La guerre des chiffres

Nouveau sport en vogue chez les investisseurs : évaluer les jours ou les semaines de guerre qui nous attendent, pour estimer l'ampleur des conséquences et la rapidité de la reprise. Ainsi quand George W. parle de guerre courte, les marchés sont à la fête, mais s'il a le malheur de mettre le lendemain en garde contre une intervention militaire plus longue que prévu, les indices dévissent... Alors comment analyser les huit jours de hausse consécutives du S&P 500 à New York ? La plupart des experts se montrent circonspects, jugeant que cette embellie a été nourrie uniquement par un sentiment de soulagement que la guerre pourrait être rapide. Et un stratège américain d'évaluer que 25% des problèmes du marché concernent les inquiétudes relatives à l'Irak et 75% relèvent des doutes sur l'économie et les résultats des entreprises. Pas de quoi fanfaronner sur une sortie prochaine du marché baissier.Pour certains professionnels, le long "rally" qu'ont connu les Bourses mondiales depuis 1997 n'était que le couronnement d'un "bull market", un marché haussier qui aurait commencé avant la première guerre du Golfe. Ces partisans des tendances longues redoutent que les investisseurs ne mettent des années à se refaire, en fonction de l'ampleur des pertes essuyées. Selon une étude du cabinet américain de conseil en finances Zakarin, un investisseur "conservateur", au portefeuille de bon vieux père de famille dont la valeur aurait baissé de 10% ces trois dernières années, mettra entre dix mois et plus de cinq ans pour effacer sa moins-value !Tout dépendra du taux de retour de l'investissement en actions : s'il atteint les 11% à 12% qu'ont rapporté en moyenne les Blue chips depuis la seconde guerre mondiale, le petit porteur pourra se refaire en seulement un an ! Mais rien n'est moins sûr. Douglas Cliggott, l'ancien gourou de JP Morgan désormais à la tête d'un hedge fund, ne croit pas que le rendement des actions dépassera 2 à 3% dans les cinq à sept années à venir, au mieux 6 à 7% à long terme...Surtout, heureux et rares sont les investisseurs à n'avoir perdu "que" 10% ces trois dernières années! Pour les moins avisés, dont le portefeuille aurait perdu plus de 50% de sa valeur après l'explosion de la bulle Internet, le retour à zéro du compteur pourrait prendre de 7 ans (avec un rendement à deux chiffres) à... 35 ans ! Quant au pauvre actionnaire qui aurait vu son épargne en actions fondre de 90%, c'est une vie entière qu'il lui faudrait pour récupérer sa mise. A moins bien sûr qu'il n'ait eu la sagesse de sortir plus tôt d'investissements par trop hasardeux "en se coupant un bras", comme disent les vieux boursiers, pour mieux rebondir.
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