"Je ne vois pas beaucoup de catalyseurs pour les éditeurs de jeux vidéo en Bourse"

latribune.fr- Les reports de lancements de jeux annoncés récemment par les éditeurs ne risquent-ils pas de mettre à mal la confiance des marchés?Bruno Hareng- Après les avertissements d'Eidos et Infogrames, Ubi Soft était particulièrement attendu car jugé plus sûr que ses concurrents. Le marché pensait que les avertissements chez Ubi Soft appartenaient au passé. Après cette annonce surprise, il y a donc effectivement un risque de manque de crédibilité, même si les fondamentaux restent solides. Le problème pour le secteur du jeu est aujourd'hui le même que pour l'industrie du film. Le fait de se concentrer sur peu de titres, mais à fort potentiel - un mouvement initié par Electronic Arts - peut se révéler payant. Mais, en contrepartie, il y a évidemment un risque plus important. Si le jeu ne marche pas, il pèse immédiatement sur les comptes et de surcroît hypothèque les chances de succès des versions suivantes.Les éditeurs ont aussi mis en cause la faiblesse de leurs ventes à Noël et le moindre nombre de nouveautés en 2003 pour justifier leurs avertissements. L'année 2004 est-elle plus prometteuse sur ce plan?Tout d'abord, je dirais que la déception sur Noël provient en partie de la concurrence accrue d'Electronic Arts sur les éditeurs européens. Or, en 2004, cette concurrence devrait s'accroître. Par conséquent, tous ne profiteront pas de la même façon de la hausse du marché prévue entre 3 et 6%. Infogrames devrait être un peu en dessous, tandis que Ubi Soft pourrait profiter d'un catalogue porteur avec notamment Splinter Cell 2. Finalement, le report du lancement de ce jeu pourrait être bénéfique pour le groupe. Ses ventes pourraient être dopées par une éventuelle baisse des prix des consoles PS2, concomitamment à sa sortie au printemps.Après les diverses restructurations intervenues chez les éditeurs, quel regard portez-vous aujourd'hui sur leur situation financière?Infogrames a intelligemment restructuré sa dette en utilisant sa filiale américaine. Le risque de faillite est désormais très limité. Chez Ubi Soft, qui possède aussi des convertibles, il n'y a pas non plus de risque majeur. Pour que ces éditeurs se retrouvent en difficulté, il faudrait une année 2005 particulièrement catastrophique. Mais ce n'est pas mon scénario. L'an prochain, la décroissance attendue dans le secteur des jeux vidéo (liée à l'approche de la fin du cycle actuel) devrait être amortie par la sortie de nouvelles consoles portables comme la PSP de Sony et le NDS de Nintendo, attendues fin 2004.En Bourse, les éditeurs ont patiné depuis le printemps. Vont-il décoller au cours de cette année?A court terme, je ne vois pas beaucoup de catalyseurs. A mon avis, l'évolution boursière du secteur sera très corrélée aux annonces sur les jeux phare (état des commandes, volumes de ventes...), comme cela a été le cas l'an passé avec Matrix chez Infogrames. Cette année il faudra compter avec Driver3 pour Infogrames et Splinter Cell 2 pour Ubi Soft. C'est la raison pour laquelle, je préfère rester prudent.Les analystes semblent préférer Ubi Soft à Infogrames. Pourtant, Ubi Soft n'a pas vraiment de prime en Bourse. Pourquoi?C'est sans doute un problème de taille critique. Beaucoup estiment que la taille est primordiale dans ce secteur. Or, Ubi Soft est plus petit que son concurrent.Compte tenu de ces problèmes de taille et de l'engouement actuel pour les OPA, faut-il s'attendre à une concentration dans les jeux vidéo?Il n'est pas insensé d'imaginer des rapprochements entre grands groupes. Cependant, je pense que les premières opérations seront plus modestes. Les Européens pourraient racheter des studios américains ou japonais de petite taille. Quant à VU Games, dont on a beaucoup parlé ces derniers mois, sa maison-mère a aujourd'hui plus de marge de manoeuvre et n'est plus pressée de vendre. Mais Vivendi Universal est certainement conscient que la meilleure solution à long terme n'est pas de garder VU Games. Il serait plus logique pour des questions d'efficacité de l'adosser à un groupe dont le jeu est le coeur de métier.
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