La double alarme de Nokia

Les autorités boursières le recommandent toutes vivement : messieurs les dirigeants d'entreprises, ne jouez pas avec les nerfs si fragiles des investisseurs, en cas de mauvaise nouvelle, prenez les devants, agitez haut les bras, clamez fort les risques de déconvenues, épargnez leur des déceptions trop cuisantes. Le "profit warning", que l'on traduit fort vilainement par "avertissement sur les résultats" dans la langue de Molière, doit atténuer le traumatisme et partant la réaction des marchés selon un savant mécanisme, le plus souvent à double détente : première étape, un peu avant la publication officielle des résultats, annoncer que le compte n'y est pas, puis dans un second temps, calmer le jeu en affinant les perspectives et en détaillant des mesures de redressement. Un principe de bonne conduite qui semble dicté par le célèbre adage de la "faute avouée, à moitié pardonnée".A moitié ? A voir. Nokia a vu son cours dégringoler de près de 17% le 6 avril, lorsque le premier fabricant mondial a prévenu que ses ventes du premier trimestre n'afficheraient pas la croissance de 3% à 7% attendue mais seraient en baisse de 2%. Un faux pas sanctionné illico avec la plus grande sévérité. Vendredi, lorsque l'industriel finlandais a dévoilé ces piètres chiffres dans leur intégralité, notamment une baisse de 16% du bénéfice sur le trimestre, les dirigeants ont dû battre leur coulpe plus fort encore : las, le deuxième trimestre ne se présente guère sous de meilleurs jours, le bénéfice baissera de nouveau et les ventes sans doute aussi... Bis repetita placent. Nouvelle punition à Helsinki, mais aussi à Stockholm, Francfort, Paris et New York où le géant du mobile est coté : -8% sur sa place de référence. La moitié de la sanction initiale. Faute à demi pardonnée ? Le coût de la rédemption, lui, ne saurait être qualifié de demi-mesure : 23 milliards d'euros de capitalisation boursière envolés, plus du quart de sa valeur en quinze jours. Une alerte peut en cacher une autre : voici l'enseignement que les marchés tireront du cas Nokia, accentuant leur paranoïa naturelle. En tirant par deux fois la sonnette d'alarme, le finlandais a fait descendre en marche bien de ses fidèles soutiens, désormais très sceptiques à l'égard de sa capacité à garder ses parts de marché grignotées à vitesse grand V par le dynamique sud-coréen Samsung et l'américain Motorola. Combien de bonnes nouvelles à venir pour se voir entièrement réhabilité ?
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