Le prix du déficit

Car il y a bien plus grave, plus urgent que la possible sanction européenne. La dégradation des comptes publics est avant tout un symptôme.Symptôme, d'abord, de l'effondrement de la croissance. Il choque par sa brutalité. En 2003, le PIB peinera à progresser de plus de 0,5%. Il manque déjà plus de 7 milliards d'euros à Bercy par rapport aux recettes fiscales attendues. Dans ce contexte, le Premier ministre a choisi d'afficher l'ampleur des dégâts et d'en assumer les conséquences : la priorité étant au retour de la croissance, le retour en deçà d'un déficit de 3% du PIB attendra 2006, a-t-il fait savoir la semaine passée à la Commission de Bruxelles.Symptôme, ensuite, du trou de plus en plus béant de la Sécu, dont le solde entre dans le calcul des déficits publics tels que définis par les traités européens. Avec des comptes dans le rouge pour plus de dix milliards d'euros cette année, l'assurance maladie française n'a plus les moyens de ses ambitions.Le déficit public de la France est enfin le résultat d'un choix politique : celui de poursuivre, coûte que coûte, la baisse des impôts. Celle-ci est nécessaire à la reprise, assurent ses partisans. L'interrompre ne serait-ce que provisoirement serait en ruiner la crédibilité.La théorie sera assurément débattue. Elle l'est d'ailleurs déjà, et pas seulement de ce côté de l'Atlantique : on se souvient que les 674 milliards de dollars de baisses d'impôts promises par George W. Bush au début de l'année lui ont valu une lettre dénonçant l'inefficacité de la mesure, signée de dix prix Nobel d'économie.Vouloir redresser avec vigueur les comptes publics en période de contraction de l'activité serait assurément dommageable. Mais le déficit a un prix. C'est une dette, qu'il faut rembourser tôt ou tard. C'est un motif de tension politique forte au sein d'une Union Européenne dont les meilleurs élèves n'entendent pas laisser les plus puissantes économies s'affranchir des règles communes sans réagir. Or l'Allemagne, avec un déficit de 3,8% du PIB en 2003, est logée à la même enseigne que la France.L'amende européenne, telle que définie par l'article 104 du traité d'Amsterdam, demeure une arme lointaine, ultime et hypothétique. Le gouvernement peut s'en affranchir pour le moment. Sans oublier toutefois que la réduction du déficit sera, en temps voulu, dans l'intérêt de tous.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.