La dérive des dérivés

Mécanisme génial ayant permis d'éviter une crise du système bancaire ou bombe à retardement ? Difficile, encore aujourd'hui, de se forger une opinion sur les dérivés de crédit. Dans leur principe, ces instruments financiers sont relativement simples. Pour une banque, ils constituent une forme d'assurance, souscrite pour couvrir le risque pris lorsqu'elle accorde un prêt à une entreprise. Pour un investisseur, il s'agit d'un placement pas tout à faire comme un autre mais qui permet de percevoir une rémunération, et de gagner à chaque fois que le risque en question (défaut de paiement, faillite de l'entreprise...) ne se réalise pas. Ce qui, jusqu'à présent, a été le cas dans l'immense majorité des transactions. Mais le ralentissement de l'économie mondiale fait peser une lourde incertitude sur la santé des entreprises et leur solvabilité. A lui seul, ce facteur fait trembler quelques investisseurs. Car les dérivés de crédit n'ont pas annihilé les risques. Ces derniers sont en quelque sorte mutualisés mais ne disparaissent pas pour autant.Qui, en cas de défaillance, règlera l'addition ? Le porteur final, s'il peut être identifié... A en croire le milliardaire américain Warren Buffett, certains investisseurs n'auraient pas été suffisamment vigilants dans leur approche de ce marché et le débouclage de certaines opérations pourrait bien être douloureux. Il est vrai que l'explosion du marché des dérivés de crédit donne le tournis. Bien présente, la spéculation sur ce marché fait, aux yeux de certains, penser à la bulle Internet. On comprend qu'à l'évocation de cette référence, les plus avertis aient froid dans le dos. On pense bien sûr aux assureurs dont le métier est de vendre de la protection, ce qu'est à la base un dérivé de crédit.Warren Buffet, toujours lui, en évoquant une grande compagnie "plombée" par les dérivés, a fait souffler un petit vent de panique. Mais les assureurs ne sont pas les seuls concernés. Les banques aussi se sont laissées tenter par ce marché si rémunérateur. Censés les protéger, les dérivés ont finalement contribué à les exposer un peu plus aux risques de crédit. On est loin de l'objectif initial...S'agissant des autorités de tutelle, elles semblent pour l'instant dépassées par le phénomène et ne peuvent que constater les grandes difficultés qu'il y a à non seulement évaluer, mais aussi à "localiser" précisément ces instruments. Quant à leur méthode de comptabilisation... Dans un premier temps, instaurer une traçabilité des dérivés constituerait un progrès notable.
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