Air Canada, dernière victime de la crise du transport aérien

Par latribune.fr  |   |  660  mots
Dépôt de bilan et changement de modèle économique: Air Canada traverse une période cruciale de son histoire. Premier transporteur canadien et onzième compagnie mondiale, l'entreprise qui emploie 40.000 personnes vient de se placer sous la protection de la "Loi sur les arrangements avec les créanciers", l'équivalent canadien du Chapitre 11 américain. Grâce à cette protection judiciaire, Air Canada bénéficie d'un délai courant jusqu'au 1er mai inclus afin de restructurer sa dette estimée à 13 milliards de dollars canadiens (8,1 milliards d'euros). Durant cette période, les appareils de la compagnie pourront continuer à voler. D'ores et déjà, Air Canada a fait savoir qu'il avait obtenu d'un de ses principaux créanciers, à savoir General Electric Capital Canada, une ligne de crédit de 1,05 milliard de dollars canadiens.Air Canada avait pourtant tenté d'anticiper les effets du conflit avec l'Irak. Dès le déclenchement de la guerre, la compagnie avait annoncé la suppression de 3.600 emplois. Cette cure d'amaigrissement s'avère aujourd'hui insuffisante et d'autres mesures devraient être annoncées dans les semaines à venir. En effet, au-delà de la crise de liquidités que doit résoudre la direction de l'entreprise, c'est l'ensemble du positionnement d'Air Canada qui est remis en cause. Sur ce point, Robert Milton a été très clair. Selon le PDG de la compagnie, "notre modèle de transporteur a volé en éclats et il n'est plus possible de recoller les morceaux. Air Canada et ses employés doivent adopter une culture différente et nouvelle façon de faire des affaires".La compagnie aérienne entend procéder à des coupes claires dans ses coûts de main d'oeuvre et réduire sa flotte (actuellement 357 appareils) pour se concentrer sur des avions plus petits, de type jets régionaux, ce qui lui permettra d'améliorer son taux de remplissage. Et derrière ces options stratégiques, c'est le profil d'une compagnie à bas prix qui se dessine.La révolution qui va être mise en oeuvre au sein d'Air Canada résulte très clairement de la crise que traverse depuis deux ans l'ensemble du secteur aérien et notamment les compagnies nord-américaines. Symbole de cette déconfiture, American Airlines, première compagnie aérienne mondiale, qui vient d'échapper in-extremis au chapitre 11 grâce à des accords draconiens sur les réductions de coûts arrachés aux syndicats (lire ci-contre). Pour Air Canada comme pour les autres compagnies, la guerre en Irak n'a fait qu'aggraver la baisse du trafic provoquée par les attentats du 11 septembre 2001. A ces éléments exceptionnels, il faut ajouter d'autres facteurs pénalisant pour le secteur comme le ralentissement de l'économie mondiale, la hausse des prix du carburant et dernièrement l'épidémie de pneumonie atypique. Le Canada, avec 151 malades et 6 décès, est le pays non asiatique le plus touché par cette nouvelle maladie.Aux Etats-Unis, les compagnies aériennes vont pouvoir bénéficier d'un ballon d'oxygène. Les commissions budgétaires de la Chambre des représentants et du Sénat ont approuvé une aide fédérale de plus de 3 milliards de dollars. Cette enveloppe est destinée à permettre aux compagnies de faire face aux contrecoups de la guerre en Irak qui a entraîné une chute du trafic et des réservations. L'Europe n'est pas épargnée par ces turbulences. Hier, l'Association européenne des compagnies aériennes (AEA) indiquait que lors de la première semaine de la guerre, le trafic des compagnies aériennes avait plongé de plus de 12%. Les chiffres de la deuxième semaine devraient être encore pires dans la mesure où vont s'ajouteront les effets de la pneumonie atypique. Dans ce contexte, les annonces de réductions de capacité et de suppressions de postes se multiplient. Attaqués par les "low cost" sur le court et moyen courrier, les majors du secteur doivent se restructurer en profondeur. La survie est à ce prix...