Inflation, le retour ?

C'est peut-être la question économique la plus importante du moment. De la réponse qu'on lui apporte dépend d'abord la capacité de l'économie américaine à continuer à croître vigoureusement sans que la Réserve Fédérale ne se sente obligée de relever ses taux. C'est donc la capacité de la principale locomotive économique mondiale à continuer encore et toujours à plein régime qui est en jeu.Mais pas seulement. Le taux directeur de la BCE, actuellement de 2%, est inchangé depuis juin 2003, malgré de multiples pressions et encouragements en faveur d'une nouvelle détente monétaire. Son président Jean-Claude Trichet sera d'autant plus inflexible que paraît menacer une nouvelle flambée des prix. L'Europe vient pourtant de se voir remettre par le FMI un bonnet d'âne pour une croissance stagnante (1,7% pour 2004) au sein d'un monde de plus en plus prospère (4,6% de progression pour l'année en cours). Une baisse des taux pourrait lui être profitable.Trois principaux facteurs viennent aujourd'hui alimenter les craintes d'une résurgence de l'inflation.Le premier, c'est la vigueur de l'économie chinoise. Officiellement, les prix à la consommation ne progressent en Chine que d'un peu moins de 3%, la limite voulue par les autorités de Pékin. En réalité, déclarait voici quelques jours au New York Times l'économiste de Morgan Stanley Andy Xie, les prix dérapent actuellement de 7 à 8% par an, se répercutant inéluctablement sur les tarifs facturés aux importateurs.La deuxième source d'inquiétude est la plus apparente, sans aucun doute la plus importante aussi : les prix des matières premières continuent de flamber. Ils ont grimpé de plus de 3% pour le seul mois de mars - hors énergie. Quand au pétrole, le cours du baril flirtait hier avec les 34 dollars - soit, exprimée en euros, une progression de plus de 12% en l'espace de six semaines. Car en se repliant par rapport au dollar, l'euro a sans doute soulagé les exportateurs, mais il a également perdu de sa capacité de rempart contre l'inflation importée.La vigueur de l'économie américaine fait enfin elle aussi sentir ses effets sur les prix. Au cours des trois premiers mois de 2004, les prix à la production aux Etats-Unis ont gagné 2,1%, soit deux fois plus que l'an dernier.Il n'y a pas encore péril en la demeure. Le secrétaire au Trésor américain John Snow vient d'assurer que son pays disposait encore d'un vaste réservoir de croissance non inflationniste. A 1,7% pour la zone euro, la hausse des prix à la consommation demeure pour le moment maîtrisée de ce côté de l'Atlantique. Elle pourrait même, selon certains, être bien plus importante sans réel effet néfaste, bien au contraire : une croissance plus inflationniste serait, selon les tenants de cette thèse, favorable à l'emploi.Le passé a toutefois montré que l'inflation, une fois relancée, n'est pas un phénomène aisé à contenir. Au cours des mois à venir, Alan Greenspan et Jean-Claude Trichet auront plus que jamais les yeux rivés sur la courbe de l'évolution des prix.
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