L'OPA d'Alcan sur Pechiney convainc les marchés

La mode est aux OPA hostiles. Après le secteur du logiciel avec l'offre d'Oracle sur PeopleSoft, c'est au tour de l'aluminium d'être touché. Alcan, le deuxième producteur mondial d'aluminium, a lancé lundi matin une offre publique d'achat sur son concurrent français, Pechiney. Plutôt qu'une OPA au sens strict, il s'agit en fait d'une offre mixte. Pour se payer son rival, Alcan propose un prix de 123 euros en numéraire plus 3 titres Alcan pour 5 actions Pechiney. Deux autres solutions sont aussi proposées: un paiement de 41 euros pour chaque action Pechiney ou encore l'échange de trois titres Alcan pour deux titres Pechiney.Selon les cours de clôture de vendredi soir, cette offre représente une prime de 20,5% sur le dernier cours et de 50,45% sur la moyenne des deux derniers mois. En tout, la proposition d'Alcan évalue Pechiney à 3,38 milliards d'euros. Quant à Alcan, l'entreprise valait 11,2 milliards de dollars vendredi soir à la Bourse de New York.Le groupe canadien estime que l'opération pourrait être bouclée d'ici quatre ou cinq mois. Il assure également qu'un rapprochement des deux groupes permettrait des économies annuelles de l'ordre de 250 millions de dollars. Sur la base des données de 2002, il pèserait 24 milliards de dollars de chiffre d'affaires, dont 44% en Europe et 34% en Amérique du Nord.Reste enfin à savoir si les autorités de la concurrence autoriseront un tel rapprochement, alors que la Commission européenne avait déjà bloqué en 1999 un projet de fusion entre Alcan, Pechiney et le Suisse Algroup. Alcan dit avoir d'ores et déjà pris contact avec la Commission en vue de "cessions, scissions ou autres formes de désinvestissement" en Europe. Une démarche qui, aux yeux de certains opérateurs, devrait grandement faciliter le succès de l'opération. Bref, les Canadiens semblent avoir tout prévu et "ont l'air vraiment sûrs d'eux", résume, selon l'AFP, un analyste qui a assisté à la conférence de présentation.Toutefois, Alcan va devoir faire face à quelques obstacles. D'abord, selon Athmane Benzerroug, analyste chez Aurel-Leven, les cessions à effectuer seront probablement plus importantes que prévu (voir interview ci-contre). Et surtout, s'il veut que son projet soit facilité, Alcan devra séduire Pechiney. Car pour l'heure, les dirigeants du groupe français sont loin de se montrer enthousiastes. Ils estiment que l'offre d'Alcan est "inamicale" et assurent ne pas avoir été consultés par le Canadien. En tout état de cause, Pechiney juge que cette proposition "sous-évalue très significativement la valeur économique et stratégique" de l'entreprise. Dans les prochains jours, Pechiney examinera de plus près cette offre au regard "de la valeur stratégique de Pechiney dans une perspective industrielle et de la création de valeur pour ses actionnaires."Pour les analystes, les chances de voir Alcan relever son offre restent toutefois bien minces. Alors qu'Aurel-Leven juge le prix "correct", l'analyste contacté par l'AFP pense que Pechiney devra accepter le projet du Canadien. Pechiney "proteste pour la forme, et peut-être qu'Alcan fera un petit geste en relevant son offre, mais avec une direction qui restera en place et un outil pratiquement sauvegardé, je pense que Pechiney finira par accepter", estime-t-il. Il est vrai que la direction a peu de marge de manoeuvre face à un groupe qui a semble-t-il voulu mettre toutes les chances de son côté. Ainsi, Alcan a notamment annoncé qu'il n'y aurait pas de réductions d'effectifs autres que celles déjà prévues par Pechiney.A la Bourse de Paris, alors que le groupe AGF, actionnaire de Pechiney, a d'ores et déjà indiqué qu'il examinait la situation, l'action de l'industriel bondit fort logiquement. En gagnant plus de 23%, elle termine à 42 euros, un niveau qu'elle n'avait plus atteint depuis septembre dernier. Les titres de la firme avaient déjà touché un plus haut depuis six mois la semaine dernière, bénéficiant de rumeurs d'OPA.A l'inverse, même si Alcan a déclaré que son financement était "déjà disponible" et que l'incidence sur sa situation financière serait maîtrisé, son action souffre. A Wall Street, elle lâche 2,54%, à 30,66 dollars.
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