Amélioration surprise du déficit commercial américain

C'est une amélioration inattendue qu'a enregistrée le commerce extérieur américain en novembre dernier. Alors que les économistes s'attendaient à une légère dégradation du déficit mensuel à 42 milliards de dollars, après 41,8 milliards en octobre, c'est en fait un déficit de 38 milliards de dollars qui a finalement été observé. Une performance qui reflète essentiellement de bons chiffres en matière de ventes d'avions et qui ne change donc pas le problème de fond du déséquilibre des échanges commerciaux des Etats-Unis.Selon les chiffres publiés par le département du Commerce, les exportations américaines ont progressé de 2,9% en novembre, à 90,6 milliards de dollars, tandis que les importations se repliaient très légèrement, à 128,6 milliards. Elément clé d'explication de l'augmentation des exportations : le poste avions civils, qui a enregistré une croissance de 1,2 milliard d'un mois sur l'autre. Globalement, l'évolution des exportations américaines tout au long de l'année écoulée semble témoigner des effets bénéfiques de l'affaiblissement du dollar sur la compétitivité des produits du pays. En effet, le montant des biens et services exportés a crû à peu près régulièrement sur les onze premiers mois de 2003, passant de 82 milliards de dollars en janvier à 90,6 milliards en novembre. Cela ne signifie pas que le déficit commercial américain soit en voie de se résorber. En effet, les importations, elles aussi, s'inscrivent à des niveaux élevés, stimulées par la croissance de l'activité économique. Si bien qu'au total, l'ensemble de 2004 sera marqué par un déficit record. Le déficit commercial cumulé sur onze mois s'établit déjà à 446,8 milliards de dollars, contre 418 milliards sur l'ensemble de 2002, montant qui constituait lui-même déjà un record annuel.L'amélioration constatée en novembre n'est donc pas de nature à faire retomber les inquiétudes suscitées aux Etats-Unis par ce déficit abyssal. Certes, les milieux économiques américains pourront se féliciter de ce que le déficit des échanges avec la zone euro se soit légèrement réduit en novembre 2003, passant de 6,4 milliards de dollars en octobre à 6 milliards. Encore une manifestation de l'impact de la chute du dollar face à l'euro sur les échanges commerciaux, de nature, à l'inverse, à relancer les interrogations formulées en Europe sur les conséquences des désordres monétaires actuels.Les dirigeants économiques américains peuvent également se réjouir de la diminution du déficit avec la Chine, passé de 13,5 à 10,8 milliards de dollars sur un mois. Sur les onze mois de 2003, la déficit avec la Chine ne s'en établit pas moins au niveau historique de 114,1 milliards de dollars, ce qui nourrit outre-Atlantique les velléités protectionnistes envers la République populaire, dont les usines florissantes sont accusées de détruire des emplois aux Etats-Unis. Cela dit, le boum économique de la Chine fait de plus en plus de ce pays un client important pour les entreprises américaines : en novembre dernier, la Chine a acquis des biens et services aux Etats-Unis pour un montant record de 3,3 milliards de dollars. Ce qui pourrait laisser espérer aux Américains que ce pays devienne petit à petit un partenaire commercial de premier plan - et dans une relation qui ne serait plus à sens unique.C'est dans ce contexte qu'il faut comprendre l'intervention d'Alan Greenspan, président de la Réserve fédérale américaine, qui a affirmé mardi sa confiance dans le fait que la problème de l'énorme déficit commercial américain pourra être traité sans intervention gouvernementale. Pour Alan Greespan, rien ne serait pire qu'un "protectionnisme rampant" qui menacerait l'ensemble des échanges commerciaux.Positifs, les chiffres du commerce extérieur de novembre ne sont donc pas de nature à changer la donne en ce qui concerne l'ampleur du déficit commercial américain. Pour Marie-Pierre Ripert, économiste chez CDC Ixis, "la dépréciation du dollar aura probablement un effet positif sur la balance commerciale, mais sans doute plutôt modéré, les exportateurs étrangers tendant à réduire leurs marges". Et de plus, le dynamisme de l'économie américaine étant plus important que celui du reste du monde, il continuera à "tirer" le déficit commercial des Etats-Unis.Dans l'immédiat, cependant, ces chiffres inattendus ont fait vivement régir le dollar. Alors que la devise américaine était déjà en hausse ce matin, suite aux propos de Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, qui avaient affaibli l'euro (lire ci-contre), le mouvement s'est accentué après la publication des données de novembre. En fin d'après-midi, l'euro s'échangeait pour 1,2724 dollar, loin de son plus haut de 1,2899 atteint lundi dernier.
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