Le dossier Air Lib transmis à la justice

Quasiment quatre mois jour pour jour après sa liquidation judiciaire, Air Lib revient sur le devant de la scène. La commission d'enquête de l'Assemblée nationale chargée de déterminer les causes économiques et financières qui ont conduit à la mort de la compagnie a terminé son travail. Et son rapport, très critique envers les dirigeants d'Air Lib et notamment l'ex-PDG Jean-Charles Corbet, va atterrir prochainement dans les mains de la justice. En effet, la commission estime qu'au moins un des faits découverts au cours de ses investigations "pourrait être constitutif d'abus de bien social". Dans ces conditions, le rapport va être transmis au procureur de la République.Si dans son rapport la commission n'épargne ni le gouvernement socialiste de l'époque, ni le tribunal de commerce de Créteil, c'est surtout l'équipe dirigeante d'Air Lib qui focalise les griefs. A l'occasion de la reprise de l'entreprise, les ex-dirigeants de la compagnie sont accusés de s'être "fortement enrichis", alors même que la compagnie a accumulé un passif de 130 millions d'euros, et d'avoir mené une gestion "opaque". Parmi les faits dénoncés par le rapport figure "le versement de certaines primes, notamment la prime d'arrivée de M. Jean-Charles Corbet".L'ex-compagnie AOM-Air Liberté, rebaptisée Air Lib par la suite, avait été reprise le 27 juillet 2001 par la société Holco de Jean-Charles Corbet. Entre août et décembre 2001, ce dernier a touché 1,34 million d'euros bruts, dont une prime d'arrivée de 855.904 euros. La commission parlementaire note que "les premiers actes de gestion d'Holco (...) ont consisté dans l'octroi de rémunérations à l'équipe de reprise. Les montants en cause et la rapidité de leur versement jettent un doute sur les motivations de tous ceux qui avaient été membres de l'équipe de reprise". Au total, du 1er août 2001 au 31 décembre 2002, les dirigeants d'Holco, leurs avocats et leurs banques conseils ont touché près de 29,55 millions d'euros, une somme que le rapport rapproche des 30,5 millions d'euros prêtés par l'Etat à Air Lib en janvier 2002. Pour ce qui est de l'action du gouvernement Jospin, la commission parlementaire souligne qu'il a "pris le risque de s'engager dans un soutien abusif en acceptant que l'Etat devienne le banquier d'une entreprise dont la situation apparaissait irrémédiablement compromise". Quant au tribunal de commerce, le rapport estime qu'il "est permis de penser que le tribunal a fait preuve d'une certaine légèreté dans le choix de Jean-Charles Corbet (...). A l'évidence, cette décision soulageait bien des acteurs du dossier, qu'il s'agisse du gouvernement (...) ou d'Air France, dont le rôle dans l'élaboration du projet de reprise apparaît plus qu'ambigu", selon le rapport.Outre les conséquences pénales éventuelles de cette affaire, l'ex-direction d'Air Lib pourrait avoir à répondre également sur le plan civil. La commission parlementaire estime en effet que Jean-Charles Corbet pourrait être appelé en comblement de passif. "Le tribunal de commerce pourrait décider d'étendre la liquidation judiciaire d'Air Lib à d'autres filiales d'Holco", ajoute le texte. En outre "le tribunal pourrait ouvrir une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de tout dirigeant" qui aurait poursuivi "abusivement" une exploitation déficitaire ne pouvant conduire qu'au dépôt de bilan, selon le rapport. La disparition d'Air Lib a entraîné 3.200 licenciements.
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