La FCC à la relance

Les Américains sont de grands pragmatiques, on ne le répétera jamais assez. Au pays du dollar et du marché roi, les pouvoirs publics interviennent fréquemment pour voler au secours de fleurons de l'industrie américaine menacées par une mauvaise conjoncture. Cela fut le cas avec Boeing, plusieurs fois soutenu à bout de bras par les commandes militaires du Pentagone. Plus récemment encore, la guerre des prix de l'acier n'était rien d'autre qu'une tentative de venir en aide à une industrie US en difficulté.Or, s'il est un secteur qui a bu la tasse outre Atlantique, c'est bien celui des télécommunications. Et comme les perspectives ne s'annoncent guère enthousiasmantes, les pouvoirs publics, Federal Communications Commission (FCC) en tête, sont en train de concocter pour la mi-février un aménagement des règles de concurrence qui devrait être une bouffée d'air frais pour de nombreuses entreprises à bout de souffle du secteur. Selon des fuites parues début janvier dans la presse et confirmées depuis à demi-mot de source officielle, la FCC pourrait cesser d'imposer aux opérateurs locaux, les "baby bells" issus du démantèlement d'AT&T, de louer leurs réseaux à leurs concurrents à des tarifs préférentiels. Aucune décision n'a encore été prise, mais le lobbying des "baby bells" comme Verizon, SBC ou BellSouth paraît avoir porté ses fruits. Si une telle réforme entrait en vigueur, ces opérateurs locaux - qui s'aventurent de plus en plus sur le segment des appels longue distance - se retrouveraient soulagés de charges qui les rendaient jusqu'ici vulnérables aux offensives de concurrents comme AT&T, Sprint ou WorldCom.A cette occasion, le marché américain des télécoms connaîtrait une redistribution des cartes potentiellement bénéfique pour plusieurs acteurs du secteur. Les "baby bells" verraient ainsi se relâcher une certaines pression concurrentielle sur les marchés locaux, au moins pour quelque temps. Ce qui n'est jamais une mauvaise chose pour redresser la rentabilité. Mais l'affaire serait surtout un grand coup de pouce donné aux fabricants d'équipements, au premier rang desquels les nord-américains Lucent et Nortel, mais aussi Alcatel.Mettre fin aux conditions préférentielles de location des réseaux locaux, c'est en effet clairement inciter les concurrents des "baby bells" à investir dans leurs propres infrastructures. Pour poursuivre leur activité sur le segment local, les opérateurs longue distance vont donc devoir investir significativement. Et, ne restant pas en reste, les "baby bells" pourraient également investir plus massivement en n'ayant plus l'impression de travailler pour leurs concurrents. Même si les incertitudes restent grandes sur l'issue du débat au sein de la FCC et des risques de recours légaux contre un tel assouplissement des règles, ces perspectives donnent en tout cas matière à plusieurs groupes américains de se frotter les mains. Et qu'importe si la concurrence voulue par le Telecom Act de 1996 s'en retrouverait amoindrie. Les pouvoirs publics américains ont régulièrement démontré que les grands principes libéraux ne valent rien sans une industrie forte et que la sauvegarde de cette dernière peut souffrir de quelques entorses. Pragmatiques on vous dit...
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