Positions bloquées sur l'Irak au Conseil de Sécurité

Les Irakiens se montrent plus coopératifs pour faciliter le travail des inspecteurs de l'Onu, mais le pays dispose de missiles d'une portée supérieure à ce qui est autorisé: c'est un constat balancé que Hans Blix, directeur exécutif de la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations Unies (Cocovinu) a livré au Conseil de sécurité de l'Onu, au cours d'une réunion sans doute décisive quant à l'éventualité d'une guerre en Irak. Hans Blix a par ailleurs réfuté largement les preuves apportées devant le Conseil par Colin Powell, secrétaire d'Etat américain. Au chapitre positif, Hans Blix a affirmé que la Cocovinu a pu amplifier son travail d'inspection et bénéficier pour ce faire d'une attitude plus coopérative de la part des autorités irakiennes. "Jamais nous n'avons eu de preuve que les Irakiens savaient à l'avance où nous allions intervenir", a affirmé Hans Blix, répondant ainsi indirectement aux accusations lancées par le secrétaire d'Etat américain Colin Powell, selon lesquelles les Irakiens avaient dissimulé des preuves juste avant l'arrivée des inspecteurs.Satisfecit également sur des points comme les analyses effectuées sur les échantillons prélevés par les inspecteurs, dont les résultats "sont cohérents avec les déclarations irakiennes". Hans Blix, qui a rappelé que le régime de Bagdad devait coopérer activement au travail des inspecteurs, a affimé que "l'on peut considérer que l'Irak est prêt à accepter ces conditions"."Nous sommes conscients, a poursuivi le chef des inspecteurs, que beaucoup d'organisations de renseignement sont persuadées qu'il existe" des armes de destruction massive, mais les inspecteurs ne peuvent se prononcer que sur des éléments qu'ils peuvent prouver... Et il a mis en doute l'interprétation de photos satellite présentées par Colin Powell comme une preuve d'activité suspecte sur un site d'armement irakien. "En fait de mouvement de munitions sur ce site, il peut aussi bien s'agir d'une activité de routine que d'un mouvement de munitions prohibées à l'approche d'une inspection imminente", a dit M. Blix... Missiles prohibésAu chapitre négatif, Hans Blix a relevé que l'Irak possède des systèmes de missiles prohibés, dont la portée excède ce qui a été autorisé par les Nations unies. Le pays dispose également d'installations pouvant permettre de fabriquer des moteurs de missiles.Le responsable de l'Onu n'est toujours pas satisfait non plus des conditions d'interrogatoire des scientifiques irakiens, que les inspecteurs n'arrivent toujours pas à interviewer en privé. Surtout, l'Irak n'a toujours pas fourni les éléments de réponse sur ce que sont devenus différents types d'armes mis au point par le pays. L'Irak n'a pas rendu compte de "nombreux armements prohibés", a-t-il lancé, énumérant les stocks de bacille du charbon, de gaz neurotoxique et de missiles à longue portée. Bagdad doit prouver que ces armes ont été détruites, a-t-il avancé, il s'agit sans doute là des questions les plus sérieuses qui sont aujourd'hui posées. En tout cas, a-t-il conclu, la période "nécessaire pour parvenir à un désarmement de l'Irak grâce aux inspections pourrait être courte en cas de coopération immédiate, active et inconditionnelle" de Bagdad. "Si l'Irak avait coopéré de façon satisfaisante en 1991, la phase de désarmement, sous l'égide de la résolution 687, pourrait avoir été courte et une décennie de sanctions aurait pu être évitée", a-t-il déclaré. Intervant après lui, le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Mohamed ElBaradei, a affirmé que "nous n'avons à ce jour découvert aucune preuve d'activité nucléaire ou d'activité liée au nucléaire interdite en cours en Irak". "L'expérience de l'AIEA en matière de vérification nucléaire prouve qu'il est possible, particulièrement avec un système intrusif de vérification, d'évaluer la présence ou l'absence d'un programme nucléaire, même sans la coopération totale des autorités du pays inspecté", a-t-il ajouté. "Les inspections donnent des résultats"Réagissant à ces interventions, Dominique de Villepin, ministre français des Affaires étrangères, a commencé par rappeler que "nous partageons tous l'objectif d'arriver à un désarmement complet de l'Irak". Mais c'est seulement en cas d'échec des inspections que le recours à la force pourrait être envisagé. Or, a-t-il répété à plusieurs reprises, "nous venons d'entendre que les inspections donnent des résultats". Le ministre a notamment estimé que des progrès avaient été engrangés en matière de survol de l'Irak, d'audition des scientifiques, etc...Renouvelant sa proposition d'augmenter les moyens mis à la disposition des inspecteurs, Dominique de Villepin a lancé une sévère mise en garde sur les conséquences qu'aurait un conflit armé en Irak et a donc réaffirmé qu'il fallait donner toutes leurs chances aux inspections. Il a proposé une nouvelle réunion du Conseil le 14 mars prochain.Prenant la parole un peu plus tard, Colin Powell, le secrétaire d'Etat américain, a affirmé pour sa part que les efforts promis par l'Irak en matière de vérification de son désarmement n'étaient pas suffisants. L'Irak n'a en rien respecté l'esprit des résolutions de l'Onu, a-t-il affirmé, et il n'est plus temps, pour les autorités de Bagdad, de faire des promesses ou de se livrer à des subterfuges. Dès lors, l'Onu devra bientôt se préparer à envisager des "conséquences graves" pour l'Irak.Décret de Saddam Hussein interdisant les armes de destruction massiveDans l'attente de la réunion du Conseil de sécurité, Saddam Hussein avait fait une concession de dernière minute en annonçant l'interdiction des armes de destruction massive dans son pays. Le président irakien a signé un décret interdisant la production et l'importation de telles armes. Il a affirmé par ailleurs que son pays était "exempt d'armes de destruction massive, qu'elles soient nucléaires, chimiques ou bactériologiques". Vendredi, également, le Vatican a tenté de peser de tout son poids dans la crise. Le pape a reçu le vice-Premier ministre irakien Tarek Aziz et lui a demandé des "engagements concrets" montrant la volonté de l'Irak de respecter les résolutions de l'Onu. Simultanément, le cardinal français Roger Etchegaray, en mission à Bagdad, devait rencontrer Saddam Hussein.
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