Changement de culture d'entreprise chez Goldman Sachs, mythe ou réalité ?

Pour Nanda, "Goldman Sachs a fait du bon boulot en rejoignant la cote. Ils ont fait bien mieux que beaucoup d'autres. Les inquiétudes de pré-introductions selon lesquelles la banque allait devenir moins réactive, paresseuse et bureaucratique se sont révélées infondées. Et ils ont réussi à dégager de bons résultats". Goldman contraste avec l'expérience de sociétés de conseil en management comme Arthur D Little dont la vie d'entreprise cotée s'est terminée au bout de 30 ans, en 2002, par une faillite et un retour à un actionnariat privé. Cela ne fera que cinq ans en mai que Goldman a abandonné son statut privé, la comparaison avec Arthur D Little est donc peut-être prématurée. Mais la banque a eu une vision à long terme dès le départ, précise Nanda. Alors que l'introduction en Bourse d'Accenture, entreprise de consulting, n'a profité qu'aux seuls associés existants, Goldman a pris la décision d'en partager les bénéfices entre associés existants et employés non associés. Nanda ajoute que "même après avoir été introduit en Bourse, Goldman Sachs s'est efforcé de maintenir une culture de partnership", ce qui a contribué à maintenir la motivation à long terme. Mais tout le monde n'en est pas convaincu. Ainsi un ancien directeur général affirme que cette culture s'est évanouie depuis 1999. "Goldman était une partnership depuis presque 137 ans au moment de son introduction en Bourse, la plupart des associés étaient dans l'entreprise depuis au moins 25 ans, les gens se sentaient très proches entre eux et attachés aux associés", indique t-il. "Après l'introduction, beaucoup d'associés sont partis et ceux qui sont restés étaient pour beaucoup des managers inexpérimentés dans un environnement économique difficile. Ils n'ont pas réussi à préserver la culture de cette entreprise". Les choses ont empiré avec l'expansion spectaculaire de la banque, ajoute-t-il. En 1986 la banque comptait 6.000 collaborateurs contre 19.476 au 4ème trimestre 2003 avec une pointe à 25.000 en 2001. Au fur et à mesure que de nouvelles équipes étaient recrutées, les équipes existantes devenaient de plus en plus amères. "Il y a deux ou trois ans, ça a été la valse des cadres. Les anciens voyaient arriver les nouveaux avec d'énormes primes de bienvenue. Ils ont commencé à se demander pourquoi rester avec des salaires relativement bas et sont partis", explique un ancien associé. Goldman n'inspire plus la même loyauté qu'avant, dit-il. Ce que confirment certains chasseurs de tête. L'un d'entre eux à Londres note que "Goldman est devenu un passeport. Les gens y travaillent quelques années juste pour pouvoir mettre ce nom sur leur CV". D'après Gary Goldstein, directeur général de Whitney Group, chasseur de tête à New York, "avec la consolidation de l'industrie financière, presque toutes les cultures maison ont disparu". Les critiques citent l'exemple d'Alex Ehrlich, associé pendant 20 ans chez Goldman et ancien patron du métier titres, qui a rejoint UBS en janvier 2003. Des sources indiquent que Ehrlich, qui était à l'époque un ponte du prime brokerage, a fait l'objet de manoeuvres politiques visant à le faire partir. "Certaines sociétés sont devenues bien plus politiques à la suite de leur introduction en Bourse", affirme Goldstein. "La loyauté qu'avaient les individus envers leur entreprise n'existe plus". On a pensé que les entreprises ayant réussi leur mutation, comme la banque d'affaires Jefferies & Co, étaient celles où les salariés détenaient une part substantielle du capital : 36% chez Lehman, 54% chez Jefferies. Pourtant cette part, 45%, est tout aussi importante chez Goldman. Pour John Shaw, président de Jefferies, la banque fonctionne comme une partnership parce que les employés ont des parts leur permettant de contrôler l'entreprise. "Je n'ai pas besoin d'aller bien loin pour voir mes actionnaires. Bien que nous soyons une entreprise cotée, chacun est considéré comme un associé et l'entreprise est gérée comme une partnership. Tout le monde a intérêt à maintenir la croissance et à développer l'entreprise à long terme", précise-t- il. Résultat, Jefferies a conservé sa culture alors qu'elle a plus que triplé son effectif de 500 à 1.700 collaborateurs, selon Shaw. De plus le taux de départ volontaire est de moins de 3%. Il était de 10% l'année dernière chez Goldman, d'après l'étude Fortune sur les 100 entreprises où il fait bon de travailler. Le turnover est une opportunité d'améliorer ses équipes, indique Goldman Sachs dont un porte-parole ajoute : "Notre culture est une composante importante de l'ADN de notre entreprise et nous pensons que c'est un élément clé de différenciation". Les affirmations de perte d'identité culturelle sont peut être excessives. Les étudiants des meilleures universités continuent à citer Goldman Sachs comme leur employeur préféré et les chasseurs de têtes disent que la banque n'a rien perdu de sa superbe. "Goldman Sachs est toujours au top de la banque, ses postes sont toujours parmi les plus convoités. Malgré tout, on voit plus de CV de Goldman Sachs qu'on en voyait avant", conclut Shaun Springer, directeur général du cabinet de chasse Napier Scott.
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