Bagdad tombe, le régime irakien s'effondre

Les événements se sont accélérés de façon vertigineuse ce mercredi en Irak: c'est finalement avec une facilité déconcertante que les troupes américaines ont pris en quelques heures le contrôle de Bagdad. Alors que toute forme de résistance organisée semble avoir disparu, ainsi que tout signe d'existence du régime de Saddam Hussein, la population, se sentant enfin libérée de l'emprise de ce dernier, est descendue dans les rues pour accueillir les soldats américains, fêter sa libération, détruire les statues du dictateur et se livrer au pillage.Sans vouloir pavoiser trop hâtivement, le commandement américain a affirmé mercredi soir que les forces de la coalition ont défait l'armée irakienne et pris le contrôle de la plus grande partie de Bagdad. Mais les combats se poursuivent, a-t-il ajouté aussitôt.Tout au long de la journée, l'armée américaine a conforté son emprise sur de nombreux quartiers de la capitale, où elle a été accueillie par des manifestations de joie. En début d'après-midi, les chars et les blindés américains sont arrivés en plein centre ville, notamment place Ferdaous, devant l'hôtel Palestine où se trouve la presse internationale. Les soldats y ont aidé la population irakienne à renverser la statue de Saddam Hussein qui dominait la place. Les forces américaines bénéficient enfin de l'accueil enthousiaste qu'elles espéraient depuis le début de la guerre de la part des populations opprimées pendant de longues années par le régime de Saddam Hussein. Mercredi matin, des centaines d'Irakiens se sont ainsi précipités vers les transports de troupes américains en applaudissant et en scandant "Good, Good, Bush!" à Hababiyah, un quartier du nord de Bagdad, à trois kilomètres du centre de la ville, selon les journalistes de l'AFP présents sur place, qui ont vu des Marines, à bord de sept transports de troupes, saluer la foule alors que des Irakiens déchiraient un portrait géant de Saddam Hussein. Des scènes similaires ont été observées progressivement dans toute la capitale, ainsi qu'à Saddam City, l'immense banlieue chiite de la ville, objet d'implacables répressions ces dernières années. Dans tous ces quartiers, les hommes de Saddam Hussein - soldats ou miliciens - semblent s'être évaporés, parfois chassés par les habitants eux-mêmes.Corollaire de ces explosions de joie, des scènes de pillage sont signalées un peu partout. A Saddam City, par exemple, selon des témoins, les habitants ont pénétré dans des commerces et des appartements pour y voler des meubles et de la nourriture. Les habitants de cette banlieue auraient chassé les combattants fidèles au régime avant même l'entrée des troupes américaines dans ce secteur dans la nuit de mardi à mercredi. Au 20ème jour de la guerre, les troupes de la coalition ont donc parachevé leur prise de contrôle de Bagdad, qu'ils ont commencé à investir le week-end dernier. L'encerclement de la capitale a également été complété. Le Commandement central a annoncé que les troupes américaines avaient pris le contrôle de l'aéroport militaire al-Rachid, au sud-est de Bagdad. Durant tous ces événements, il semble que l'opposition organisée ait virtuellement disparu. Selon un responsable américain, seules des forces irrégulières continuent à se battre du côté irakien, dont les Fedayin de Saddam, un corps paramilitaire dirigé par Oudaï Saddam Hussein, le fils aîné du président irakien, et les miliciens du parti Baas au pouvoir. En outre, certains membres de la Garde républicaine spéciale de Saddam Hussein résistent, habillés en civil. L'armée régulière a en revanche été défaite. Bombardements sur TikritDans le reste du pays, les forces américano-kurdes ont également réalisé une importante percée vers Mossoul en prenant dans la nuit de mardi à mercredi le contrôle des montagnes de Maqlub qui dominent la ville pétrolière à une quinzaine de kilomètres, a indiqué un haut responsable du PDK. "La nuit dernière, lors de mouvements conjoints, les forces spéciales américaines et les peshmergas (combattants kurdes) ont pris le contrôle des montagnes de Maqlub qui sont stratégiquement les plus importantes surplombant Mossoul", a affirmé le porte-parole du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), Hoshyar Zebari. Le Kurdistan s'est joint à la liesse qui s'est emparée de Bagdad. Des dizaines de milliers de Kurdes sont descendus dans les rues des villes de la région pour exprimer dans une allégresse contenue pendant des années leur reconnaissance au président américain George W. Bush après la prise de la capitale. A Souleimaniyah, les Kurdes, victimes de terribles campagnes de répression ordonnées par Saddam Hussein, ont réservé un accueil triomphal à une dizaine de membres des unités spéciales américaines, jusqu'alors très discrets et sortis exceptionnellement de leur base à l'entrée de la ville. "Je les ai embrassés, je les ai embrassés", s'exclamait les larmes aux yeux Mahmoud Kerim, 45 ans, "et j'embrasse les mains, les pieds de George W. Bush", ajoutait-il avant de distribuer les baisers à la ronde, selon les récits des journalistes de l'AFP. Les forces américaines maintiennent par ailleurs la pression sur Tikrit, au nord de Bagdad, soumise à d'intenses bombardements. Selon différentes informations, de nombreux dignitaires du régime se seraient réfugiés dans la ville natale du président irakien, leur dernier bastion. Au sud, enfin, les forces britanniques qui ont pris le contrôle de Bassorah, la seconde ville irakienne, estiment avoir encore besoin de "quelques jours avant de pouvoir la déclarer sécurisée".Pas de nouvelle de Saddam HusseinL'incertitude prévaut toujours au sujet du sort de Saddam Hussein. Le Pentagone a qualifié de "très efficace" le bombardement ayant pulvérisé lundi un immeuble du quartier résidentiel d'al-Mansour, où il pensait avoir localisé le chef de l'Etat irakien et ses deux fils, Oudaï et Qoussaï. Quatorze civils ont été tués dans ce bombardement, mais la présence du raïs et de ses enfants parmi les victimes n'est pas établie, loin de là. "Je ne sais pas si (Saddam Hussein) a survécu" aux derniers bombardements "mais je sais qu'il est en train de perdre son pouvoir", a déclaré mardi le président George W. Bush. Selon des médias britanniques, les services de renseignement de Grande-Bretagne estiment que Saddam Hussein et ses deux fils ont survécu. A l'inverse, la disparition de toute résistance organisée depuis vingt-quatre heures alimente les spéculations sur le sort des principaux dirigeants.
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