête de l'espace.
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