Morgan Stanley condamné dans son procès face à LVMH

C'est une décision qui ne va pas manquer de faire du bruit dans la communauté financière. Pour la première fois, un tribunal vient de donner raison à un émetteur accusant une banque d'avoir manqué d'objectivité dans ses études et recommandations. Le tribunal de commerce de Paris vient ainsi de condamner Morgan Stanley à payer 30 millions d'euros pour préjudice moral à LVMH (propriétaire de La Tribune).Dans une assignation de novembre 2002 (voir ci-contre), le groupe de luxe reprochait à l'intermédiaire d'avoir "diffusé pendant trois années des analyses financières contenant des informations erronées et biaisées". En d'autres termes, LVMH accusait Morgan Stanley d'inciter par ses recommandations les investisseurs à se porter sur les titres Gucci, dont l'établissement est la banque conseil. Le groupe de luxe réclamait 100 millions d'euros de dommages et intérêts.Le tribunal a donc abondé dans le sens de LVMH, estimant qu'il y avait bien une "faute lourde de Morgan Stanley au détriment de LVMH et que cette faute a conduit à un préjudice considérable tant moral que matériel". Outre les 30 millions de préjudice moral, le tribunal a nommé un expert chargé de déterminer, d'ici fin avril, le préjudice matériel en vue d'éventuels dommages supplémentaires. A cet égard, LVMH a précisé être en mesure de prouver que les études délivrées par Morgan Stanley lui avaient causé un préjudice matériel de quelque 70 millions d'euros.Reste que cette décision de justice suscite de vives réactions. D'abord chez les analystes financiers, qui redoutent d'autres actions du même type. A l'avenir, "ils devraient se montrer plus prudents concernant ce qu'il vont mettre dans leurs publications", s'inquiétait avant même le jugement un patron de recherche, contacté par Reuters. Mais c'est surtout du côté de Morgan Stanley, qui réclamait 10 millions d'euros de dommages et intérêts pour procédure "abusive et sans objet", que le mécontentement est le plus sensible. "C'est un jugement terrifiant pour tous les analystes de la place", a estimé Patrick Ponsolle, président de Morgan Stanley France. Des propos qui font écho à ceux des conseils de la banque. "Nous considérons que c'est une atteinte à la liberté d'expression et un risque majeur, car les analystes constituent des vecteurs d'information pour l'ensemble du marché", s'est indigné Bruno Quentin, avocat de Morgan Stanley, ajoutant: "si l'on veut des analystes bridés, corsetés comme on cherche parfois à avoir une presse bridée et corsetée, qu'on continue comme ça et on a tout lieu de penser que très vite on aura des analystes aux ordres, le petit doigt sur la couture du pantalon". D'ores et déjà, les avocats de la banque ont annoncé qu'elle allait interjeter appel.
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