La consolidation n'a encore pas eu lieu

Les pronostics ont évidemment ceci de périlleux que leur véracité dépend très rarement de la conviction avec laquelle on les assène. A la décharge de ceux qui s'y sont risqués à leur sujet, la situation financière des grands équipementiers télécoms paraissait si désespérée il y a un an que le bon sens commandait de s'attendre à une consolidation autour d'un nombre plus réduit d'acteurs. Ce mouvement n'était certes pas favorisé par la déprime des marchés financiers. Mais, la consolidation aurait aussi bien pu intervenir par le biais de faillites. Pourtant, force est de constater que le marché continue de se structurer autour du même nombre d'acteurs qu'avant. Et même davantage, sur certains segments comme les terminaux mobiles. En 2001, l'échec de la fusion entre Alcatel et Lucent a jeté un froid sur les velléités d'alliance à grande échelle. Mais, surtout, les équipementiers se sont employés à sauver leur peau à coup de restructurations géantes faites d'abandons de lignes entières de produits, de recentrage sur des secteurs à valeur ajoutée, le tout étant extrêmement coûteux en emplois. Pour Alcatel, Lucent et Nortel, trois grands généralistes du secteur, la cure d'amaigrissement a été drastique. Le britannique Marconi est tombé dans le gouffre mais après une période d'apnée, l'entreprise a refait surface. Côté réseaux mobiles, Nokia, Ericsson et Motorola ont bu la tasse à des degrés divers, enregistrant des reculs parfois sévères de leur activité, mais les restructurations ont également permis de réduire la voilure en attendant des jours meilleurs. Ils sont donc tous là, encore fragiles pour certains, mais se déclarant tous prêts à mordre dans le moindre morceau de reprise. Une alliance opportune avec Siemens a par exemple permis au japonais NEC de pénétrer le marché européens des infrastructures mobiles. Le paradoxe est encore plus saisissant si l'on compte les équipementiers chinois puissants en Asie comme Huawei : le secteur paraît encore plus morcelé qu'avant, alors même que la demande n'est pas énorme. Les fabricants de terminaux mobiles sont, eux aussi, plus nombreux qu'il y a deux ans. Sony et Ericsson ont certes fait cause commune. Mais, aux côtés du poids lourds Nokia et de ses challengers Siemens et Motorola, Alcatel et Philips que l'on disait sur le point de jeter l'éponge font toujours des volumes significatifs. Marginal il y a trois ans, Samsung a pris une dimension mondiale avec des produits innovants. Et que dire de l'autre coréen LG qui imite son compatriote en introduisant l'approche d'un fabricant d'électronique grand public ? Il n'est évidemment pas question de tomber dans le piège du pronostic en affirmant que cette situation particulière va durer. En revanche, au-delà de la leçon d'humilité que recèle ce pied de nez à la logique, il n'est pas interdit de penser que les grandes bagarres qui s'annoncent autour de nouvelles technologies comme l'UMTS, le Wifi et les réseaux fixes à haut débit vont occasionner de nouveaux bouleversements dans les hiérarchies. A ce petit jeu, les moins en vue pourraient cette fois ne pas se remettre de revers qui s'ajouteraient à la fragilité héritée de l'explosion de la bulle. A moins que l'histoire récente ne se répète, déjouant même ce qui ne se veut pas un pronostic.
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